"Eh bien, Professeur McGonagall, si tout était à refaire, et que je suggérais de prendre cent Gallions de plus juste pour être sûr, sans justification autre que celle d'être prêt, m'écouteriez vous cette fois ?"
"J'accepte votre argument," dit McGonagall, "Vous n'avez pas besoin de me sermonner, jeune homme !"
"Ah, mais je n'en suis pas encore arrivé à mon argument. Connaissez vous la différence entre quelqu'un qui mérite qu'on lui parle et un simple obstacle, Professeur McGonagall ? De mon point de vue ? Si un adulte pense que m'être supérieur, qu'être au-dessus de moi, qu'obtenir mon obéissance, sont les choses les plus importantes pour lui, alors il sera un obstacle. Un collaborateur potentiel est quelqu'un qui pense que faire le travail est plus important que de s'assurer que je reste à ma place. Laissez-moi vous montrer quelque chose, Professeur McGonagall."
Le vendeur de malle les observait avec une fascination non dissimulée, et Harry sortit sa bourse en peau de Moke et dit "Onze Gallions en vrac, s'il vous plaît."
Et il y avait de l'or dans la main de Harry.
"Où avez-vous obtenu cet -"
"Dans ma chambre forte, Professeur McGonagall, quand je suis tombé dans ce tas d'or. J'ai fourré de l'argent dans ma poche et j'ai ensuite tenu le sac d'or contre ma poche, pour que les tintements semblent venir de là où il fallait. Car, vous comprenez, je m'attendais depuis le début à ce que cela ait lieu."
La bouche de McGonagall était grande, grande ouverte.
"La question est maintenant...êtes-vous en colère parce que j'ai défié votre autorité ? Ou contente que notre journée se termine par un succès au lieu d'un échec ? Je ne vous demande rien d'autre en vous posant cette question. Je ne vous promets ni ne vous demande une coopération dans nos affaires futures. Je veux seulement savoir si vous êtes une collaboratrice potentielle ou un obstacle... Minerva."
Le vendeur s'étrangla bruyamment.
Et la puissante sorcière resta silencieuse.
"La discipline doit être appliquée à Poudlard," dit-elle après qu'une minute entière se soit écoulée. "Pour le bien de tous les étudiants. Et cela doit inclure la courtoisie et l'obéissance à tous vos professeurs."
Harry inclina sa tête. "Je comprends, Professeur McGonagall." Mais il était tout de même incroyable que, bizarrement, il semble beaucoup plus important d'appliquer la discipline quand vous étiez en haut de la pile que quand vous étiez en bas... mais Harry ne jugea pas sage d'appuyer sur ce point.
"Dans ce cas... je vous félicite pour votre grande préparation."
Harry voulait applaudir, ou vomir, ou s'évanouir, ou quelque chose. C'était la première fois que ce discours avait jamais fonctionné sur un adulte. C'était la première fois qu'aucun de ses discours avait jamais fonctionné sur qui que ce soit. Peut-être aussi parce que c'était la première fois qu'il avait quelque chose dont un adulte avait sérieusement besoin, mais tout de même -
Minerva McGonagall, +1 point.
Harry s'inclina, et donna le sac d'or et les onze Gallions supplémentaires aux mains de McGonagall. "Je vous le laisse, madame. Pour ma part, je dois utiliser les toilettes. Puis-je demander où -"
Le vendeur, onctueux à nouveau, pointa du doigt en direction d'une porte incrustée dans le mur et munie d'une poignée d'or. Alors que Harry s'éloignait, il entendit le vendeur derrière lui dire de sa voix huileuse : "Puis-je m'informer de l'identité de cette personne, Madame McGonagall ? J'imagine qu'il est Serpentard - troisième année peut-être ? - et d'une importante famille, mais je n'ai pas reconnu -"
Le claquement de la porte de la salle de bain coupa ses mots, et après que Harry eut identifié le loquet et l'ait mis en place, il s'effondra contre la porte. Son corps entier était baigné d'une sueur qui avait traversée ses vêtements Moldus, mais au moins ça ne se voyait pas sur ses robes. Il se pencha au-dessus de la cuvette or-ivoire, eut quelques haut-le-coeur, mais heureusement rien ne vint.
