"Règle numéro huit," dit le professeur de Défense. "Toute technique assez bonne pour m'avoir un fois est assez bonne pour mériter que je l'apprenne."
Le garçon eut un sourire sans gaîté. "Et j'ai entendu dire qu'une adulte avait lancé Oubliettes alors qu'elle était presque entièrement vidée de sa magie. Cela ne doit donc pas en nécessiter beaucoup. Il n'est même pas considéré comme Impardonnable, bien que je ne puis comprendre pourquoi. Si j'avais pu faire en sorte que M. Hagrid se souvienne d'autres ordres…"
"Ce n'est pas aussi simple," dit le professeur de Défense. "Vous n'êtes pas assez puissant pour utiliser le sortilège de faux souvenirs, et même un simple Oubliettes serait à la limite de votre endurance actuelle. C'est un art dangereux, dont la pratique est illégale sans autorisation ministérielle, et je vous recommanderais de ne pas l'utiliser lorsque les circonstances rendraient gênantes l'effacement accidentel de dix ans de la vie de quelqu'un. J'aimerais pouvoir vous promettre que j'obtiendrai l'un de ces tomes hautement gardés du département des mystères et que je vous le ferai livrer sous quelque déguisement. Mais ce que je dois en fait vous dire, c'est que vous trouverez le manuel d'instruction standard sur le sujet dans les piles nord-nord-ouest de la bibliothèque principale de Poudlard, à la lettre M."
"Sérieusement," dit le garçon d'un ton neutre.
"En effet."
"Merci pour votre aide, professeur."
"Votre créativité est devenue bien plus pragmatique depuis que je vous ai rencontré, M. Potter."
"Merci pour le compliment." Le garçon ne releva pas les yeux de la baguette qu'il regardait, entre ses mains. "Je voudrais me remettre à réfléchir à présent. S'il vous plaît, expliquez-leur pour moi ce qui se passera si je suis dérangé."
La porte du débarras s'ouvrit et le professeur Quirrell en sortit. Son visage avait un air mort, vide d'émotions ; elle aurait dit que cela lui rappelait Severus, mais Severus n'avait jamais tout à fait ressemblé à cela.
Au moment où la porte se referma, Minerva lança muettement une barrière anti-bruit. Les mots s'écoulèrent d'elle rapidement : "Comment ça s'est passé - vous étiez là un bon moment - est-ce que Harry parle, maintenant ?"
Le professeur Quirrell avança rapidement dans la pièce jusqu'au mur proche de l'entrée et la regarda. Le visage sans émotion glissa, comme s'il enlevait un masque, et révéla derrière lui quelque chose de très sinistre. "J'ai parlé à M. Potter comme il s'attendait à ce que je lui parle et j'ai évité de dire des choses qui auraient pu l'agacer. Je ne pense pas l'avoir consolé. Je ne pense pas avoir de talent pour ça."
"Merci… c'est déjà bien qu'il ait parlé…" Elle hésita. "Qu'a dit M. Potter ?"
"J'ai peur de lui avoir promis de ne pas en parler. Et maintenant… je pense que je dois faire une visite à la bibliothèque de Poudlard."
"La bibliothèque ?"
"Oui," dit le professeur Quirrell. Une tension inhabituelle apparut dans sa voix. "Je compte renforcer la sécurité de la section interdite avec certaines précautions de ma propre fabrication. Les protections actuelles sont une plaisanterie. Et M. Potter doit être maintenu hors de la section interdite à tout prix."
Elle regarda le professeur de Défense, et son cœur se mit à battre la chamade.
Le professeur Quirrell continua de parler : "Vous ne direz pas au garçon que je vous ai dit cela. Vous confirmerez auprès de Flitwick et Vector que le garçon devra être distrait par les évasions habituelles s'il pose des questions trop précoces sur la création de sortilèges. Et bien qu'il ne s'agisse pas d'un domaine où je suis expert, madame la directrice adjointe, si vous pouvez imaginer quelque moyen que ce soit pour convaincre le garçon de ne pas s'enfoncer plus avant dans son chagrin et sa folie - n'importe quel moyen de défaire les résolutions qu'il est en train de prendre - alors je vous suggère de l'appliquer immédiatement."
