Un instant plus tard, la chose apparut : un énorme chien noir au poil hirsute s’avança sur la pelouse à pas feutrés, accompagné de Pattenrond qui trottinait à côté de lui. Harry l’observa attentivement. Qu’est-ce que cela pouvait bien signifier ? Si Pattenrond, lui aussi, voyait le chien, en quoi pouvait-il s’agir d’un présage de mort uniquement destiné à Harry ?
– Ron ! chuchota Harry. Ron ! Réveille-toi !
– Hein ?
– Viens me dire si tu vois la même chose que moi.
– Il fait tout noir, Harry, marmonna Ron d’une voix pâteuse. Qu’est-ce qui te prend ?
– Là-bas… regarde…
Harry jeta un rapide coup d’œil par la fenêtre.
Pattenrond et le chien avaient disparu. Harry grimpa sur le rebord de la fenêtre pour avoir une vue plongeante sur les alentours immédiats du château, mais ils n’étaient pas là non plus. Où étaient-ils passés ? Un ronflement sonore lui indiqua que Ron s’était rendormi.
Lorsque Harry et les autres joueurs de Gryffondor entrèrent dans la Grande Salle, le lendemain matin, ils furent accueillis par des acclamations. Harry eut un large sourire en voyant que les élèves de Serdaigle et de Poufsouffle les applaudissaient aussi. Les Serpentard, en revanche, sifflèrent bruyamment sur leur passage et Harry remarqua que Malefoy était encore plus pâle que d’habitude.
Dubois ne cessa d’encourager ses joueurs à manger alors que lui-même ne touchait à rien. Puis, il les pressa de sortir avant que les autres aient fini, afin d’aller se rendre compte des conditions météorologiques. Lorsqu’ils quittèrent la Grande Salle, les applaudissements retentirent à nouveau.
– Bonne chance ! cria Cho Chang à Harry qui se sentit rougir.
– Bon, ça va… Pratiquement pas de vent… Le soleil est un peu fort, ça pourrait provoquer quelques problèmes de visibilité, faites attention… Le sol est plutôt dur, c’est bien, on aura un meilleur élan au décollage…
Dubois, suivi de son équipe, arpenta le terrain en jetant des regards autour de lui. Enfin, les portes du château s’ouvrirent et les élèves sortirent en masse sur la pelouse.
– Dans les vestiaires, dit sèchement Dubois.
Personne ne prononça un mot pendant qu’ils revêtaient leurs robes écarlates. Harry se demanda si les autres aussi avaient l’impression d’avoir mangé quelque chose de très remuant pour leur petit déjeuner… Enfin, Dubois annonça :
– Allons-y, c’est l’heure…
Leur entrée sur le terrain déclencha une véritable tempête sonore. Les trois quarts de la foule arboraient des rosettes écarlates et agitaient des drapeaux de même couleur, ornés du lion de Gryffondor. ALLEZ GRYFFONDOR ! LA COUPE AUX LIONS ! lisait-on sur les banderoles. Derrière les buts de Serpentard, en revanche, deux cents élèves étaient habillés de vert et le serpent argenté de leur équipe scintillait sur leurs drapeaux. Le professeur Rogue, assis au premier rang, était également vêtu de vert et souriait d’un air féroce.
– Voici l’équipe de Gryffondor ! s’écria Lee Jordan qui assurait le commentaire du match, comme à l’accoutumée. Potter, Bell, Johnson, Spinnet, Weasley et Weasley, et Dubois. Reconnue comme la meilleure équipe que Poudlard ait jamais eue depuis un bon nombre d’années…
Son commentaire fut accueilli par les huées des supporters de Serpentard.
– Voici maintenant l’équipe de Serpentard, menée par le capitaine Flint. Il a effectué quelques changements parmi ses joueurs et il semble qu’il ait privilégié la taille par rapport à l’intelligence…
Nouvelles huées sur les gradins des Serpentard. Harry, cependant, pensa que Lee n’avait pas tort. Malefoy était de très loin le joueur le moins grand de son équipe, tous les autres étaient des colosses.
– Les deux capitaines, vous vous serrez la main, dit Madame Bibine.
Flint et Dubois s’approchèrent l’un de l’autre et se serrèrent la main comme si chacun essayait de briser les phalanges de l’autre.
