Il secoua et balança ses mains en l'air, comme pour dire que l'âge avait ses compensations, et Harry aperçut, sur sa main saine, un anneau qu'il n'avait jamais vu auparavant porté par Dumbledore : Il était grand, d'une facture plutôt maladroite dans ce qui semblait être de l'or, et il y avait une grosse pierre qui le séparait en deux. Les yeux de Slughorn s'attardèrent aussi un moment sur l'anneau, et Harry vit un léger froncement de sourcils sur son large front.
"Alors, toutes ces précautions contre des intrus, Horace… sont-elles contre les Mangemorts ou contre moi ?" demanda Dumbledore.
"Que peuvent vouloir les Mangemorts à un vieux bonhomme comme moi?" remarqua Slughorn.
"J'imagine qu'ils voudraient utiliser tes talents considérables pour la coercition, la torture et le meurtre." déclara Dumbledore. "Dis-moi, n'ont-ils vraiment rien fait pour te recruter ?"
Slughorn dévisagea Dumbledore d'un air menaçant pendant un moment, puis murmura "Je ne leur ai pas donné cette chance. J'ai été perpétuellement en mouvement depuis un an. Je ne séjourne jamais à la même place plus d'une semaine. Je me déplace de maison de Moldus en maison de Moldus -
les propriétaires de cet endroit sont en vacances dans les îles Canaries -
c'était très agréable, je serai désolé de partir. Il est très facile, quand on connaît, d'utiliser un simple charme de congélation sur les systèmes d'alarmes qu'ils emploient et de s'assurer que les voisins ne te repèrent pas voient pas quand tu amènes le piano."
"Ingénieux !" reconnut Dumbledore. " Mais c'est une existence plutôt fatigante pour un vieux bonhomme usé à la recherche d'une vie silencieuse.
Maintenant, si tu devais retourner à Poudlard..."
"Si tu espères me faire croire que ma vie serait plus paisible dans cette école pestilentielle, tu uses ton souffle pour rien, Albus ! J'aurais pu aller m'y cacher, mais certaines rumeurs plutôt drôles me sont parvenues à propos de Dolores Ombrage ! Si c'est comment ça que tu traites les professeurs maintenant…"
" Le professeur Ombrage s'est coltinée avec notre troupeau de centaure !"
stoppa Dumbledore. "Je pense, Horace, que tu aurais mieux à faire que d'aller dans la forêt et d'appeler une horde de centaures en colère "des créatures dégoûtantes mal-élevées.""
"C'est ce qu'elle a fait ?" s'étonna Slughorn. "Quelle femme idiote. Je ne l'ai jamais aimée."
Harry rit et tous les deux le regardèrent.
"Désolé" s'excusa vivement Harry "C'est juste… que je ne l'aimais pas non plus."
Dumbledore se leva soudain.
"Pars-tu ?" demanda aussitôt Slughorn, plein d'espoir.
"Non, Je souhaiterais juste utiliser la salle de bains ! " dit Dumbledore.
"Oh !" fit Slughorn, visiblement déçu. "Deuxième porte à gauche dans le couloir !"
Dumbledore sortit du séjour. Quand la porte se fut refermée derrière lui, il y eut un instant de silence. Après quelque temps, Slughorn se mit debout mais il ne semblait pas très sur de ce qu'il voulait faire. Il jeta un regard furtif sur Harry, puis se dirigea vers le feu auquel il tourna le dos pour y chauffer son large buste.
"Ne crois pas que je ne le sais pas pourquoi il t'a amené !" lança-t-il tout à coup.
Harry regarda simplement Slughorn. Les yeux larmoyants de Slughorn passèrent sur la cicatrice de Harry, s'arrêtant cette fois, sur le reste de son visage.
"Tu ressembles vraiment beaucoup à ton père !"
" Oui, on me l'a déjà dit !"
" Sauf les yeux. Tu as…"
"Ce sont les yeux de ma mère, oui !" Harry l'avait si souvent entendu qu'il trouvait ça un peu lassant.
"Hmpf. Oui, et bien ! Comme professeur, on ne devrait pas avoir de favoris, naturellement, mais, pour moi, elle l'était. Ta mère," ajouta Slughorn, en réponse au regard interrogateur de Harry "Lily Evans. Une des élèves les plus brillantes que j'ai jamais eu. Vive, tu sais, charmante. J'avais l'habitude de lui dire qu'elle aurait du être dans ma maison. Je recevais en retour des réponses très effrontées."
