"C'était... c'était à peu près ça," dit Harry. "Je pense que c'était plus proche de : 'Cela fait-il partie d'un plan incroyablement malin vous permettant d'obtenir un avantage futur, ou est-ce autant une inutile disgrâce du nom de Salazar Serpentard que ça en a l'air,' ou quelque chose comme ça. Je ne me souviens pas des mots exacts."
Draco secoua la tête. "Tu nous envoies des messages contradictoires, Potter."
"Hein ?" dit Harry, et il était honnêtement confus.
"Warrington a dit que rester longtemps sous le Choixpeau Magique est un des signes annonciateurs d'un Seigneur des Ténèbres majeur. Tout le monde en parlait, et se demandait s'il ne faudrait pas commencer à te faire de la lèche, juste au cas où. Puis tu es allé protéger une bottée de Poufsouffle, nom de Merlin ! Puis tu as dit à Derrick qu'il était une disgrâce à la mémoire de Salazar Serpentard ! On est censé penser quoi ?"
"Que le Choixpeau Magique a décidé de me mettre dans la maison de 'Serpentard ! Je rigole ! Serdaigle !' et que je me suis comporté en conséquence."
M. Crabbe et M. Goyle ricanèrent tous deux, ce qui poussa M. Goyle à se flanquer une main sur sa bouche.
"On ferait mieux de s'asseoir," dit Draco. Il hésita, et sembla devenir un peu plus formel. "Potter, sans m'engager à quoi que ce soit, je tiens à te dire que je souhaite continuer notre conversation et que je suis prêt à accepter ta situation actuelle."
Harry hocha la tête. "Ça t'embêterait beaucoup si on attendait jusqu'à samedi après-midi ? Je suis en plein concours pour le moment."
"Un concours ?"
"Pour voir si je peux lire tous mes manuels aussi vite que Hermione Granger l'a fait."
"Granger," répondit Draco comme en écho. Ses yeux se rétrécirent. "La sang-de-Bourbe qui croit qu'elle est Merlin ? Si tu essaies de lui en remontrer, alors tout Serpentard te souhaite bonne chance, Potter, et je ne t'embêterai pas jusqu'à samedi." Draco inclina la tête dans un geste de respect mesuré et s'en fut, suivi par ses laquais.
Oh, ça va être vraiment amusant de jongler entre les deux, je peux déjà le voir venir.
La salle se remplissait maintenant rapidement avec les quatre couleurs d'ourlets : vert, rouge, jaune et bleu. Draco et ses deux amis semblaient être au beau milieu de l'acquisition de trois sièges de premier rang - déjà occupés bien sûr. M. Crabbe et M. Goyle menaçaient vigoureusement, mais ça ne semblait pas faire beaucoup d'effet.
Harry se pencha sur son manuel de Défense et continua à lire.
À 14h35, tous les sièges étaient pris et personne d'autre ne semblait vouloir rentrer dans la salle. Le professeur Quirrell eut une soudaine convulsion, puis il se tint le dos droit, assis sur sa chaise, et son visage apparut sur tous les objets blancs, plats et rectangulaires qui avaient été installés sur les pupitres des élèves.
Harry fut pris par surprise, autant par l'apparition soudaine du visage du professeur Quirrell que par la ressemblance de l'objet à la télévision moldue. Il y avait là quelque chose de triste et de nostalgique, ça ressemblait tant à un élément de son foyer sans pour autant l'être réellement...
"Bonjour, mes jeunes apprentis," dit le professeur Quirrell. Sa voix semblait venir de l'écran du pupitre et s'adresser directement à Harry. "Bienvenue dans votre premier cours de Magie de Combat, comme les fondateurs de Poudlard l'appelaient ; ou, comme certains le nomment en cette fin de vingtième siècle, Défense contre les forces du Mal."
Il y eut une montée de griffonnages frénétiques alors que les étudiants, pris par surprise, se saisissaient de leur parchemin ou de leur carnet de notes.
"Non," dit le professeur Quirrell, "franchement, ne vous embêtez pas à prendre note de la façon dont on appelait autrefois ce cours. Aucune question inutile n'apparaîtra sur aucun de mes contrôles. C'est une promesse."
Plusieurs étudiants se redressèrent dans leur siège en entendant ça, l'air plutôt effarés.
Le professeur Quirrell eut un léger sourire. "Ceux d'entre vous qui ont perdu leur temps en lisant à l'avance votre inutile livre de Défense de première année -"
Quelqu'un sembla s'étrangler. Harry se demanda si c'était Hermione.
