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Il y avait une heure qu’ils avaient quitté Tuscaloosa quand un petit Piper Pacer sortit des nuages, et battit des ailes sur leur droite.

Patrick Gates l’identifia tout de suite :

— Aéro-club de Meridian. Bien loin de son terrain le frère !

Kowask ne dit rien. C’était certainement l’une des identifications dont le commodore Rice avait parlé. La seconde eut lieu à deux cents miles de là, en Louisiane. Un D.C.3 d’une petite compagnie privée les survola à plusieurs centaines de pieds.

— Est en route pour Bâton-Rouge, dit laconiquement Patrick Gates qui ne paraissait se douter de rien.

Il consulta sa montre.

— Encore une bonne heure et nous arriverons.

Il désigna un sac en matière plastique.

— Si vous avez faim. Sandwiches et café. Kowask secoua la tête.

— Pouvez-vous m’en passer un, et aussi une tasse de jus ?

Kowask le servit puis alluma une cigarette. Le temps se couvrait alors qu’ils approchaient du Texas.

— Pas extraordinaire ! Ça vient du Golfe.

Il descendit à mille pieds. Kowask se dit que s’il allait trop bas les radars ne pourraient pas les repérer. Cette inquiétude s’accentua quand l’appareil commença de voler à cinquante mètres au-dessus des prairies.

— Pourquoi faites-vous’ainsi ?

— Pour ne pas recevoir d’ondes-radar. Il y en a un du côté d’Houston. Inutile de signaler notre présence.

Kowask calcula qu’on avait dû perdre leur trace depuis an quart d’heure environ. Cela représentait près de cinquante miles d’écart. Pour l’instant il se sentait en sécurité mais on finirait par découvrir le colonel Burgeon et le garde. Peut-être y avait-il un comité de réception à Willis.

Une phrase du pilote le réconforta :

— J’espère que vous ne vous attendez pas à trop de confort. Nous allons atterrir en pleine campagne, non loin d’une maison en partie en ruine, il n’y a qu’un type pour garder la propriété. Il faut prendre l’eau du puits et dormir sur des matelas pneumatiques.

— Il y a l’électricité ?

— Oui. Le téléphone aussi.

Il n’aurait que Gates et le gardien sur les bras.

— Le type s’appelle Barton. Il est un peu timbré. À force de vivre seul avec ses bêtes. Ne faites pas trop attention à lui.

Deux minutes à peine et le pilote tendit le bras.

— Nous allons atterrir entre les deux haies. Elles étaient si hautes que l’avion une fois à terre serait invisible.

— Attention, le sol est plutôt irrégulier.

Un grand type sortait d’une maison au toit en partie effondré et, les jambes écartées, les mains aux hanches, regardait l’appareil se poser.

* * *

De ses doigts d’acier John Charles avait dévissé le manchon du tube de chauffage central. L’eau de l’installation avait toute coulé dans sa cellule et s’infiltrait sous la porte. Il avait fait glisser la chaîne en dehors du tube et se trouvait libre. Il plia encore le tuyau, et après plusieurs mouvements réussit à dévisser l’autre manchon. Il avait à sa disposition une excellente matraque d’un mètre cinquante de long.

Avec elle il se mit à frapper sur toute la tuyauterie dans le mur. Le vieux marin ne paraissait pas entendre le tumulte, mais au bout d’un quart d’heure Charles crut surprendre un léger bruit. Il devina que quelqu’un était derrière la porte.

— Ouvrez-moi ! Ouvrez-moi donc ! Cria-t-il. Je vais me noyer.

Un bruit de voix. Collé contre le bois de la porte il sourit. Des voix de femmes. Le vieux chnoque ne devait pas être là.

— Vite, vite ! cria-t-il.

Enfin une clé grinça dans la serrure et il leva sa matraque. Peu lui importait de frapper une femme. Celle qui entra, la sœur du commodore, fut étendue pour le compte tandis que les autres figées de peur se collaient contre le mur.

