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Appelons ce bout de papier "Papier-2".

Harry déchira un bout de papier de son bloc-notes.

Appelons ce bout de papier "Papier-1". C'était, bien sûr, le même bout de papier. On pouvait même voir, si on y regardait de près, que les bords déchirés correspondaient.

Harry passa mentalement en revue l'algorithme qu'il allait suivre.

Si Harry ouvrait Papier-2 et qu'il était vierge, alors il écrirait "101 x 101" sur Papier-1, le plierait, étudierait pendant une heure, reviendrait en arrière dans le temps, déposerait Papier-1 (qui deviendrait ainsi Papier-2), et se dirigerait hors du niveau caverne pour rejoindre ses camarades de dortoir au petit-déjeuner.

Si Harry ouvrait Papier-2 et qu'il y avait deux nombres écrits dessus, Harry multiplierait ces deux nombres entre eux.

Si leur produit était égal à 181 429, Harry écrirait ces deux nombres sur Papier-1 et renverrait Papier-1 en arrière dans le temps.

Sinon, Harry ajouterait 2 au nombre de droite et écrirait la nouvelle paire de nombres sur Papier-1. À moins que cela ne rende le nombre de droite supérieur à 997, auquel cas Harry ajouterait 2 au nombre de gauche et écrirait 101 à droite.

Et si Papier-2 disait 997 x 997, Harry laisserait Papier-1 vide.

Ce qui voulait dire que la seule boucle temporelle stable possible était celle où Papier-2 contenait les deux facteurs premiers de 181 429.

Si ça fonctionnait, Harry pourrait utiliser cette technique pour obtenir n'importe quelle sorte de réponse facile à vérifier mais difficile à trouver. Il n'aurait pas seulement montré que P=NP quand on avait un Retourneur de Temps, non, la technique était plus générale que cela. Harry pourrait l'utiliser pour trouver des combinaisons de cadenas ou n'importe quel genre de mot de passe. Ou même peut-être trouver l'entrée de la Chambre des Secrets de Serpentard, si Harry pouvait deviser une façon systématique de décrire tous les emplacements de Poudlard. Ce serait une technique de triche impressionnante, même comparé aux standards de triche de Harry.

Harry prit Papier-2 dans ses mains tremblantes, et le déplia.

Papier-2 disait, d'une écriture légèrement irrégulière :

NE JOUE PAS AVEC LE TEMPS

Harry écrivit "NE JOUE PAS AVEC LE TEMPS" sur Papier-1 d'une écriture légèrement irrégulière, le plia avec soin, et se résolut à ne plus faire d'expérience vraiment brillante sur le Temps avant d'avoir au moins quinze ans.

Pour autant que Harry en savait, ça avait été le résultat expérimental le plus effrayant de toute l'histoire de la science.

Harry avait eut quelques difficultés à se concentrer sur la lecture de son manuel pendant l'heure suivante.

Et c'est ainsi que le jeudi de Harry avait commencé.

Jeudi.

Si on voulait être précis, 15h32 un jeudi après-midi.

Harry et tous les autres garçons de première année étaient dehors, sur un champ herbeux, avec Madame Bibine, juste à côté de la réserve de balais de Poudlard. Les filles apprendraient à voler séparément. Apparemment, pour une raison inconnue, les filles ne voulaient pas apprendre à voler sur des balais en présence de garçons.

Harry avait été un peu vacillant pendant la journée. Il était incapable d'arrêter de penser à la façon dont cette boucle temporelle stable et pas une autre avait bien pu être sélectionnée à partir de ce qui, rétrospectivement, semblait être un large espace de possibilités.

