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C’était Rogue qui se précipitait, sa longue robe noire virevoltant autour de lui. Il vint se planter devant Harry.

– Alors ? dit-il.

Il avait sur le visage une expression triomphante qu’il essayait vainement de cacher. Harry prit un air innocent, malgré la sueur qui ruisselait sur son visage, et cacha dans ses poches ses mains pleines de boue.

– Venez avec moi, Potter, dit Rogue.

Harry le suivit dans les escaliers en essayant de s’essuyer discrètement les mains dans les poches de sa robe sans que Rogue le remarque. Ils descendirent les escaliers qui menaient dans les cachots puis pénétrèrent dans le bureau de Rogue.

Harry n’y était entré qu’une seule fois jusqu’à présent et ce jour-là aussi, il avait eu de sérieux ennuis. Depuis, Rogue avait ajouté d’autres horreurs gluantes dans les bocaux qui s’alignaient sur les étagères et scintillaient à la lueur du feu de cheminée en renforçant l’atmosphère menaçante de la pièce.

– Asseyez-vous, ordonna Rogue.

Harry s’assit.

– Mr Malefoy vient de me raconter une très étrange histoire, Potter, dit Rogue qui était resté debout.

Harry demeura silencieux.

– Il m’a dit qu’il se trouvait près de la Cabane hurlante lorsqu’il a rencontré Weasley, apparemment seul.

Harry ne dit toujours rien.

– Mr Malefoy m’a affirmé qu’il était en train de parler avec Weasley et qu’il a soudain reçu de la boue sur la tête. Comment pensez-vous que cela ait pu se produire ?

Harry fit semblant d’être surpris.

– Je n’en sais rien, professeur, dit-il.

Rogue fixait Harry d’un regard perçant. C’était comme s’il s’était trouvé face à face avec un hippogriffe. Harry s’efforça de ne pas ciller.

– Mr Malefoy a alors été témoin d’une étrange apparition, poursuivit Rogue. Pouvez-vous imaginer de quoi il s’agissait, Potter ?

– Non, répondit Harry en essayant de manifester une curiosité tout innocente.

– C’était votre tête, Potter. Votre tête qui flottait en l’air.

Il y eut un long silence.

– Il ferait peut-être bien de consulter Madame Pomfresh, suggéra Harry. S’il voit des choses comme…

– Qu’est-ce que votre tête pouvait bien faire à Pré-au-lard, Potter ? l’interrompit Rogue. Votre tête n’a pas le droit de se rendre là-bas. Aucune partie de votre corps n’a reçu l’autorisation d’aller à Pré-au-lard.

– Je le sais, répondit Harry en faisant de son mieux pour effacer de son visage toute trace de culpabilité ou de crainte. Il semblerait que Malefoy ait eu une hallucin…

– Malefoy n’est pas sujet aux hallucinations, coupa Rogue.

Il se pencha en s’appuyant des deux mains sur les accoudoirs du fauteuil dans lequel Harry était assis, si bien que leurs visages n’étaient plus qu’à quelques centimètres l’un de l’autre.

– Si votre tête se trouvait à Pré-au-lard, le reste de votre personne devait également y être, reprit Rogue.

– J’étais dans la tour de Gryffondor, protesta Harry, c’est vous-même qui m’aviez dit…

– Quelqu’un peut-il le confirmer ?

Harry resta silencieux et les lèvres minces de Rogue s’étirèrent en un horrible sourire.

– Très bien, dit-il en se redressant. Ainsi donc, tout le monde, depuis le ministère de la Magie jusqu’au personnel de Poudlard, s’est efforcé de protéger Harry Potter de Sirius Black. Mais le célèbre Harry Potter ne connaît que sa propre loi. Qu’on laisse donc le petit personnel s’inquiéter de sa sécurité. Le célèbre Harry Potter, lui, va où il veut, quand il veut, sans se soucier le moins du monde des conséquences.

