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« Avec un bien appartenant à Mme Ellerton, conclut-elle piteusement.

— Eh bien, tu l’as maintenant, dit Hodges. On peut poursuivre ? Parler peut-être de l’homme qui le lui a donné en prétendant que la compagnie était impatiente de connaître l’avis des consommateurs sur un produit qui n’est plus sur le marché ?

— Et de l’homme qui les espionnait, ajoute Holly, les yeux toujours baissés. L’homme qui les espionnait avec des jumelles depuis l’autre côté de la rue. »

L’ancien coéquipier de Hodges tapote le sachet contenant le capuchon enveloppé de mouchoirs.

« Je vais faire analyser ça pour les empreintes, mais j’ai pas grand espoir, Kerm. Tu sais comment on enlève et remet ce genre de cache.

— Ouaip, dit Hodges. En le pinçant. Et il faisait froid dans ce garage. Assez froid pour que mon haleine se condense. Le gars devait sûrement porter des gants.

— Pour le type de l’épicerie, tout porte à croire qu’il s’agit d’une espèce d’arnaque, dit Izzy. Ça en a la configuration. Peut-être qu’il a téléphoné une semaine plus tard pour essayer de lui faire croire qu’en acceptant le jeu obsolète, elle était dans l’obligation d’en acheter un plus récent et plus cher, et elle lui a conseillé d’aller se faire voir. Ou il a pu utiliser les infos du questionnaire pour pirater son ordinateur.

— Pas l’ordinateur que j’ai vu, dit Holly. Il était plus vieux que Mathusalem.

— Vous vous êtes bien baladée dans cette maison, hein ? dit Izzy. Vous avez aussi vérifié dans l’armoire à pharmacie pendant que vous meniez votre petite enquête ? »

C’en est trop pour Hodges.

« Elle faisait ce que tu aurais dû faire, Isabelle. Et tu le sais. »

Le rouge monte aux joues d’Izzy.

« On vous a appelés par courtoisie, c’est tout, et j’aurais préféré qu’on s’abstienne. Vous êtes toujours source d’ennuis, vous deux.

– Ça suffit », dit Pete.

Mais Izzy est accoudée à la table, penchée en avant, ses yeux passant du visage de Hodges au sommet de la tête baissée de Holly.

« Ces deux mystérieux hommes — s’ils existent — n’ont rien à voir avec ce qui s’est passé dans cette maison. L’un d’eux manigançait une arnaque, l’autre était un simple voyeur. »

Hodges sait qu’il devrait rester aimable — maintenir la paix, et tout ça —, mais il n’y arrive tout simplement pas.

« Un pervers salivant à l’idée de mater une femme de quatre-vingts ans en train de se déshabiller ou de voir une tétraplégique se faire faire sa toilette ? Ouais, bien sûr, ça tient la route.

– Écoute-moi bien, dit Izzy. Maman a tué sa fille, puis s’est tuée. Elle a même laissé ce qui ressemble à un mot d’adieu — Z, la lettre finale. Ça peut pas être plus clair. »

Z-Boy, pense Hodges. Celui qui se cache cette fois-ci sous le Parapluie Bleu de Debbie signe Z-Boy.

Holly lève la tête.

« Il y avait aussi un Z dans le garage. Gravé dans le bois au-dessus de la porte. Bill l’a vu. Zappit commence aussi par un Z, vous savez.

— Oui, dit Izzy. Et Kennedy et Lincoln ont le même nombre de lettres, ce qui prouve qu’ils ont été tués par le même homme. »

Hodges jette un coup d’œil à sa montre, il doit bientôt partir et c’est tant mieux. À part contrarier Holly et foutre Izzy en rogne, cette entrevue n’a été d’aucune utilité. Et ne peut l’être, car Hodges n’a aucunement l’intention de dire à Pete et Isabelle ce qu’il a découvert cette nuit sur son propre ordinateur. Cette information pourrait leur faire opérer un virage à cent-quatre-vingts degrés dans leur enquête, mais il va la garder pour lui le temps de mener la sienne. Il ne veut pas croire que Pete ferait foirer l’affaire mais…

Mais ça se pourrait. Parce que être minutieux ne veut pas dire être réfléchi. Et Izzy ? Elle ne veut pas être celle qui ouvre la boîte de Pandore emplie d’histoires de romans de gare à propos de lettres énigmatiques et d’hommes mystérieux. Pas quand la tragédie Ellerton-Stover fait déjà la une du journal du matin accompagnée d’un récapitulatif complet sur la façon dont Martine Stover s’est retrouvée paralysée. Pas quand Izzy se prépare à monter en grade dès le départ à la retraite de son actuel coéquipier.