Et aussi : sérieusement, des balais ? Il allait voler sur ce qui était essentiellement un segment ? N'était-ce pas quasiment la forme la plus instable qu'on puisse jamais trouver, à moins d'essayer de se tenir sur une bille ? Qui avait sélectionné ce modèle d'engin volant, parmi toutes les formes possibles ? Harry avait espéré que ce ne soit qu'une figure de style, mais non, ils se tenaient devant ce qui ressemblait indiscutablement à d'ordinaires balais de cuisine en bois. Quelqu'un s'était-il juste retrouvé bloqué sur l'idée des balais et n'avait pas pensé à envisager autre chose ? Ça devait être ça. Il n'y avait aucune chance pour que, si on les développait indépendamment l'un de l'autre, les modèles optimaux permettant de nettoyer une cuisine et ceux permettant de voler dans les airs se révèlent coïncider exactement.

C'était une belle journée, avec un ciel bleu clair et un soleil éclatant qui ne demandait qu'à entrer dans vos yeux et à vous empêcher de voir quoi que ce soit, s'il se trouvait que vous étiez en train d'essayer de voler dans le ciel. Le champ était propre et sec, sentait presque le brûlé, et semblait étrangement être très, très dur sous les chaussures de Harry.

"Levez votre main droite au-dessus du balai, ou la main gauche si vous êtes gaucher," s'écria Madame Bibine. "Et dites DEBOUT !"

Tout le monde cria "DEBOUT !"

Le balai bondit d'impatience jusqu'à la main de Harry.

Ce qui fit de lui le premier de la classe, pour une fois. Apparemment dire "DEBOUT !" était beaucoup plus difficile que ça en avait l'air, et la plupart des balais roulaient partout sur l'herbe ou essayaient de s'écarter discrètement de leur soi-disant futur conducteur.

(Bien sûr, Harry aurait été prêt à parier de l'argent sur le fait que Hermione avait réussi au moins aussi bien que lui lorsque ça avait été son tour, plus tôt dans la journée. Il était impossible que Harry maîtrise du premier coup quelque chose qui échappe à Hermione, et si une telle chose existait et se révélait être le vol sur balai, plutôt qu'une activité intellectuelle, Harry préférait encore mourir.)

Il fallut un bon moment avant que tout le monde n'ait un balais devant lui. Madame Bibine montra comment monter dessus, puis déambula entre les élèves, corrigeant les prises et les postures. Apparemment, même parmi les quelques enfants qu'on avait autorisés à voler chez eux, peu avaient appris à le faire correctement.

Madame Bibine passa en revue le champ de garçons et hocha la tête. "Et maintenant, quand je souffle dans mon sifflet, vous donnez un bon coup d'envoi sur le sol avec vos pieds."

Harry déglutit, essayant de réprimer la sensation d'écœurement qu'il avait à l'estomac.

"Maintenez vos balais stables, élevez-vous de quelques pieds, et revenez directement au sol en vous penchant légèrement en avant. À mon coup de sifflet - trois - deux -"

L'un des balais piqua vers le ciel, accompagné par les cris d'un jeune garçon - d'horreur, pas de délectation. Le garçon tournoyait à une effroyable vitesse tout en continuant de monter, et ils ne pouvaient qu'entrapercevoir son visage blanc -

Comme au ralenti, Harry avait bondi, était descendu de son balai, et fouillait ses robes à la recherche de sa baguette, même s'il ne savait pas exactement ce qu'il comptait en faire ; il avait eu exactement deux cours de Sortilèges, et le dernier avait été le sortilège de Lévitation, mais Harry n'avait réussi à jeter le sort qu'une fois sur trois et il ne pouvait certainement pas faire léviter des personnes entières -

S'il y a un pouvoir caché en moi, qu'il se révèle MAINTENANT !

"Reviens, mon garçon !" cria Madame Bibine (ce qui devait être l'injonction la plus inutile qu'on puisse imaginer face à un balai incontrôlable, venant d'un professeur de vol, et une section totalement automatique du cerveau de Harry ajouta Madame Bibine à sa liste d'idiots).

Et le garçon fut projeté loin du balai.

Il sembla d'abord se déplacer très lentement dans les airs.

"Wingardium Leviosa !" hurla Harry.

Le sort échoua. Harry pouvait le sentir échouer.

Il y eut un BAM et un lointain son de craquement, et le garçon gisait au sol, face contre terre, comme un petit monticule posé sur l'herbe.