"Quelle était votre maison ?"
"J'étais responsable des Serpentard !" dit Slughorn. "Oh, maintenant,"
poursuivit-il rapidement, voyant l'expression sur le visage de Harry et agitant une clochette près de lui" ne retiens pas cela contre moi ! Tu es un Gryffondor comme elle, je suppose ? Oui, c'est souvent l'habitude dans les familles. Pas toujours, cependant. As-tu entendu parler de Sirius Black ? Tu dois avoir appris - c'était dans le dernier journal - qu'il était mort, il y a quelques semaines…"
C'était comme si une main invisible avait tordu les intestins de Harry et les avait comprimés.
" Quoi qu'il en soit, il était le grand ami de ton père à l'école. Toute la famille Black est passé par ma maison, mais Sirius s'est retrouvé chez les Gryffondor ! Quelle honte… c'était un garçon très doué. J'ai eu son frère, Regulus, quand il est venu ensuite, mais j'aurai bien voulu les deux !"
Il ressemblait à un collectionneur enthousiaste qui avait surenchéri.
Complètement perdu dans ses souvenirs, il regardait fixement le mur opposé, et se dandinait sur place pour assurer une répartition égale de la chaleur sur tout l'arrière de son corps.
"Ta mère était une fille de Moldus, bien sûr. Je ne pouvais pas le croire quand je l'ai appris. Je pensais qu'elle devait être de pur sang, elle était si bonne."
"Une de mes meilleurs amis est une enfant de Moldus !" répliqua Harry,
"Et c'est la meilleure de notre promotion !"
"C'est drôle comme cela se produit parfois, n'est ce pas ?"
"Pas vraiment !" jeta Harry froidement.
Slughorn le regarda avec surprise. " Ne pense pas que je suis compromis!
Non, non, non ! I n'ai-je justement pas dit que ta mère était-elle l'une de mes étudiantes préférées ? Il y avait Dirk Cresswell l'année suivante - maintenant à la tête du bureau de liaison des Goblins - encore un enfant de Moldus, un étudiant très doué, et qui me fournit toujours d'excellentes informations sur ce qui se passe chez Gringott!"
Il sautilla légèrement, souriant, content de lui, et montra les nombreuses photographies sur le buffet, chacune occupée par un minuscule personnage qui bougeait.
" Tous des anciens étudiants, tous remarquables. Tu peux voir Barnabas Cuffe, l'éditeur de la Gazette du Sorcier, il a toujours continué à me communiquer les nouvelles du jour. Et Ambrosius Flume m'envoie un panier de confiseries à chacun de mes anniversaires, et tout ça parce que je lui ai fourni une introduction pour Ciceron Harkisss son premier employeur ! Et derrière - tu peux la voir si tu penches un peu ta tête— c'est Gwenog Jones, qui fut le capitaine de l'équipe des Harpies... Les gens sont toujours étonnés d'entendre que je suis dans les meilleurs termes avec les harpies, et que je reçoive des billets gratuits toutes les fois que je le désire !"
Cette pensée sembla le regonfler énormément.
"Et tous ces gens savent où vous trouver, pour vous envoyer tout ça ?"
demanda Harry, qui ne pouvait pas s'empêcher de se demander pourquoi les Mangemorts n'avaient pas encore dépisté Slughorn si des paniers de bonbons, des billets de Quidditch, et des visiteurs demandant son conseil et ses avis pouvaient le faire.
Le sourire de Slughorn s'effaça de son visage aussi rapidement que précédemment le sang sur les murs.
"Évidemment que non ! Je n'ai plus aucun contact avec eux depuis un an."
Harry eut l'impression que ses mots choquèrent Slughorn lui-même. Il a regarda partout, complètement déboussolé pendant un moment. Puis il s'agita.
"Le sorcier prudent maintient toujours sa tête hors de l'eau dans de genre d'histoires. … Tout semble très bien quand Dumbledore en parle, mais prendre un poste à Poudlard en ce moment seraient l'équivalent qu'une déclaration d'allégeance à l'ordre du Phœnix ! Et autant je suis sûr de ses capacités, de son courage et de toutes ses autres qualités, autant je n'aime pas beaucoup le taux de mortalité…"