— L’argent, rite ! Donnez-moi l’argent.

D’une poche de tablier il sortit un porte-monnaie, vit qu’il contenait des billets de cinq et dix dollars. Il poussa les deux femmes dans la cave, referma la porte et s’enfuit.

Son coup de téléphone à Tuscaloosa lui révéla l’ampleur du désastre. Le secrétaire du club, inquiet à la suite de son coup de téléphone interrompu sur le terrain, était parti aux nouvelles. Il avait trouvé le gardien à moitié mort et le colonel sérieusement malmené et ligoté dans le coffre d’une Buick.

— Bon, dit Charles. Venez immédiatement ici avec tout l’argent dont vous disposez. Vous me trouverez à l’aéroport, le vais louer un appareil pour Houston. Prenez trois hommes avec vous, Grand, Duddles et Powell. Il faut que vous soyez ici dans moins de deux heures.

À l’aéroport il put louer un Martin 202 avec équipage, pour deux mille dollars. On lui assura le départ pour une heure plus tard et l’arrivée à Houston pour quatorze heures.

Il usa sa patience dans le bar, fumant et buvant du café en attendant ses amis de Tuscaloosa. Quand ils arrivèrent il ne fut pas peu surpris de voir le colonel Burgeon parmi eux. L’officier supérieur avait un pansement sur la nuque. Il paraissait plein d’une rage contenue :

— Je suis grandement coupable, Charles, mais je vous jure que je le descendrai.

— Il est à Willis ?

— Oui.

— Vous avez téléphoné là-bas ?

— Pas à Barton, il est trop idiot, mais maintenant Gates doit s’y trouver.

— Non. Laissons. Ce gars est capable d’intercepter la communication. Il faut lui laisser croire qu’il est en pleine sécurité.

En compagnie du secrétaire il alla régler le prix de la location. Le fait qu’il paya en billets de cent dollars parut surprendre l’employé. Peu lui importait. Comme Burgeon il voulait la peau de Kowask. Le reste le laissait indifférent.

— Il y a quand même un espoir, dit-il à Burgeon. Si nous le retrouvons à temps et le liquidons, personne ne pourra plus empêcher le déroulement de l’opération Cayo Bajo. Tout n’est qu’une question de temps.

— Ne croyez-vous pas qu’il ait pu donner des indications précises sur sa destination ? émit le secrétaire.

Le colonel secoua énergiquement la tête, grimaça à cause de la douleur qu’il éprouvait à la nuque :

— Non. Je me souviens parfaitement lui avoir indiqué le lieu secret de notre base dans la voiture. Depuis il n’a pu entrer en contact avec qui que ce soit.

Une demi-heure plus tard, dans le bar de l’aéroport, le haut-parleur les avertit que leur équipage les attendait en bout de la piste № 3.

Ces six hommes au visage fermé, à l’allure assurée, firent retourner quantité des personnes en attente. Le capitaine Charles avait tout prévu. Il avait téléphoné à une agence d’Houston pour qu’une voiture rapide les attende à l’aéroport.

— Dans moins de trois heures nous serons au vieux ranch, dit-il entre ses dents alors que le 202 décollait. Espérons que nous arriverons à temps.

CHAPITRE XVII

En moins d’une demi-heure Serge Kowask avait visité les lieux et découvert l’endroit idéal pour enfermer le pilote et Barton, le vieux cow-boy ivrogne. Celui-ci leur avait servi un tord-boyaux effroyable, de la viande froide avec des épis de maïs bouillis et arrosés de beurre. Le marin avait mangé sur le pouce tout en regardant autour de lui. Il décida d’enfermer les deux hommes dans une porcherie désaffectée. La porte en était solide et il pouvait la bloquer avec les poutres qui traînaient ça et là. Comme ouverture il n’y avait qu’un soupirail étroit et celle de l’auge. Personne ne pouvait s’échapper de là.