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De la Grenouille et du Boeuf.

La Grenouille ayant un jour aperçu un Boeuf qui paissait dans une prairie, se flatta de pouvoir devenir aussi grosse que cet animal. Elle fit donc de grands efforts pour enfler les rides de son corps, et demanda à ses compagnes si sa taille commençait à approcher de celle du Boeuf. Elles lui répondirent que non. Elle fit donc de nouveaux efforts pour s’enfler toujours de plus en plus, et demanda encore une autre fois aux Grenouilles si elle égalait à peu près la grosseur du Boeuf. Elles lui firent la même réponse que la première fois. La Grenouille ne changea pas pour cela de dessein; mais la violence qu’elle se fit pour s’enfler fut si grande, qu’elle en creva sur-le-champ.

Du Cheval et du Lion.

Un vieux Lion ne pouvant plus chasser avec la même vitesse et le même succès, eut envie de manger un Cheval qu’il trouva en son chemin. Il s’avisa de contrefaire le Médecin, et de lui demander des nouvelles de sa santé. Le Cheval qui comprit à peu près la mauvaise intention du Lion, lui répondit qu’il ne se portait pas trop bien, et que depuis peu il s’était mis une épine au pied, dont il se sentait fort incommodé. Le Lion s’offrit sur-le-champ à la lui tirer. Le Cheval accepta l’offre et se mit en posture. Quand le Lion se fut approché pour tirer l’épine, le Cheval allongeant le pied frappa rudement le Lion au milieu du front, et se mit à fuir de toute sa force, laissant le Lion dans un état pitoyable et désespéré d’avoir manqué son coup.

Le Combat des Oiseaux et des Animaux terrestres.

Les Oiseaux et les Animaux terrestres se déclarèrent la guerre pour la prééminence, et pour défendre l’honneur de leur espèce. Pour décider leur grande querelle, ils se donnèrent bataille. La victoire balança longtemps sans se déclarer et sans prendre parti. La Chauve-Souris, qui se persuada que les Oiseaux allaient être vaincus, se rangea du côté des Animaux terrestres. Sa prévoyance fut trompée; les Oiseaux remportèrent une victoire complète sur leurs ennemis, contre l’attente de la Chauve-Souris qui fut chassée de la compagnie des Oiseaux. Elle eut tant de honte et de douleur de son infortune, que depuis ce temps-là elle n’ose plus voler en plein jour, et ne se montre que la nuit.

De l’Épervier et de la Colombe.

L’Épervier en poursuivant une Colombe, tomba imprudemment dans les filets qu’un Paysan avait tendus. Se voyant pris de la sorte, il employa toute son éloquence pour persuader au Paysan de lui rendre la liberté. Entre les raisons qu’il lui allégua pour le toucher, il lui dit qu’il ne lui avait jamais fait de tort. – Cela peut être, lui répliqua le Paysan; mais la Colombe que tu poursuivais maintenant avec tant d’ardeur, dans l’intention de la dévorer, ne t’avait aussi jamais offensé. -

D’un Loup et d’un Renard.

Le Loup avait ramassé dans sa tanière de grandes provisions, pour y subsister assez longtemps, sans être obligé d’en sortir. Le Renard eut envie d’en avoir sa part. Il vint rendre visite au Loup et lui demander des nouvelles de sa santé. Le Loup se défiant des finesses du Renard, et craignant qu’il ne voulût lui jouer quelque mauvais tour, feignit de se trouver mal, disant que son indisposition ne lui permettait pas de sortir de sa tanière, et que c’était pour se remettre qu’il se tenait en repos. Il le pria d’aller demander aux Dieux le retour de sa santé. Le Renard mal satisfait de cette réponse, et du procédé du Loup qui rompait toutes ses mesures, alla trouver un Berger, lui exposa l’état où le Loup se trouvait, et lui conseilla de venir promptement en sa tanière, où il lui serait fort aisé de le tuer, parce qu’il ne se tenait pas sur ses gardes. Le Berger persuadé par le conseil du Renard, vint attaquer le Loup, et le tua sans une grande résistance. Cette mort mit le Renard en possession de la tanière et de toutes les provisions du Loup; mais il n’en jouit pas longtemps: le Chien du Berger survint, qui prit le Renard, et l’étrangla sur-le-champ.

De l’Âne et du Cheval.

Un Cheval richement paré, rencontra dans son chemin un pauvre Âne qui gémissait sous le poids de sa charge. Le Cheval, que son riche harnais rendait insolent, remplissait l’air de hennissements, et criait à l’Âne de se retirer et de lui faire place. L’Âne saisi de frayeur, se rangea promptement sans répliquer. Le Cheval allait à la guerre; il en revint si harassé et si usé, que son maître le voyant hors d’état de lui rendre aucun service, le vendit à un Paysan qui le mit à un chariot pour porter du fumier. L’Âne le rencontra au bout de quelque temps, et lui demanda, tout étonné d’un changement si étrange, ce qu’il avait fait de son beau harnais, de sa riche housse, de son mors doré, qui le rendaient si fier et si superbe, et qui lui inspiraient tant de mépris pour ceux qui ne voudraient maintenant faire aucune comparaison avec lui.

D’un Cerf et d’un Chasseur.

Un Cerf se regardant dans une fontaine, fut charmé de la beauté de son bois; mais ses jambes grêles et déliées ne lui plurent nullement. Pendant qu’il se contemplait et qu’il raisonnait en lui-même, un Chasseur survint tout à coup, accompagné de Chiens, en sonnant du Cor. Ce bruit obligea le Cerf à prendre promptement la fuite. Il devança les Chiens de bien loin en rase campagne, à la faveur de la légèreté de ses jambes. Mais le Chasseur le poursuivant toujours, le Cerf se cacha dans une forêt où ses cornes demeurèrent embarrassées aux branches des arbres. Alors il reconnut son erreur, et il comprit combien ses jambes déliées et souples lui étaient utiles pour le délivrer de ceux qui le poursuivaient; et combien son bois, dont il avait tant admiré la beauté, lui était funeste, puisqu’il était la cause de sa mort.