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Le Marquis de Bay voiant que les Ministres du Roy de Portugal ne faisoient que des réponses vagues et jugeant qu’il n’y avoit pas lieu de rien esperer de solide de cette tentative, prit le parti de s’en servir pour rendre le Roy de Portugal suspect aux alliés.

Dans cette veuë [vue], il chargea le Baron de St Hilaire de quelques lettres pour Dom Diego de Mendoza [dans] lesquelles il affecta d’emploier des termes qui donnent à entendre qu’effectivement le Roy de Portugal etoit disposé à traitter avec la France et avec l’Espagne.

Il ordonna au Baron de St Hilaire de tacher de [se] faire enlever par quelque officier des troupes a[ngloi]ses qui etoient pour lors en Portugal.

Etant arrivé à Elua, il s’addressa au Sier Mo[...] Brigadier dans les troupes d’Angleterre et François réfugié: il lui témoigna qu’il etoit très mécontent du service d’Espagne, lui dit qu’on l’exp[loite ?] tous les jours à des courses périlleuses, sans lui do[nner] aucune recompense; qu’il avoit fait plusieurs [voya]ges à Lisbonne pour un traitté qui se negoc[i]roit en [tre] l’Espagne et le Portugal et qu’il avoit actuellement des lettres du M. de Bay pour Dom Diego de Mendoza, qu’il ne seroit pas fâché que ces lettres tombas [sent] entre les mains de Mylord Portmore pourvu qu’il ne parut point que ce fut de son consentement], que pour cela, il n’y auroit pas de meilleur moien que de le faire enlever dans quelque endroit de la rou[te].

Cela fut ainsi exécuté, le Baron de St Hilaire enlevé à St Ernos est mené à Mylord Portm[ore] qui etoit à Lisbonne.

Ce Milord aiant lu les lettres, même des art[icles] préliminaires qui paroissent par les memes [...] prest à signer fit grand bruit et se plaignit av[ec] beaucoup d’aigreur du prétendu traitté sur le point d’être signé. Ce Prin[ce] et ses ministres auront beaucoup protesté que ce n’etoit d’autre chose que des proposisions hazard[ées] sur le Marquis de Bay, auxquelles on n’au[roit] jamais fais aucune réponse favorable, les ter [mes] dans lesquels le Marquis de Bay s’exprimoit dans ses dernieres lettres, accomodées à son destein, les prétendus articles préliminaires, le temoinage du Baron de St Hilaire qui assuroit avoir f[ait] plusieurs voyages de Badajoz à Lisbonne, avoir eu plusieurs audiences des Ministres portugais, tout cela parut si serieux et si digne d’attention au Mylord Portmore qu’il jugea à propos d’envoier le Baron de St Hilaire à Londres pour instruire la Cour de toutes les circonstances de cette négociation.

Le Baron de St Hilaire étant arrivé à Londres n’oublia rien pour faire croire que le Roy de Portugal avoit des relations étroites avec le Roy d’Espagne et cette opinion se fortifia tellement dans l’esprit de la Reine Anne et de ses Ministres, qu’il y a de l’apparence qu’elle ne contribua pas peu à les determiner à conclurre la paix avec la France.

La Reine Anne fit donner cinq cens livres sterlings au Baron de St Hilaire et comme la religion catholique dont il fait profession etoit un obstacle à son avancement en Angleterre, on trouva bon de l’envoier à l’Empereur avec de fortes lettres de reccommandation et une ample instruction concernant le prétendu traitté entre les deux Couronnes et le Portugal.

L’empereur lui donna le tittre de Baron cinq mille florins et l’emploi d’intendant de la Marine à Naples.

Dans le mois de mars de l’année 1713, un sujet du Duc de Savoie de la Comté de Nice proposa à l’Empereur de brûler les vaisseaux et l’Arsenal de Thoulon, on l’envoia au Duc d’Usseda à Genes pour concerter avec lui les moiens de réussir dans cette entreprise.

Le Duc d’Usseda eut ordre en mesme te[mps] de prendre sur cela les avis du Baron de St Hilaire comme aiant une exacte connoissance de la situation des lieux se rendit de Naples à Genes où il fut pri[s] à plusieurs conferences qui se tinrent [à] ce sujet; voiant toutes les mesures pris[es] pour l’execution il en informa le Min[istre] de France qui etoit alors à Genes et en [suite] écrivit à Monsieur de Torcy. On prit [des] précautions convenables pour se garen[tir] contre ce dessein et le Duc d’Usseda l’a[vait] voulu mettre à exécution. Il y echoüa, il [y] eut meme des gens arretés et punis.

