Alors je ne le ferai plus jamais ! Je ferai très attention et ne deviendrai pas maléfique !
"Déjà entendu."
La frustration montait en Harry. Il n'avait pas du tout l'habitude d'avoir une artillerie d'arguments inférieure à celle de l'ennemi, jamais, et encore moins face à un Choixpeau capable d'emprunter tout son savoir et son intelligence pour débattre avec lui, et capable de voir ses pensées alors qu'elles se formaient. Et de quel récapitulatif statistique viennent tes 'sentiments', alors ? Prennent-ils en compte le fait que je viens de la culture des Lumières, ou que ces autres Seigneurs des Ténèbres potentiels étaient les enfants d'une noblesse Moyenâgeuse gâtée, qui savaient peau de bique des leçons à tirer de ce qui est advenu de Lénine et Hitler, ou de la psychologie évolutionniste du mensonge à soi-même, ou de la valeur de la conscience de soi et de la rationalité, ou -
"Non, bien sûr qu'ils ne faisaient pas partie de cette nouvelle catégorie de référence que tu viens de construire de telle façon que tu en sois le seul membre. Et bien sûr que les autres ont plaidé leur exceptionalisme, tout comme tu le fais maintenant. Mais pourquoi est-ce nécessaire ? Penses-tu être le dernier sorcier de la Lumière potentiel au monde ? Pourquoi dois-tu être celui qui s'essaie à la grandeur, alors que je t'ai informé du fait que tu es plus à risque que la moyenne ? Laisse un autre candidat plus sûr essayer !"
Mais la prophétie...
"Tu ne sais pas vraiment si il y a une prophétie. C'était d'abord une folle conjecture de ta part, ou pour être plus précis, une blague idiote, et McGonagall pourrait n'avoir réagi qu'à la suggestion que le Seigneur des Ténèbres était toujours en vie. Tu n'as fondamentalement pas la moindre idée de ce que dit la prophétie ni même si il y en a une. Tu ne fais que deviner, ou pour être plus exact, souhaiter que tu aies un rôle héroïque tout préparé et qui serait ta propriété personnelle."
Mais même si il n'y a pas de prophétie, c'est moi qui l'ai vaincu la dernière fois.
"C'était presque assurément un incroyable coup de chance à moins que tu ne penses sérieusement qu'un enfant de un an avait une capacité innée à vaincre les Seigneurs des Ténèbres qui se serait maintenue dix ans plus tard. Rien de tout ça ne constitue ta vraie raison et tu le sais !"
La réponse à cela n'était pas quelque chose que Harry aurait généralement dit tout haut ; lors d'une conversation il aurait dansé d'un pied sur l'autre et aurait trouvé des arguments plus acceptables socialement et menant à la même conclusion -
"Tu penses que tu es potentiellement le plus grand sorcier à avoir jamais vécu, le plus grand serviteur de la Lumière, qu'aucun n'est susceptible de reprendre ta baguette si tu y renonces."
Eh bien... franchement, ouais. Je n'ai pas l'habitude de le dire comme ça en public, mais ouais. Pas la peine d'adoucir la pilule, tu peux lire mon esprit de toute façon.
"Dans la mesure où tu crois vraiment cela... tu dois également croire que tu pourrais être le plus terrible Seigneur des Ténèbres que le monde ait jamais connu."
La destruction est toujours plus facile que la création. Plus simple d'arracher les choses, de perturber, que de les assembler à nouveau. Si j'ai le potentiel de faire le bien à grande échelle, je dois aussi avoir le potentiel d'accomplir un mal encore plus grand... Mais je ne ferai pas ça.
"Et voilà que tu insistes, que tu veux prendre le risque ! Pourquoi es-tu si déterminé ? Quelle est la vraie raison pour laquelle tu ne dois pas aller à Poufsouffle et être plus heureux là bas ? Quelle est ta vraie peur ?"
Je dois accomplir mon potentiel dans sa totalité. Sinon... j'échoue...
"Qu'est ce qui se passe si tu échoues ?"
Quelque chose de terrible...
"Qu'est ce qui se passe si tu échoues ?"
Je ne sais pas !
"Alors ça ne devrait pas être effrayant. Qu'est ce qui se passe si tu échoues ?"
JE NE SAIS PAS ! MAIS JE SAIS QUE ÇA NE SERA PAS BON !
Il y eut un silence momentané dans les cavernes de l'esprit de Harry.
"Tu sais - tu ne te laisses pas le penser, mais dans un coin tranquille de ton esprit tu sais exactement ce que tu ne penses pas - tu sais que l'explication de loin la plus simple pour cette frayeur imprononçable que tu as est juste la peur de perdre ton fantasme de grandeur, de décevoir les gens autour de toi, de devenir relativement ordinaire, de briller brièvement puis de t'éteindre comme tant d'autres enfants prodiges..."
Non, pensa désespérément Harry, non, il y a autre chose, ça vient d'ailleurs, je sais qu'il y a quelque chose, là dehors, dont il faut avoir peur, un désastre que je dois arrêter...
"Comment serait-il possible que tu sois au courant d'une chose pareille ?"
Harry le cria avec toute la puissance de son esprit : NON, ET C'EST DÉFINITIF !
Puis la voix du Choixpeau dit lentement :
"Alors tu risqueras de devenir un Seigneur des Ténèbres, parce que l'alternative, pour toi, est l'échec certain, et que cet échec signifie que tu auras tout perdu. Tu le crois du fond du coeur. Tu connais toutes les raisons de douter de cette croyance, et elles ne t'ont pas émues."
Oui. Même si aller à Serdaigle renforce la froideur, ça ne veut pas dire que la froideur finira par gagner.
"Ce jour est un grand embranchement de ton destin. Ne sois pas si sûr qu'il y existera d'autres choix après celui-ci. Il n'existe pas de panneau indicateur marquant l'endroit de ta dernière chance de faire marche arrière. Si tu refuses une chance, ne refuseras-tu pas les autres ? Peut-être que ton destin, par ce choix unique, est déjà scellé."
Mais ce n'est pas certain.
"Que tu ne le saches pas avec certitude ne reflète peut-être que ton ignorance."
Mais ce n'est toujours pas certain.
Le Choixpeau soupira d'un affreux soupir triste.
"Et dans peu de temps tu deviendras une autre mémoire, ressentie mais non sue, lors du prochain avertissement que je donnerai..."
Si c'est comme ça que tu vois les choses, pourquoi est-ce que tu ne me mets pas là où tu veux que j'aille ?
Les pensées du Choixpeau étaient imprégnées de tristesse. "Je peux seulement t'envoyer là où tu appartiens. Et seules tes décisions peuvent changer cela."
Alors c'est dit. Envoie moi à Serdaigle où j'appartiens, avec les autres tels que moi.
"Je suppose que tu n'envisagerais pas Gryffondor ? C'est la Maison la plus prestigieuse - les gens s'attendent probablement même à ce que tu y ailles, et même - ils seront un peu déçus de ne pas te voir y aller - et tes nouveaux amis les jumeaux Weasley y sont -"
Harry pouffa de rire, ou ressentit l'envie de le faire ; cela produit un rire mental ; une sensation étrange. Il y avait apparemment des mesures de sécurités mises en places pour vous empêcher de parler par accident pendant que vous étiez sous le Choixpeau, à parler de choses que vous ne diriez à aucune autre âme pour le reste de votre vie.