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"L'intention qui vous habite maintenant est bien plus dangereuse que vous ne le croyez."

Répondre à cette affirmation étonnante ne demanda pas beaucoup de réflexion à Harry. "Définissez dangereux, et dites-moi ce que vous savez et comment vous pensez le savoir."

"Parfois," dit le professeur Quirrell, "parler d'un danger à quelqu'un peut les pousser à aller droit vers celui-ci. Cette fois-ci, je compte bien éviter que cela se produise. Vous attendez-vous à ce que je vous dise exactement ce que vous ne devez pas faire ? La raison exacte de ma peur ?" L'homme secoua la tête. "Si vous étiez né sorcier, M. Potter, et qu'un puissant sorcier vous disait seulement de faire attention, vous sauriez le prendre au sérieux."

Il aurait été mentir que de dire que Harry n'était pas agacé, mais il n'était pas un idiot non plus, et il dit donc seulement : "Y a-t-il quoi que ce soit que vous puissiez me dire ?"

Avec précaution, le professeur Quirrell s'assit sur l'herbe et sortit sa baguette qu'il mit dans une position que Harry reconnut. Il inspira soudainement.

"C'est la dernière fois que je pourrais faire cela pour vous," dit doucement le professeur Quirrell. Puis l'homme commença à prononcer des mots étranges, d'aucun langage que Harry pouvait reconnaître, d'une intonation qui ne semblait pas tout à fait humaine, des mots qui semblèrent s'échapper de la mémoire de Harry alors même qu'il essayait de les saisir, ils quittaient son esprit aussi vite qu'ils y étaient entrés.

Le sortilège prit forme plus lentement, cette fois. Les arbres semblèrent s'obscurcir, les branches et les feuilles disparaître par taches, comme si elles avaient été vues à travers des lunettes de soleil parfaites qui auraient estompé, atténué la lumière sans la déformer. Le bol bleu de ciel recula, l'horizon auquel le cerveau de Harry assignait par erreur une distance finie s'éloigna, devint gris, puis gris plus sombre. Les nuages devinrent translucides, transparent, et se défirent en volutes pour laisser les ténèbres briller.

La forêt s'assombrit, s'effaça, plongea dans la noirceur.

La grande rivière céleste qui les entourait devenait à nouveau visible à mesure que les yeux de Harry s'ajustaient, devenaient capables de voir le plus grand objet que des yeux humains pourraient jamais voir comme autre chose qu'un point : la Voie Lactée.

Et les étoiles, d'une lumière perçante, et pourtant lointaines, dans leurs grandes profondeurs.

Le professeur Quirrell prit une profonde inspiration. Puis il éleva sa baguette de nouveau (à peine visible dans la lumière stellaire sans soleil ni lune) et frappa sur sa propre tête au son d'un œuf que l'on brisait.

Le professeur de Défense s'estompa lui aussi, devint aussi invisible.

Une petit disque d'herbe, à peine éclairé, dérivait, vide, dans l'espace.

Aucun d'eux ne parla pendant un moment. Harry était heureux de regarder les étoiles sans même son corps pour le distraire. Ce que le professeur Quirrell avait voulu lui dire en le faisant venir ici serait dit en temps et heure.

En temps et heure, une voix parla.

"Il n'y a pas de guerre ici," dit une douce voix émanant du vide. "Pas de conflit ni de bataille, pas de politique ni de trahison, pas de mort ni de vie. Tout cela appartient à la folie des hommes. Les étoiles surplombent ces sottises et ne s'y frottent pas. Ici se trouvent la paix et un silence éternel. C'est du moins ce que je pensais."

Harry se retourna pour voir d'où venait la voix et ne vit que les étoiles.

"Ce que vous pensiez ?" dit Harry quand il sembla qu'aucune autre parole n'allait venir.

"Il n'y a rien qui surplombe la folie des hommes," chuchota la voix du vide. "Il n'y a rien au-delà des pouvoirs destructeurs d'une idiotie suffisamment intelligente, pas mêmes les étoiles elles-mêmes. J'ai travaillé très dur afin qu'une certaine plaque en or dure toujours. Je n'aimerais pas la voir détruite par la folie humaine."

