Harry Potter ouvrit la coque dorée, regarda le petite sablier coincé entre ses cercles concentriques, hocha la tête et referma la coque. "Merci. Maintenant, partez." La voix du garçon se brisa à nouveau. "Je dois réfléchir."
Elle ferma la porte derrière elle, et un son terrible et pourtant presque entièrement étouffé s'échappa de sa gorge…
Albus apparut dans une ondulation à côté d'elle, prenant brièvement un teint criard le temps que le sortilège de Désillusion s'estompe.
Elle ne bondit pas tout à fait de surprise. "Je vous ai dit d'arrêter de faire ça," dit Minerva. Sa voix semblait morne à ses propres oreilles. "C'était une conversation privée."
Albus agita ses doigts vers la porte derrière elle. "J'avais peur que M. Potter ne te fasse du mal." Le directeur s'interrompit puis dit doucement : "Je suis très surpris que tu aies encaissé sans bouger."
"Tout ce que j'avais à faire, c'était de dire : 'M. Potter', et il se serait arrêté." Sa voix était descendue au niveau d'un murmure. "Cela seulement, et il se serait arrêté. Et alors il n'aurait eu personne à qui dire ces terribles choses, personne."
"J'ai trouvé que les remarques de M. Potter étaient entièrement injuste et imméritées," dit Albus.
"Si cela avait été vous, Albus, vous n'auriez pas menacé d'expulser quiconque quitterait la pièce. Pouvez-vous honnêtement me dire le contraire ?"
Albus leva un sourcil. "Ton rôle dans ce désastre a été mince, tes décisions étaient raisonnables au moment où tu les a prises, et ce n'est que du point de vue privilégié de celui qui regarde le passé que Harry Potter peut croire qu'il en est autrement. Tu es certainement trop sage pour te blâmer pour ceci, Minerva."
Elle savait parfaitement que Albus placerait une image de Hermione dans sa terrible pièce, qu'elle y occuperait une place de choix. Elle était certaine que, même s'il n'avait même pas été présent à Poudlard à ce moment là, Albus se tiendrait lui pour responsable. Mais pas elle.
Alors vous non plus, vous ne pensez pas que je mérite qu'on me tienne pour responsable…
Elle s'appuya contre le mur le plus proche et essaya de ne pas laisser les larmes émerger de nouveau ; elle n'avait jamais vu Albus pleurer, à trois exceptions près. "Vous avez toujours cru en vos élèves, ce que je n'ai jamais fait. Ils n'auraient pas eu peur de vous. Ils auraient su que vous comprendriez."
"Minerva…"
"Je ne suis pas apte à vous succéder à la direction. Nous le savons tous les deux."
"Tu as tort," dit doucement Albus. "Quand le jour viendra, tu seras la quarante-cinquième directrice de Poudlard et tu feras un excellent travail."
Elle secoua la tête. "Et maintenant, Albus ? S'il ne m'écoutera pas moi, qui d'autre ?"
Nous étions peut-être une heure plus tard. Le garçon gardait encore la porte où le corps de sa meilleure amie reposait, il la veillait, assis. Il regardait vers le bas, vers sa baguette, entre ses mains. Parfois son visage se contractait au milieu d'une pensée, à d'autres moments il se détendait.
Même si la porte ne s'ouvrit pas et qu'il n'y eut aucun son, le garçon leva les yeux. Il composa son expression. Sa voix, lorsqu'il parla, fut morne. "Je ne veux pas de compagnie."
La porte s'ouvrit.
Le professeur de Défense de Poudlard entra dans la pièce, ferma la porte derrière lui, et prit place avec précaution dans un coin entre deux murs, aussi loin du garçon qu'il lui fut possible. Une sensation aiguë de catastrophe avait emplit l'espace qui les séparait et se tenait là, immuable.
"Pourquoi êtes-vous là ?" dit le garçon.
L'homme inclina légèrement la tête. Des yeux pâles examinèrent le garçon comme s'il était un spécimen d'une vie venue d'une lointaine planète, avec le danger potentiel que cela impliquait.
"Je suis venu vous présenter mes excuses, M. Potter," dit doucement l'homme.
"Vous excuser pour quoi ?" dit le garçon. "Pourquoi, qu'auriez-vous pu faire pour empêcher la mort de Hermione ?"
