Выбрать главу

Walter dicta quelques notes au Scrutateur pour les inclure dans le programme de formation des chasseurs.

« À présent que nous avons connaissance de ce réflexe, nous devrions faire de meilleures Chasses. Ça devrait être facile de trouver un Bronco qui fasse le mort quand on a les coordonnées du dernier endroit où il a été vu. Et plus facile encore de le tuer. »

Val opina.

Le Biotech ramassa ses papiers et son mannequin. Avant de partir, il émit une suggestion : « Si jamais vous rencontriez un Bronco vivant, vous pourriez simplement ligaturer la carotide principale et l’amener au labo pour qu’on l’étudié. »

Walter interrompit sa dictée : « Comment s’y prend-on ?

— Vérifiez les cals sur la paume de ses mains. Si sa main droite présente une kératose plus importante, vous pouvez en déduire qu’il s’agit d’un droitier. Son hémisphère cérébral gauche sera donc prédominant. Faites une incision dans le cou, du côté gauche, et ligaturez la carotide interne de ce côté… cela devrait résulter dans une embolie cérébrale partielle. Il restera vivant, mais ne sera guère plus qu’un légume… sujet idéal pour les gars du Bio. Il y a un tas de paramètres concernant les cinq-orteils que nous devrions mieux connaître avant qu’ils ne s’éteignent complètement.

— C’est juste. Excellente idée », fit Val.

Walter n’alla pas plus avant dans sa dictée.

Kaïa ouvrit les yeux dans un nid étranger. La pouliche baignait ses plaies et changeait ses pansements fréquemment. Les douleurs dans sa poitrine, à l’endroit traversé par la flèche, le replongeaient par moments en hibernation. Elle lui fit ingurgiter des coquillages bouillis et de la soupe d’orge reconstituante. Elle était dans sa phase folliculaire et avait besoin d’un partenaire.

La nuit, elle vint le chevaucher, voracement. Mais elle ne parvint pas à provoquer son érection, car sa blessure au thorax empêchait la polarisation de ses parasympathiques en irritant son nerf vague droit. À la nouvelle lune, elle entra en phase lutéale et disparut dans le canal.

Pendant deux semaines, il se nourrit de déchets qu’il ramassait péniblement dans l’herbe de la berge. Estropié comme il l’était, il ne pouvait prendre le risque de s’exposer aux détecteurs de Broncos qui surveillaient les jardins : si les chasseurs le retrouvaient, jamais il ne pourrait leur échapper.

À la pleine lune, elle revint, les ovaires gonflés, l’ovule précédent avait attendu vainement, et était mort. Un nouveau allait bientôt prendre place dans la trompe. Elle désirait son sperme. Il bénéficia d’une nourriture chaude et de nuits brûlantes. Quand elle fut fécondée, le corps jaune lutéinique gouverna à nouveau son humeur. Elle quitta le nid un matin, lui jeta deux coquillages pris au fond du canal, et s’éloigna à la nage, sans rien dire.

Il regagna clopin-clopant le mont de Filly.

Il faut toujours rester un peu sur sa faim :

Garder une place pour son prochain.

KAÏA LE BRONCO.

Depuis plusieurs mois, le calme régnait au Contrôle des Chasses. Les milliers de kilomètres carrés de jardins du Pays Orange avaient connu une floraison, une moisson, et une nouvelle floraison sans qu’on signalât un Bronco, ou presque. Les appareils de Chasse, dans leurs rapports, parlaient de campements déserts : des os mâchonnés et carbonisés, des cendres, des outils cassés. Aucune trace du gibier.

Val plaisanta sur cette accalmie : « Avec Jupiter en Sagittaire, on aurait pu s’attendre à de meilleures Chasses. »

Walter se renfrogna. Le surnaturel n’était pas un sujet de plaisanterie. Il y eut un moment de silence tendu, puis le vieil homme parla.