"- ont peut-être l'impression que, bien que ce cours soit nommé Défense contre les forces du Mal, il concerne en fait la défense contre les Papillons de Cauchemar, qui provoquent des rêves vaguement mauvais, ou les Limaces acides, qui peuvent dissoudre toute l'épaisseur d'une poutre de bois de cinq centimètres si on leur laisse la journée."
Le professeur Quirrell se leva, repoussant sa chaise loin du bureau. L'écran sur le pupitre de Harry suivait chacun de ses mouvements. Le professeur Quirrell s'élança jusqu'à l'avant de la salle et rugit :
"Le Sirex Hongrois est plus grand que douze hommes ! Il exhale du feu si vite et si précisément qu'il peut faire fondre un Vif en plein vol ! Un sortilège de la Mort l'abattra !"
Il y eut des exclamations du côté des élèves.
"Le Troll des montagnes est plus dangereux que le Sirex Hongrois ! Il est assez fort pour traverser de l'acier avec ses dents ! Sa peau est si résistante qu'elle dévie les sorts de Découpe ! Son odorat est si aigu qu'il peut dire de loin si sa proie fait partie d'un groupe ou si elle est seule et vulnérable ! Bien plus effroyable que tout cela : le Troll est la seule des créatures magiques qui maintient en permanence une sorte de métamorphose de lui-même - il se transforme en permanence en son propre corps. Si vous parveniez enfin à lui arracher un bras, un autre lui pousserait en quelques secondes ! Le feu et l'acide produiront du tissu cicatriciel qui déboussolera temporairement les pouvoirs de régénération d'un Troll - pour une heure ou deux ! Ils sont assez intelligents pour utiliser des outils tels que des bâtons ! Le Troll des montagnes est troisième de la liste des machines à tuer les plus parfaites de la Nature ! Un sortilège de la Mort l'abattra."
Les élèves avaient l'air plutôt effarés.
Le professeur Quirrell souriait de façon plutôt sinistre. "Ce qu'on ose appeler un manuel de Défense de troisième année vous suggérera d'exposer le Troll à la lumière du soleil, ce qui le gèlera sur place. Ceci, mes jeunes apprentis, est le genre de savoir inutile que vous ne trouverez à aucun de mes examens. On ne rencontre jamais de Troll en plein jour et à découvert ! La suggestion selon laquelle vous devriez utiliser la lumière du soleil pour les arrêter est le fruit d'ineptes auteurs de manuels essayant de démontrer leur maîtrise de menus détails, et ce au détriment du sens pratique. Ce n'est pas parce qu'il existe un moyen ridiculement obscur de se débarrasser des Trolls des montagnes que vous devriez l'utiliser ! Le sortilège de la Mort est imparable, inarrêtable, et fonctionne à chaque fois, sur toute chose possédant un cerveau. Si, une fois devenu un sorcier adulte, vous ne parvenez pas à utiliser le Sort de la Mort, alors vous pouvez simplement transplaner ! De même, si vous faites face à la deuxième des machines à tuer les plus parfaites, le Détraqueur. Vous vous contentez de transplaner !"
"À moins bien sûr," dit le professeur Quirrell, sa voix plus basse et plus dure, "que vous ne soyez sous l'influence d'une malédiction anti-transplanage. Non, il y a exactement un seul monstre qui sera capable de vous menacer une fois que vous aurez fini votre croissance. Le monstre le plus dangereux au monde, si dangereux que rien ne lui arrive à la cheville. Le sorcier adulte. C'est la seule chose qui pourra encore vous menacer."
Les lèvres du professeur Quirrell formaient une ligne très fine. "C'est à contrecœur que je vous enseignerai assez de broutilles pour que vous ayez une note passable à la portion de vos examens de fin d'année mandatée par le Ministère. Puisque votre note exacte n'aura aucune incidence sur votre vie future, toute personne désirant une note meilleure que passable est invitée à perdre son temps en étudiant ce qu'on ose appeler un manuel. Le nom de ce cours n'est pas Défense Contre les nuisibles mineurs. Vous êtes ici pour apprendre comment vous défendre contre les forces du Mal. Ce qui signifie, soyons très clair à ce sujet, vous défendre contre les Mages Noirs. Des gens armés de baguettes désirant vous tuer et qui y parviendront probablement, à moins que vous ne les blessiez en premier ! Il n'y a pas de défense sans attaque ! Il n'y a pas de défense sans combat ! Cette réalité est jugée trop dure pour des enfants de onze ans par les politiciens gras, surpayés et gardés par des Aurors qui ont décidé de votre curriculum. Puissent ces idiots tomber dans une abysse ! Vous êtes ici pour le cours qui a été enseigné à Poudlard pendant huit cents ans ! Bienvenue dans votre premier cours de Magie de Combat !"