"J'aurais dû penser à vérifier votre présence, celle de M. Londubat et celle de Mlle Granger, car vous étiez tous des cibles évidentes," dit le professeur de Défense sans hésiter. "M. Hagrid n'était pas mentalement apte à commander un contingent d'élèves. J'aurais dû ignorer la demande de silence que m'avait faite la directrice adjointe et lui dire de laisser le professeur Flitwick en arrière, car il aurait mieux été capable de défendre les élèves contre n'importe quelle menace tout en maintenant la communication via Patronus."
"Correct." La voix du garçon avait le tranchant d'un fil de rasoir. "J'avais oublié qu'il y avait à Poudlard quelqu'un d'autre capable d'être responsable. Alors pourquoi n'y avez-vous pas pensé, Professeur ? Parce que je ne crois pas que vous ayez été stupide."
Il y eut un silence et les doigts du garçon blanchirent autour de sa baguette.
"Vous n'y avez pas pensé non plus sur le moment, M. Potter." La voix du professeur de Défense révélait une certaine fatigue. "Je suis plus intelligent que vous. Je pense plus vite que vous. J'ai plus d'expérience que vous. Mais l'écart entre nous n'est pas le même que celui entre eux et nous. Si vous pouvez rater quelque chose, alors moi aussi." Les lèvres de l'homme se tordirent. "Vous voyez, j'ai immédiatement compris que le troll n'était qu'une distraction d'autre chose et n'avait pas en lui-même grande importance. Tant que personne n'envoyait les élèves se promener inutilement à travers les couloirs ou ne dépêchait inconsciemment les jeunes Serpentard dans ces mêmes donjons où le troll avait été vu."
Le garçon ne sembla pas se détendre. "J'imagine que c'est plausible."
"Quoi qu'il en soit," dit l'homme, "s'il y a ici quiconque qui peut être déclaré responsable de la mort de Mlle Granger, c'est moi-même, pas vous. C'est moi, et non pas vous, qui aurais dû…"
"Je perçois que vous avez parlé au professeur McGonagall et qu'elle vous a donné un texte à réciter." Le garçon ne se fatigua pas à dissimuler son amertume. "Si vous avez quelque chose à dire, professeur, dites-le sans masque."
Il y eut un silence.
"Comme vous le souhaitez," dit le professeur de Défense d'une voix vide d'émotions. Les yeux pâles demeuraient vifs, aux aguets. "Je regrette effectivement que la fille soit morte. Elle était une bonne élève en cours de Défense et aurait pu être votre alliée plus tard. J'aimerais vous consoler de votre perte mais j'ignore entièrement comment procéder. Naturellement, si je découvre les responsables, je les tuerai. Vous serez invité à participer si les circonstances le permettent."
"Comme c'est touchant," dit le garçon d'une voix froide. "Vous ne prétendez donc pas avoir aimé Hermione ?"
"Je crois avoir été insensible à ce qui faisait son charme. Je ne tisse plus de tels liens avec facilité."
Le garçon hocha la tête. "Merci pour votre honnêteté. Est-ce tout, professeur ?"
Il y eut un silence.
"Le château est meurtri, à présent," dit l'homme debout dans un coin.
"Quoi ?"
"Lorsqu'un certain artefact ancien m'a informé que Mlle Granger était sur le point de mourir, j'ai lancé ce sortilège de feu maudit dont je vous ai un jour parlé. J'ai traversé certains murs et certains étages en les brûlant afin que mon balais volant puisse emprunter une voie plus directe." L'homme parlait d'une voix sans timbre. "Poudlard ne guérira pas facilement de ces blessures, si jamais elle en guérit. J'imagine qu'il sera nécessaire de colmater les trous au moyens de conjurations plus faibles. Je le regrette maintenant, puisqu'il s'est avéré que j'arrivais trop tard."
"Ah," dit le garçon. Il ferma brièvement les yeux. "Vous vouliez la sauver. Vous le vouliez tellement que vous avez fait un vrai effort. J'imagine que votre esprit, contrairement au leur, est capable de cela."
Un bref sourire sec venu de l'homme.
"Merci, professeur. Mais je voudrais être laissé seul jusqu'au dîner. Vous entre tous saurez comprendre. Est-ce tout ?"