« Il n’y a là rien qui prête à rire. Depuis dix ans que je suis au C.C., j’ai appris à observer les cycles d’activité et de migration particuliers aux Broncos. Leurs chamans suivent le mouvement des planètes : c’est une obligation, les saisons sont importantes pour eux, à cause des récoltes. Et ils dorment sous les étoiles. Les citoyens de la fourmilière peuvent se moquer de l’astrologie, la Grande S.T. les protège. Et, de toute façon, les horoscopes sont erronés car établis par une machine qui ne fait pas attention aux cieux. Mais mes diagrammes sont sérieux. Et utiles pour la chasse. J’essaie de devancer les mages broncos. Je pense qu’en ce moment ils se cachent parce que Jupiter est en Sagittaire. Ils croient que c’est un signe favorable pour les chasseurs. Davantage de citoyens vont demander à participer à une Chasse après avoir vu leur horoscope ; ils ont donc raison d’éviter de se faire repérer.

— Alors, nous allons avoir droit à un long repos, car Jupiter va rester dans ce signe un bon bout de temps », dit Val en riant sous cape.

Walter se contenta de grommeler et de tousser. Il ouvrit une boîte contenant des artefacts ramassés dans des campements broncos. Les perles éveillèrent son intérêt. Il souleva une cordelette intacte sur laquelle étaient enfilées des perles noires, une perle annelée à une extrémité et quatre perles colorées au centre.

« Et ça, qu’en dis-tu ?

— Symbole tribal… suggéra Val.

— Et si ça représentait un calendrier basé sur les planètes et les signes du zodiaque ? Si la perle annelée est Saturne, la grosse blanche, ici, pourrait être Jupiter en Sagittaire… »

Val hocha la tête, à demi intéressé. « Mais il y a trois autres perles à côté de la grosse blanche ; or, d’après mes cartes célestes, la conjonction de quatre planètes ne s’est pas produite. » Il sortit les prévisions concernant les futures positions des planètes. Rien ne correspondait à la disposition des perles, autant qu’il pût en juger, et ces prévisions portaient sur plusieurs siècles. « S’il s’agit d’une conjonction, elle aura lieu dans très longtemps d’ici. Je ne vois pas en quoi cela peut intéresser les Broncos… bien que la conjonction de quatre planètes soit toujours un événement important pour certains.

— Sagittaire… Le chasseur ou le chassé ? » murmura Walter.

Mais déjà Val se désintéressait du problème. Il dressait allègrement un horoscope qui devait l’aider dans son choix d’une émission récréative. Walter referma sa boîte d’artefacts avec un bang importun.

« Bon ! s’écria-t-il. Nous en avons terminé pour aujourd’hui avec ces problèmes. Allons chez moi pour une fusion. »

Val déclina l’invitation.

« Pas ce soir. Je vais chasser les rats dans l’entre-murs, pour récolter un supplément de savorisées.

— Ce sera pour la prochaine fois, alors. Bitter-Femme a demandé de tes nouvelles. »

Ils partirent chacun de leur côté. Val détestait la fusion. Frotter son âme contre celle de n’importe qui l’irritait fortement. Il se heurtait avec les polarisés et les neutres l’ennuyaient. Walter, quant à lui, appréciait sa famille-5 et tous les petits agréments de cette intimité. Il acceptait volontiers les étreintes rituelles de Bitter-Femme et parlait travail avec Jo Jo et Busch le Grincheux. Arthur-Neutre organisait les divertissements familiaux. Une famille-5 des plus harmonieuses.

Dans sa cabine, Val vérifiait son équipement de chasse au rat. La combinaison était bien usée. Elle lui avait déjà servi à capturer quantité de calories. Il changea les filtres à poussière et vérifia les piles. La lampe frontale et le transmetteur étaient toujours en état de marche, mais leur quotient de fiabilité était assez bas. Il prit son sac à gaz anoxique et monta jusqu’aux grilles, à mi-spirale.

« Niveau trente-cinq, O. K. ? demanda-t-il à la cité.

— Allez-y, dit la cybercité. Je ne vous perds pas de vue. »