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Dumbledore s'enfonça dans son trône rembourré. Jamais Minerva ne l'avait vu avec des yeux aussi froids, pas depuis le jour où son frère était mort. "Et vous menacez de nous abandonner à Voldemort si nous ne nous soumettons pas à vos souhaits."

La voix de Harry était tranchante comme un rasoir. "Je suis au regret de vous informer que vous n'êtes pas le centre de l'univers. Je ne menace pas d'abandonner l'Angleterre magique. Je menace de vous abandonner. Je ne suis pas un humble petit Frodon. C'est ma quête, et si vous voulez en faire partie, vous jouerez selon mes règles."

Le visage de Dumbledore était toujours froid. "Je commence à douter de votre aptitude à être le héros, M. Potter."

Le regard que lui renvoya Harry était tout aussi glacé. "Je commence à douter de votre aptitude à être mon Gandalf, M. Dumbledore. Au moins Boromir était une erreur plausible. Qu'est-ce que ce Nazgul fait dans ma Communauté ?"

Minerva était totalement perdue. Elle regarda Severus, pour voir s'il arrivait à suivre, et elle vit qu'il avait détourné son visage hors du champ de vision de Harry et qu'il souriait.

"Je suppose," dit lentement Dumbledore, "que de votre point de vue, c'est une question raisonnable. Donc, M. Potter, si le professeur Rogue vous laisse tranquille à l'avenir, cela va-t-il être la dernière fois que ce problème survient, ou vais-je vous retrouver ici chaque semaine, armé d'une nouvelle exigence ?"

"Me laisser tranquille ?" la voix de Harry était outragée. "Je ne suis pas sa seule victime et je ne suis certainement pas le plus vulnérable ! Avez-vous oublié à quel point les enfants sont sans défense ? À quel point ils peuvent souffrir ? À l'avenir, Severus traitera tous les étudiants de Poudlard avec la courtoise appropriée à un professionnel, ou vous vous trouverez un autre professeur de Potions, ou vous vous trouverez un autre héros !"

Dumbledore commença à rire. Un rire chaud et plein d'humour, à gorge déployée, comme si Harry venait d'exécuter une danse comique devant lui.

Minerva n'osait pas bouger. Elle jeta un coup d'œil rapide et vit que Severus était tout aussi immobile.

Le visage de Harry devint encore plus froid. "Vous me comprenez mal, Directeur, si vous pensez que c'est une plaisanterie. Ce n'est pas une requête. C'est votre punition."

"M. Potter -" dit Minerva. Elle ne savait même pas ce qu'elle comptait dire. Elle ne pouvait simplement pas laisser passer ça.

D'un geste, Harry lui intima de se taire, et il continua de parler à Dumbledore. "Et si cela vous semble malpoli," dit Harry, sa voix un peu moins dure, "sachez que ça ne semblait pas moins malpoli quand vous me l'avez dit. Vous ne diriez pas une chose pareille à quelqu'un que vous considéreriez comme un véritable être humain et non pas comme un enfant subordonné, et je vous traiterai avec la même courtoisie que celle avec laquelle vous me traitez -"

"Oh, en effet, en grand effet, si j'ai jamais reçu une punition, c'est bien celle-là ! Bien sûr que vous êtes ici, à me faire chanter pour sauver vos camarades, pas pour vous sauver vous-même ! Je ne comprends pas comment j'ai pu imaginer qu'il en soit autrement !" Dumbledore riait de plus belle. Il frappa trois fois du poing sur la table.

Harry sembla plus incertain. Son visage se tourna vers Minerva, s'adressant à elle pour la première fois. "Excusez-moi," dit Harry. Sa voix semblait vacillante. "A-t-il besoin de prendre ses médicaments, ou quelque chose dans le genre ?"

"Ah..." Minerva ne savait pas ce qu'elle pouvait bien dire.

"Bon," dit Dumbledore. Il essuya les larmes qui s'étaient amoncelées dans ses yeux. "Excusez-moi. Je suis navré de cette interruption. Continuez avec le chantage, s'il vous plaît."

Harry ouvrit la bouche puis la referma. Il semblait à présent légèrement chancelant. "Ah... il devra aussi arrêter de lire dans l'esprit des élèves."