De nouveau, les yeux de Harry se braquèrent par réflexe vers là où la voix aurait dû être, et de nouveau ils ne virent que du vide. "Je pense pouvoir vous rassurer à ce sujet, professeur. Les armes nucléaires n'ont pas une portée capable d'atteindre… à quelle distance se trouve Pioneer 11 ? Environ un milliard de kilomètres, peut-être ? Les Moldus disent que les armes nucléaires peuvent détruire le monde, mais ce qu'ils veulent vraiment dire, c'est qu'elles peuvent légèrement réchauffer une partie de la surface de la Terre. Le soleil est une réaction de fusion géante et il ne vaporise pas les sondes spatiales. Même dans le pire des cas possibles, une guerre nucléaire n'aurait pas la moindre de chance de détruire le système solaire, non pas que ce soit une consolation."

"Vrai pour ce qui est des Moldus," dit la douce voix entre les étoiles. "Mais que les Moldus savent-ils du véritable pouvoir ? Ce ne sont pas eux qui me font peur. C'est vous."

"Professeur," dit Harry avec précaution, "bien que je doive admettre avoir tiré quelques échecs critiques dans ma vie, il y a une certaine distance entre ça et rater un jet de sauvegarde d'une façon si catastrophique que la sonde Pioneer 11 se retrouve dans le rayon de l'onde de choc. Je ne vois pas de moyen réaliste d'accomplir ça sans faire exploser le soleil. Et avant que vous me posiez la question, le soleil est une étoile de type G V, il ne peut pas exploser. Toute entrée d'énergie ne ferait qu'augmenter le volume de plasma d'hydrogène, le soleil n'a pas un cœur dégénéré que l'on pourrait faire exploser. Le soleil n'a pas assez de masse pour devenir une supernova, même à la fin de sa vie."

"Les Moldus ont appris tant de choses incroyables," murmura l'autre voix. "Comment les étoiles vivent, comment elles se préservent de la mort, comment elles meurent. Et ils ne se demandent jamais si un tel savoir pourrait être dangereux."

"Pour être entièrement franc, professeur, cette pensée en particulier ne m'était jamais venue non plus."

"Vous êtes un né-Moldu. Je ne parle pas de votre sang, je parle de la façon dont vous avez vécu vos années d'enfance. Il y a là une certaine liberté de pensée, oui. Mais il y a aussi de la sagesse dans la prudence des sorciers. Cela fait trois cent vingt-deux ans que le pays d'Italie magique a été détruit par la folie d'un seul homme. De tels incidents étaient courant à l'époque où Poudlard fut créée. Encore plus à l'époque qui suivit Merlin. D'avant Merlin, il ne reste que peu à étudier."

"Il y a environ trente ordres de grandeur entre ça et faire exploser le soleil," remarqua Harry, puis il se reprit. "Mais j'ergote, pardon, faire exploser un pays aussi serait mal, je suis d'accord. Quoi qu'il en soit, professeur, je ne compte pas faire quoi que ce soit qui y ressemble."

"Nul besoin que vous le vouliez, M. Potter. Si vous aviez lu plus de romans pour sorciers et moins de romans pour Moldus, vous le sauriez. Dans la littérature sérieuse, le sorcier dont la sottise menace de relâcher les Hommes-Os Traînants ne serait pas consciemment résolu à atteindre ce but, cela, c'est bon pour les livres d'enfants. Ce sorcier réellement dangereux sera peut-être résolu à accomplir quelque autre projet dont il comptera tirer grand renom, et la certitude de perdre ce renom et de vivre sa vie en inconnu lui semblera bien plus réelle que la possibilité ignorée de détruire son pays. Ou il aura promis le succès à quelqu'un qu'il ne peut se permettre de décevoir. Peut-être ses enfants sont-ils endettés. Il y a dans ces histoires une grande sagesse littéraire, née d'expériences difficiles et de villes de cendres. Le plus sûr chemin vers le désastre est un puissant sorcier qui, quelle qu'en soit la raison, ne sait pas s'arrêter une fois apparus les signes d'avertissements. Bien qu'il parle haut et fort de prudence, il ne peut pas se contraindre à vraiment s'arrêter. Je me demande, M. Potter si vous avez songé à essayer quelque chose que Hermione Granger elle-même vous aurait dit de ne pas faire ?"