« Pour faire court, dit Pete, on reste sur le meurtre-suicide et on tourne la page. On doit tourner la page, Kermit. Je pars à la retraite. Izzy va se retrouver avec une multitude de dossiers sur les bras et sans coéquipier pour un bon moment grâce à ces foutues coupes budgétaires. Ça, là », il montre les deux sachets en plastique, « c’est pas inintéressant mais ça ne change rien à la clarté des faits. À moins que tu penses qu’on a affaire à un maître du crime ? Un maître du crime qui roule en vieille bagnole et raccommode son manteau avec du scotch ?

— Non, je ne pense pas. » Hodges se souvient d’un truc qu’a dit Holly à propos de Brady Hartsfield hier. Elle a utilisé le mot architecte. « Je pense que vous avez raison. Meurtre-suicide. »

Holly lui jette un bref regard de surprise blessée avant de baisser les yeux.

« Mais tu veux bien faire quelque chose pour moi ?

— Si je peux, oui, dit Pete.

— J’ai essayé d’allumer la console de jeux mais l’écran est resté noir. Sûrement plus de batterie. J’ai pas voulu ouvrir le compartiment à piles parce que ça vaudrait le coup d’analyser les empreintes sur le petit bitoniau coulissant.

— Je veillerai à ce que ce soit fait mais je doute…

— Ouais, moi aussi. Non, ce que je voudrais, c’est qu’un de vos experts le fasse démarrer et vérifie les différents jeux dessus. Voir si rien ne sort de l’ordinaire.

— OK », dit Pete qui remue légèrement sur sa chaise lorsque Izzy lève les yeux au ciel.

Hodges n’en est pas certain, mais il pense que Pete vient de lui donner un petit coup de pied sous la table.

« Faut que j’y aille, dit Hodges en attrapant son portefeuille. J’ai raté mon rendez-vous d’hier. Je ne peux pas rater celui-ci.

— C’est nous qui payons, dit Izzy. Avec toutes ces précieuses preuves que vous nous avez apportées, c’est le moins que l’on puisse faire. »

Holly marmonne autre chose dans sa barbe. Hodges n’en jurerait pas cette fois, même avec son oreille entraînée, mais il pencherait pour garce.

20

Sur le trottoir, Holly s’enfonce une casquette de chasse écossaise démodée mais somme toute charmante sur les oreilles et fourre ses mains dans les poches de sa parka. Elle ne le regarde pas, se met seulement à marcher en direction du bureau à quelques rues de là. La voiture de Hodges est garée sur le parking de Dave’s mais il s’empresse de lui emboîter le pas.

« Holly.

— Tu vois comment elle est. »

Marchant plus vite. Ne le regardant toujours pas.

Sa douleur abdominale est en train de revenir et il s’essouffle.

« Holly, attends. J’arrive pas à te suivre. »

Elle se tourne vers lui et il est effaré de voir que ses yeux sont baignés de larmes.

« C’est tellement plus compliqué ! Tellement tellement tellement ! Mais ils ne veulent rien entendre et ils n’avouent même pas la vraie raison qui est que Pete veut avoir une jolie fête de départ sans que tout ça plane au-dessus de sa tête comme toi avec le Tueur à la Mercedes quand t’es parti à la retraite et qu’ils ont pas envie que les médias en rajoutent et tu sais que c’est plus compliqué que ça je sais que tu sais et je sais que tu dois t’occuper de tes examens je veux que tu t’en occupes parce que je suis tellement inquiète, mais ces pauvres femmes… c’est juste que je pense pas… elles ne méritent pas… d’être traitées par-dessous la jambe ! »