*Chapter 91*: Rôles, partie 2
Peu de temps après, il y eut un autre coup contre la porte du débarras.
"Si vous vous souciez vraiment de ma santé mentale," dit le garçon sans lever les yeux, "vous partirez, vous me laisserez tranquille, et vous attendrez que je descende dîner. Vous ne m'aidez pas."
La porte s'ouvrit et celui qui avait attendu dehors entra.
"Franchement ?" dit le garçon d'un ton catégorique.
La porte se rabattit puis se ferma derrière Severus Rogue.
Le maître des potions de Poudlard n'affichait rien de l'arrogance dont il était coutumier ni même de l'apparence d'impassibilité qu'il revêtait parfois dans le bureau du directeur ; son regard, étrange, les yeux baissés sur le garçon qui gardait la porte ; ses pensées, insondables.
"Je ne puis imaginer ce que pense la directrice adjointe," dit le maître des potions. "À moins que je ne sois censé servir d'avertissement quant à ce qui vous attend si vous décidez d'endosser la responsabilité de sa mort."
Les lèvres du garçon se serrèrent. "Très bien. Vous avez gagné, professeur Rogue. Je concède que vous étiez plus responsable de la mort de Lily Potter que je ne le suis de celle de Hermione Granger, et que ma culpabilité n'est pas comparable à la vôtre. Et maintenant je vous demande de partir, et de leur dire qu'il serait probablement préférable de me laisser seul un moment. En avons-nous fini ?"
"Presque," dit le maître des potions. "C'est moi qui mettais les mots sous l'oreiller de Mlle Granger et qui lui disais où trouver les combats lors desquels elle intervenait."
Le garçon ne réagit pas du tout à cela. Puis il parla enfin. "Parce que vous n'aimez pas que les gens se fassent brutaliser."
"Pas seulement ça." Il y avait une note de douleur dans la voix du maître des potions qui lui était étrangère ; il était difficile d'imaginer que c'était la même voix acide qui ordonnait aux enfants de ne pas remuer une fois de plus sans quoi leurs poignets seraient arrachés. "J'aurais dû m'en rendre compte… beaucoup plus tôt, j'imagine, et pourtant je ne l'ai pas remarqué, entièrement absorbé par moi-même que j'étais. Me placer à la tête de Serpentard… cela signifiait que Albus Dumbledore avait perdu tout espoir d'aider la maison Serpentard. Je suis certain que Dumbledore essaya, je ne puis l'imaginer ne pas avoir essayé, lorsqu'il prit la tête de Poudlard pour la première fois. Il dut ressentir une profonde douleur quand, après cela, tant de Serpentard répondirent à l'appel du Seigneur des Ténèbres… il ne m'aurait pas mis en position d'autorité dans cette maison, étant donné mon comportement, s'il n'avait pas perdu tout espoir." Sous sa cape tachée et salie, les épaules du maître des potions s'affaisèrent. "Mais vous et Mlle Granger essayiez de faire quelque chose, et vous étiez même parvenus à faire changer M. Malfoy et Mlle Greengrass, et peut-être que ces deux là auraient pu montrer un autre exemple… j'imagine qu'il fut idiot de ma part d'y croire. Le directeur ne sait pas ce que j'ai fait, et je vous demande de ne pas lui dire."
"Pourquoi me dites-vous cela ?"
"Les choses sont devenues bien trop sérieuses pour que je n'en fasse pas part à quelqu'un." Les lèvres de Severus Rogue se tordirent. "J'ai assez vu de plans tourner au désastre lors de ma carrière à Serpentard pour savoir comment cela fonctionne. Si, à l'avenir, tout devait être révélé - alors au moins je vous l'aurais dit, et vous pourrez en attester."
"Délicieux," dit le garçon. "Merci d'avoir éclaircit ce mystère. Est-ce tout ?"
"Comptez-vous déclarer que votre vie n'est plus qu'une ruine et qu'il ne vous reste rien d'autre que la vengeance ?"
"Non. J'ai encore…" le garçon s'interrompit.