почтительным, нижайшим и покорнейшим слугой Вашей милости
Сент-Илер.
Рим, 18 апреля 1714 г.
N.° 19 Анри Лави — маркизу де Торси, 19 ноября 1714 г.
Monseigneur,
Depuis que j ai eu l’honneur d’offrir à Vostre Excellence mes très humbles services à Pettersbourg en Ingrie, où je vais pour y faire, jusqu’à nouvel ordre, les fonctions de commissaire de la marine, j’ay rencontré à Berlin Mr le baron de St Hilaire, gentilhomme (soy disant de Provence). Comme il m’a dit qu’il a eu l’honneur d’ecrire à Vostre Excellence sous le ply de Mr le Comte de Rottemberg, j’ay cru devoir en faire le portrait à Vostre Excellence et à l’informer de ce que j’ay observé dans sa conduitte et dans ses projets.
Ce baron prétend avoir quitté la France et le service de la marine, dans lequel il a esté employé, pour un duel, à Naples il a esté intendant de la marine et a exercé cette charge plusieurs années jusqu’à ce que le duc d’Uceda l’eu rendu suspect à la Cour de Vienne, luy supposant une correspondance criminelle avec la France, de laquelle, s’en estant justiffiée à Vienne, l’Empereur l’auroit voulu rétablir dans son poste.
Le baron mécontent de cette satisfaction, s’adressa à Mr De Matweof, ministre du Czar, pour l’engager à luy procurer à Pettersbourg, le mesme employ qu’il a exercé à Naples. Ce ministre, prévenu en sa faveur (par raport à ces mémoires d’une dangereuse consequance, qu’il avois fait pour procurer à l’Empereur les moyens d’agrandir sa puissance), l’aurois recommandé au Czar son maistre, de manière que ce Prince luy fit une reponce favorable, et si j’en dois croire ce baron, il aura en Moscovie, l’intendance de la marine russienne, il est âgé d’environ 36 ans, bien fait de sa personne, d’un esprit subtil et pénétrant, facile à découvrir son secret, et celuy d’autruy, amateur du sexe à l’exez [l’excès], suceptible de la flatrie, et n’ahissant pas le vin, mais comme il a trahy les Portugais, en révélant (estant à leur service) un secret d’Etat d’une grande conséquence, on ne peus luy confier rien sans estre exposé à un semblable traittement, du temps que Milord Portemoore commandoit en Portugal les troupes auxiliaires de la Grande Bretagne au nombre de 10 000 hommes, il fut résolu dans le conseil portugais de les egorger, il révéla ce secret au dit Milord qui luy procura les moyens de se sauver en Angleterre, où il auroit eu 10 000 £ sterling de recompense, s’il eut pu se conserver l’estime de Milord Oxford.
Voicy l’extrait d’un mémoire qu’il a eu intention de présenter à l’Empereur, mais qu’il n’a pas fait, en estant mécontent. Si Vostre Grandeur m’envoie
un chiffre pour m’en servir lorsque j’auray occasion de luy écrire des choses qui méritent le secret, qu’elle ait la bonté de l’addresser sous le ply de M. le comte de Rottemberg (voici, Monseigneur, les particularitez de ce qui est arrivé aux commis des negotians de St Malo à Pettersbourg, il est désagble [=désagréable] que leur imprudence leur ait suscité cette mauvaise affaire).
Je continueray mon voyage après-demain pour Pettersbourg, d’où j’auray l’honneur d’informer Vostre Excellence de ce que j’y trouveray digne de son attention.
J’ay l’honeur d’etre avec un très profond respect,