"Minerva," dit Severus, sa voix meurtrière, "tu -"

"Le Choixpeau Magique m'a mis en garde," dit Harry.

"Quoi ?"

"Je ne peux pas en dire plus. Bref, je pense que c'est tout. J'ai terminé."

Silence.

"Et maintenant ?" dit Minerva, quand il devint clair que personne d'autre n'allait parler.

"Et maintenant ?" dit Dumbledore en écho. "Allons, le héros gagne, bien sûr."

"Quoi ?" dirent Severus, Minerva et Harry.

"Eh bien, il semble certainement nous sommes coincés," dit Dumbledore, souriant gaiement. "Mais Poudlard a besoin d'un professeur de Potions maléfique, ou ce ne serait pas une véritable école de magie, n'est-ce pas ? Alors que diriez-vous si le professeur Rogue était horrible uniquement envers les étudiants de cinquième année et plus ?"

"Quoi ?" dirent-ils tous les trois.

"Si ce sont les victimes les plus vulnérables qui vous inquiètent. Peut-être que vous avez raison, Harry. Peut-être que j'ai oublié, au fil des décennies, ce que c'est que d'être un enfant. Alors faisons un compromis. Severus continuera de décerner injustement des points à Serpentard et de faire régner une discipline molle sur sa Maison, et il sera horrible envers les étudiants non-Serpentard de cinquième année et plus. Pour les autres, il sera effrayant, mais il ne les malmènera pas. Il promettra de ne lire l'esprit des étudiants que lorsque leur sécurité rendra cet acte nécessaire. Poudlard aura son professeur de Potions maléfique, et les victimes les plus vulnérables, comme vous le dites, seront en sécurité."

Minerva McGonagall était plus choquée qu'elle ne l'avait jamais été de sa vie. Elle jeta un regard incertain à Severus, dont le visage était devenu complètement neutre, comme s'il ne pouvait pas décider de l'expression qu'il était censé afficher.

"Je suppose que c'est acceptable," dit Harry. Il avait un voix étrange.

"Je suis tout à fait en faveur de cette idée," dit lentement Minerva. Elle était tellement en faveur que son cœur cognait follement sous ses robes. "Mais que pourrons-nous bien dire aux élèves ? Ils ne se sont peut-être pas posé de questions pendant que Severus était... horrible envers tout le monde, mais -"

"Harry peut dire aux autres étudiants qu'il a découvert un terrible secret concernant Severus et qu'il a fait un peu de chantage," dit Dumbledore. "C'est vrai après tout ; il a découvert que Severus lisait les esprits, et il nous a certainement fait du chantage."

"C'est de la folie !" explosa Severus.

"Bwah ha ha !" dit Dumbledore.

"Ah..." dit Harry d'un ton incertain. "Et si quelqu'un me demande pourquoi les cinquième année et plus se sont fait avoir ? Je ne leur en voudrais pas s'ils devenaient furieux, et ce n'est pas vraiment moi qui ai décidé que -"

"Dites-leur," dit Dumbledore, "que ce n'est pas vous qui avez suggéré le compromis, que c'est tout ce que vous pouviez obtenir. Puis refusez d'en dire plus. Cela aussi sera vrai. C'est un art, vous l'apprendrez avec la pratique."

Harry hocha lentement la tête. "Et les points qu'il a enlevés à Serdaigle ?"

"Ils ne doivent pas être rendus."

C'est Minerva qui avait dit ça.

Harry la regarda.

"Je suis désolée, M. Potter," dit-elle. Elle était désolée, mais ça devait être fait. "Votre mauvais comportement doit avoir quelques conséquences, ou cette école va tomber en morceaux."

Harry haussa les épaules. "Acceptable," dit-il. "Mais à l'avenir, Severus ne s'attaquera pas à mes liens avec ma Maison en m'ôtant des points, et il ne gâchera pas mon temps précieux avec des retenues. S'il se trouve que mon comportement mérite une correction, il fera part de ses préoccupations au professeur McGonagall."

"Harry," dit Minerva, "continuerez-vous de vous soumettre à la discipline de cette école, ou serez-vous maintenant au-dessus de la loi, comme Severus l'était ?"