« Par Olga ! c’est le jardin d’Eden ! » s’exclama Moon ; et, chose rare, il sourit. Avisant un pis bien gonflé, il prit le biberon du petit Moon et s’avança vers la « Nourrice ». Le biberon fut vite rempli. Petit Dan eut même droit à sa part.
En se grattant la tête, Moon marmonna : « Comment cela peut-il s’expliquer ? »
En l’entendant, les chèvres vinrent vers lui.
Soudain, une voix l’appela, en provenance d’un bouquet de saules terrestres. Moon grogna et ramassa un bâton. Suivi de Dan, il se dirigea vers les arbres. Ils traversèrent un torrent glacé sur des pierres glissantes.
« Je croyais que je devais être seul dans cet avant-poste… »
Il vit un objet qu’il connaissait bien. Un cyberjavelot, une des sondes détachées par Olga, planté dans la terre meuble et entouré de plantes grimpantes.
« Je suis un robot de compagnie, fait pour être porté. Ramasse moi », dit le cyber.
Moon sourit et lâcha la branche noueuse dont il s’était muni.
« Je sais, dit-il en le dégageant. À quoi t’es-tu occupé pendant toutes ces années ?
— À veiller sur ta nouvelle demeure, et à te faire des amis. Ces chèvres se sont habituées à la voix humaine. Bienvenue sur Tiercelet, le pays des faucons.
— Merci pour ton accueil », dit Moon. Il regarda Dan et le chiot qui gambadaient parmi les chèvres folâtres.
Ensuite, il s’assit dans l’herbe, adossé au M.O.S., et cala ses pieds sur le dos musculeux et couturé de Dan. Une chèvre vint brouter dans sa main. Il se tourna vers le cyberjavelot et ajouta : « Et merci pour les amis que tu m’as faits. L’homme a besoin d’avoir de nombreux amis, dans la mesure où ils ne sont pas de son espèce. »
Là-bas, sur la Terre, Gitar poursuivait ses incursions dans la fourmilière, utilisant l’effet I.T.A.R. pour attirer les hétérozygotes. Les derniers jours de Walter dans le temple furent idylliques : il servait Olga. Quand il mourut, Gitar prit soin d’entreposer son âme-gène-A.D.N. dans un cube-trophée. Walter savait qu’Olga lui rendrait vie, à son prochain retour. Sa copie génétique serait un jour auprès de la déesse.
Dans des embarcations à rames, les cinq-orteils coururent les mers et s’essaimèrent sur les îles et les continents.