Le Duc d’Usseda ne pouvant comprendre comment son dessein avoit été eventé, soupçonna le Baron de St Hilaire et in [for] ma l’Empereur de ses soupçons, en sorte que lorsque le Baron de St Hilaire fit retour à Naples il y fut arreté. Au bout de neuf mois, il rompit son arrêt et se rendit à Vienne pour se justifier au [près] de l’Empereur.

Comme la paix etoit prête à se faire [entre ?] la France et l’Empereur et qu’il ne pou[vait] esperer aucune occasion d’être utile a[u] Roy, il passa au service du Czar.

Le Czar lui donna un brevet de consc[ien]ce avec le commandement de cinq cens gardes [marine] établis sur les mémoires et la Direction des Académies de Marine et établies aussi jusqu’[aux] plans qu’il en a fournis.

En décembre 1715 le Czar lui fis epouser la nièce du Baron de Schleinitz: il repassa en France lorsque le Baron de Schleinitz y fut envoié en qualité de Ministre plénipotentiaire de sa Majesté Czarienne.

Il arriva à Paris dans le mois de décembre 1717. Son intention etoit de donner dès ce tems-là les eclaircissemens qu’il donne aujourduy. Mais l’occasion s’etant présentée de faire un traité avec quelques marchands de Rouen pour la cargaison de deux vaisseaux qu’il proposa d’envoier à St Petersbourg, pour les mettre dans le goût du commerce et de la mer Baltique dans la veuë, après cette première epreuve, de présenter des mémoires à la Cour pour faire connoitre les grands avantages que la France pourroit tirer d’un commerce réglé avec la Moskowie. Il partit de Paris dans le mois de mai de l’année 1718 pour se rendre à St-Petersbourg et pour y avoir soin de la vente des marchandises que lui et ses associés envoioirent en ce païs-là.

A peine fut il arrivé à St Petersbourg qu’il apprit que ses ennemis faisoient courrir le bruit que son voyage avoit pour objet de négocier auprès du Czar en faveur de l’Espagne : cette calomnie repanduë sans fondement l’a entièrement déterminé à repasser en France et à donner le présent mémoire, dont il ne demande de retirer d’autre avantage que de faire connoitre son inviolable fidelité et les services qu’[il] est capable de rendre au moien des ha[...] des qu’il a fait tant en Allemagne qu’[en] Prusse et en Russie, et par les alliances avec lui donne dans plusieurs des meille[eures] familles d’Allemagne, son mariage avec Mademoiselle Arnims qui etoit première Da[me] d’honneur de la Princesse de Wolfenbut[tel], épousé du Zarowitz.

On est très humblement prié d observer deux choses.

La première, que si l’on veut emploier le Baron de St Hilaire, le pre- se[ent] mémoire et ce qu’il contient doit etre tenu très secret, on en voit les raisons.

La seconde, que le Baron de St Hilaire a un grand interet que le Baron de Schleini[tz] n’ait aucune connoissance du même mémoire. Cela romproit toute la bonne intelligence qu’il y a entre l’oncle et le neveu, le Baron de St Hilaire aiant cach[é] à Monsieur de Schleinitz et à sa propre femme le secret qu’il développe icy.

AMAE. Correspondance politique. Russie. Supplement 2. F. 274-275 v.

Перевод:

Варон де Сент-Илер рисковал своей жизнью и жертвовал своими лучшими днями ради служения королю: в этом он сходен со множеством других подданных.

Удовлетворенный возможностью оказать важнейшие услуги государству, он не снискал и не стремился снискать причитающиеся ему почести, и не требовал вознаграждения, на которое мог бы претендовать. В этом отношении у него было мало подражателей. Он совершил и нечто большее: дабы служить своему королю с большей пользой и надежностью, он был принужден исполнять двусмысленную роль, подверженную неблагоприятным истолкованиям, так что он хранил молчание, от которого пострадала его репутация; и он намерен нарушить его только потому, что государство в этом молчании больше не нуждается; и что он считает, что он должен снять завесу, которая до сих пор скрывала почти от всей Европы истинные мотивы его поведения. Ему тем легче на это решиться, что, как ему стало известно, о нем составилось весьма неблагоприятное мнение, совершенно отличное от того, что известно тем, кто знаком с истиной.