– Enfourchez vos balais, dit Madame Bibine. Trois… deux… un…
Son coup de sifflet fut noyé par les cris de la foule qui saluèrent l’envolée des quatorze joueurs. Harry sentit le vent s’engouffrer dans ses cheveux et le plaisir qu’il éprouvait à voler dissipa son trac. Il jeta un regard autour de lui, vit Malefoy qui le suivait de près et accéléra brutalement en quête du Vif d’or.
– Gryffondor à l’attaque, annonça Lee Jordan. Alicia Spinnet, en possession du Souafle, descend vers les buts de Serpentard. Bravo, Alicia ! Argh, non… Le Souafle est intercepté par Warrington de l’équipe de Serpentard… Et VLAN ! George Weasley dévie un Cognard sur Warrington qui lâche le Souafle, récupéré par… Johnson. Gryffondor de nouveau à l’attaque. Vas-y, Angelina… Attention, Angelina, un Cognard ! ET ELLE MARQUE ! DIX À ZÉRO EN FAVEUR DE GRYFFONDOR !
Angelina leva le poing en signe de victoire sous les cris enthousiastes des supporters de Gryffondor.
– AÏE !
Angelina faillit être jetée à bas de son balai par Marcus Flint qui venait de la heurter de plein fouet.
– Désolé, dit Flint, tandis que des huées montaient de la foule. Désolé, je ne l’ai pas vue !
Un instant plus tard, Fred Weasley donna un coup de batte à l’arrière du crâne de Flint qui s’écrasa le nez contre le manche de son balai et se mit à saigner.
– Ça suffit comme ça ! s’écria Madame Bibine qui vint se placer entre eux sur son balai. Un penalty en faveur de Gryffondor pour attaque injustifiée envers un de leurs Poursuiveurs ! Et un penalty en faveur de Serpentard pour coup de batte délibéré à l’un de leurs Poursuiveurs !
– Arrêtez, madame ! s’exclama Fred.
Mais Madame Bibine avait déjà donné son coup de sifflet et ce fut Alicia qui tira le penalty.
– Vas-y, Alicia ! hurla Lee dans le silence qui s’était soudain abattu sur le stade.
– BRAVO, ELLE A MARQUÉ ! VINGT À ZÉRO EN FAVEUR DE GRYFFONDOR !
Harry prit un virage serré pour regarder Flint, qui saignait toujours, tirer le penalty en faveur de Serpentard. Dubois, les mâchoires serrées, défendait ses buts.
– Dubois est un excellent Gardien, commenta Lee Jordan tandis que Flint attendait le coup de sifflet de Madame Bibine.
– Vraiment excellent, poursuivit Jordan. Très difficile de marquer avec lui… très difficile… OUI ! INCROYABLE ! IL A RÉUSSI À BLOQUER !
Soulagé, Harry repartit à la recherche du Vif d’or, sans cesser d’écouter attentivement le commentaire de Lee Jordan. Il était vital qu’il tienne Malefoy à bonne distance du Vif d’or jusqu’à ce que Gryffondor obtienne une avance de plus de cinquante points…
– Gryffondor à l’attaque, non, Serpentard à l’attaque… Non, Gryffondor, avec Katie Bell en possession du Souafle, elle file vers les buts… OH ! ILS L’ONT FAIT EXPRÈS !
Montague, un Poursuiveur de Serpentard, avait coupé la trajectoire de Katie mais, au lieu de s’emparer du Souafle, il lui avait attrapé la tête et Katie avait fait un tonneau en parvenant d’extrême justesse à rester sur son balai. Mais elle avait perdu le Souafle.
Madame Bibine donna un nouveau coup de sifflet et se précipita sur Montague en hurlant. Une minute plus tard, Katie avait marqué un nouveau penalty contre Serpentard.
– TRENTE À ZÉRO ! BIEN FAIT POUR VOUS, BANDE DE SALES TRICHEURS…
– Jordan, soyez moins partial dans vos commentaires !
– Je dis les choses telles qu’elles sont, professeur !
Harry se sentit soudain comme électrisé. Il venait d’apercevoir le Vif d’or qui scintillait au pied de l’un des buts de Gryffondor. Mais il était trop tôt pour l’attraper. Et si jamais Malefoy le voyait…