Harry s’abstint de répondre. Rogue essayait de le provoquer pour lui faire avouer la vérité. Mais il n’avait pas l’intention de se laisser impressionner. Rogue n’avait aucune preuve… pour le moment tout au moins.

– C’est fou ce que vous ressemblez à votre père, Potter, dit soudain Rogue, les yeux étincelants. Lui aussi était excessivement arrogant. Son petit talent au Quidditch lui donnait l’impression, à lui aussi, d’être au-dessus des autres. Il passait son temps à se pavaner, accompagné de ses amis et de ses admirateurs… La ressemblance entre vous est saisissante, inquiétante, même…

– Mon père ne se pavanait pas, dit Harry, malgré lui. Et moi non plus.

– Votre père n’aimait pas plus que vous se conformer aux règlements, poursuivit Rogue, une expression mauvaise sur son visage mince. À ses yeux, les règlements étaient destinés au commun des mortels, pas aux vainqueurs de la coupe de Quidditch. Il avait la tête tellement enflée…

– TAISEZ-VOUS !

Harry s’était levé d’un bond. Une rage telle qu’il n’en avait pas éprouvée depuis le jour de son départ de Privet Drive l’avait saisi avec la violence d’un coup de tonnerre. Le visage soudain figé de Rogue, ses yeux noirs flamboyant d’une lueur féroce, le laissaient indifférent.

Qu’est-ce que vous venez de me dire, Potter ?

– Je vous ai dit de vous taire ! s’exclama Harry. Ne me parlez plus de mon père. Je connais toute la vérité. Je sais qu’il vous a sauvé la vie ! Dumbledore me l’a dit ! Sans mon père, vous ne seriez même pas là !

Le teint jaunâtre de Rogue avait pris une couleur de lait caillé.

– Est-ce que le directeur vous a expliqué dans quelles circonstances votre père m’a sauvé la vie ? murmura-t-il. Ou bien a-t-il estimé que les détails de l’histoire pouvaient choquer les oreilles délicates du précieux petit Potter ?

Harry se mordit la lèvre. Il ignorait ce qui s’était passé, mais ne voulait pas l’admettre. Et visiblement, Rogue avait deviné qu’il ne savait rien.

– Je serais navré que vous partiez d’ici avec une fausse idée de votre père, Potter, dit-il avec un épouvantable rictus. Vous avez sans doute imaginé un acte d’héroïsme auréolé de gloire ? Mais je vais vous détromper. Votre vénéré père et ses amis m’ont fait une farce désopilante qui aurait pu avoir ma mort pour conséquence si votre père ne s’était pas ravisé au dernier moment. Il n’y avait rien d’héroïque dans ce qu’il a fait. Il a sauvé sa peau en même temps que la mienne. Si leur farce avait marché, il aurait été renvoyé de Poudlard.

Le sourire de Rogue laissait voir ses dents jaunâtres, plantées de travers.

– Videz vos poches, Potter ! lança-t-il brusquement.

Harry ne bougea pas. Le sang battait à ses oreilles.

– Je vous ai dit de vider vos poches, sinon, je vous emmène chez le directeur. Allez-y, Potter, retournez-les !

Glacé de terreur, Harry sortit lentement de ses poches le sac de farces et attrapes de chez Zonko et la carte du Maraudeur.

Rogue prit le sac de chez Zonko.

– C’est Ron qui me l’a donné, dit Harry en priant le ciel pour qu’il ait le temps de prévenir Ron avant que Rogue ne l’interroge. Il me l’a rapporté de Pré-au-lard la dernière fois qu’il y est allé.

– Vraiment ? Et vous avez laissé ce sac dans votre poche pendant tout ce temps ? Très touchant… Et ça, qu’est-ce que c’est ?

Rogue avait pris la carte. Harry essaya de toutes ses forces de rester impassible.

– C’est un morceau de parchemin, dit-il en haussant les épaules.