Ils se tenaient à nouveau dans le jardin du Chaudron Baveur, sur la petite interface couverte de feuilles entre le Chemin de Traverse de l'Angleterre magique et le monde Moldu. C'était une économie horriblement découplée... Harry devait aller à une cabine téléphonique et téléphoner à son père une fois de l'autre côté. Il ne devait pas, apparemment, s'inquiéter de voir son bagage volé ; il avait le statut d'objet magique majeur, un type d'objet que les Moldus ne remarqueraient pas. C'était une partie de ce que vous pouviez obtenir dans le monde magique, si vous étiez prêt à payer le prix d'une voiture de seconde main. Harry se demanda si son père serait capable de voir la malle après que Harry la lui ait explicitement montrée.
"C'est ici que nos chemins se séparent, pour un temps," dit le Professeur McGonagall. Elle secoua sa tête avec émerveillement. "Ça a été le jour le plus étrange jour de ma vie depuis... depuis bien des années. Depuis le jour où j'ai appris qu'un enfant avait vaincu Vous-Savez-Qui. Je me demande maintenant, rétrospectivement, si c'était le dernier jour sensé de ce monde."
Oh, comme si elle avait à se plaindre de quoi que ce soit. Vous pensez que votre journée était surréaliste ? Essayez la mienne pour voir.
"Vous m'avez grandement impressionné aujourd'hui," lui dit Harry. "J'aurais dû penser à vous complimenter à voix haute, je vous donnais des points dans ma tête et tout."
"Merci, M. Potter," dit McGonagall. "Si vous aviez déjà été trié dans une Maison je vous aurais déduit tant de points que ses petits-enfants perdraient encore la Coupe des Maisons."
"Merci à vous, Minerva." Il était probablement encore trop tôt pour l'appeler Minny.
Cette femme était peut-être l'adulte le plus sain d'esprit que Harry ait jamais rencontré, en dépit de son manque de savoir scientifique. Harry envisageait même de lui offrir la position de numéro deux dans le groupe qu'il formerait pour combattre le Seigneur des Ténèbres, mais il n'était pas assez idiot pour dire ça à voix haute. Et quel serait un bon nom pour ce groupe...? Les Mangemangemorts ?
"Je vous verrai très bientôt, quand l'école commencera," dit McGonagall. "Et, M. Potter, à propos de votre baguette -"
"Je sais ce que vous allez me demander," dit Harry. Il sortit sa précieuse baguette et, avec un immense pincement de douleur intérieure, la retourna dans sa main. La poignée vers l'extérieur, il la présenta à McGonagall. "Prenez-la. Je ne comptais pas faire quoi que ce soit, pas une seule petite chose, mais je ne veux pas que vous ayez des cauchemars où je fais exploser ma maison."
McGonagall secoua vivement la tête. "Oh, non, M. Potter ! On ne fait pas ce genre de choses. Je voulais juste vous prévenir de ne pas utiliser votre baguette chez vous, car il y a des moyens de détecter l'usage de la magie chez les mineurs et c'est interdit sans supervision."
"Ah," dit Harry, et il sourit. "Cela me semble être une règle très sensée. Je suis heureux de voir que le monde magique prend ce genre de choses sérieusement."
McGonagall le regarda intensément. "Vous le pensez vraiment."
"Oui," dit Harry. "Je comprends. La magie est dangereuse et les règles sont là pour une bonne raison. Certaines affaires sont elles aussi dangereuses. Je le comprends. Souvenez-vous que je ne suis pas stupide."
"J'ai bien peu de chances de l'oublier. Merci, Harry Potter, cela m'aide à me sentir mieux concernant certaines choses au sujet desquelles je vais devoir vous faire confiance. Au revoir pour l'instant."