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Ou bien :

« Tenez ! Lisez donc ça !… Dès qu’il s’agit de De Gaulle, le fiel envahit la salade ! »

« … Et cet écrivaillon !… Il plonge sa mesquinerie dans l’encrier et il rapetisse tout ce qu’il touche !… »

* * *

À l’occasion d’un voyage en province, des journalistes entourent le Général de Gaulle, et celui-ci les apostrophe :

« Heureusement, Messieurs, que je dispose de vos journaux pour apprendre ce que je pense… »

* * *

Devant les hauts responsables du Rassemblement du Peuple français, réunis fin Novembre 1953, de Gaulle, une fois de plus, vitupère les « potiches » qui prétendent exercer le pouvoir :

« Savez-vous qui nous gouverne ? Eh bien je vais vous le dire ! Le ministre des Affaires étrangères, c’est Foster Dulles ; le ministre de la Défense nationale, c’est le général Eisenhower ; le ministre de la Reconstruction, c’est l’abbé Pierre ; et le président du Conseil, c’est GARAP[5] ! »

* * *

L’hiver de 1953 est particulièrement rude… On relève, sous les ponts, des sans-abri morts de froid… Sous l’impulsion d’un homme admirable, la charité s’organise.

De Gaulle fait des rapprochements :

« Sans le froid, pas d’abbé Pierre… Quand la France aura froid, je pourrai agir aussi. »

* * *

En ce mois d’avril 1954, la guerre d’Indochine tourne au désastre…

Éloigné des affaires de la France depuis janvier 1946, le Général de Gaulle suit les événements avec colère et tristesse. À Jean-Raymond Tournoux il confie :

« Vous verrez que nous nous serons battus pendant des années en Indochine pour garder le droit de visiter les ruines d’Angkor ! »

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En riposte à la nationalisation du canal de Suez annoncée, le 26 juillet 1956, par le colonel Nasser, un corps expéditionnaire franco-anglais investit Port-Saïd et menace Suez et le Caire. Mais, suite aux injonctions des États-Unis que l’on a « omis » d’informer, l’opération tourne court lamentablement.

Peu de temps après, à J.R. Tournoux qui évoque devant lui l’affaire, de Gaulle répond :

« Elle partait d’une bonne intention. Pour une fois que l’on faisait quelque chose ! Mais l’opération eut exigé une préparation parfaite, sur le plan politique et militaire… De toute façon, le régime perdra tout ! Il a perdu l’Indochine, la Tunisie, le Maroc. Il perdra l’Algérie et le Sahara. Le système perdra aussi l’Alsace, la Lorraine, la Corse, la Bretagne. Il nous restera l’Auvergne, parce que personne n’en voudra ».

* * *

Entre 1947 et 1958, le « régime des partis » donne toute la mesure de son inaptitude à gérer les affaires de la France, et de Gaulle ne décolère pas.

Jean-Raymond Tournoux a noté quelques-uns des qualificatifs dont le Général affubla les politiciens du moment :

« … Ces tristes joueurs d’une sombre comédie, ces danseurs d’un ballet d’ombres chinoises, ces neurasthéniques à vie, ces trotte-menu de la décadence, ces chevrotants de l’abandon, ces fuyards professionnels, ces aigrefins, ces débrouillards de la déchéance, ce chloroforme de l’euthanasie nationale, ces cloportes de marécages, ces coureurs de maroquins, ces voraces qui se mangent la laine sur le dos les uns des autres… — Et, à les en croire, c’est grâce à eux que les machines tournent, que le blé pousse, que le soleil brille et que la pluie tombe… »

* * *

À l’aube de 1958 et conscients (tout de même) qu’un « système » qui ne produit que des crises ministérielles à répétition n’est pas le meilleur qui soit, des parlementaires, ici et là, proposent (timidement) des « réformes » de la constitution.

Ces projets sans consistance amusent de Gaulle :

« Ils me font penser à ces artistes en chirurgie esthétique qui effacent les rides du visage sans rajeunir le corps. »

* * *

À un visiteur reçu en audience, en mai 1958, le Général confie :

« Les Français ne pensent qu’à bouffer et à améliorer leur niveau de vie. Le bifteck-frites, c’est bon. La 4 CV, c’est utile. Les vacances, c’est chouette. Mais tout cela ne constitue pas une ambition nationale. »

… Un commentaire qui rejoint cet autre, plus connu :

« Comment voulez-vous gouverner un pays qui s’enorgueillit de posséder 265 variétés de fromages ?… »

* * *

Le 31 mai 1958, de Gaulle s’installe, avec ses collaborateurs, à l’hôtel Lapérouse qui se met, aussitôt, à ressembler à une fourmilière. Tous ceux qui veulent offrir leurs services, ou se rappeler au bon souvenir du Général hantent les couloirs et les chambres transformées en bureaux.

Ce remue-ménage n’est pas sans agacer de Gaulle, et cela retombe sur l’actif et fidèle Olivier Guichard, qui est partout à la fois :

« Qu’est-ce que fait Machin dans l’escalier ? Ça fait trois fois que je le rencontre !

— Justement, mon Général, il pourrait nous être utile…

— Bon. Alors il entre ou il sort ?

— Ça serait bien de l’avoir avec nous.

— Alors prenez-le ! Et qu’il cesse d’être dans mes jambes ! »

* * *

Le Général de Gaulle, on le sait, détestait le téléphone. Un jour, en tête-à-tête, je lui en avais demandé la raison. Il m’avait répondu :

« On ne me sonne pas comme un cheval-trompette. »

* * *

À l’hôtel Matignon, ce 13 juin 1958, le nouveau Président du Conseil, Charles de Gaulle, va prononcer sa première allocution radiotélévisée depuis son retour aux affaires.

En tant que chargé de mission à son Cabinet et Chef de son service de presse, j’ai à charge de veiller sur la qualité de cet enregistrement capital. J’ai choisi le bureau de Jacques Foccart, en raison de la grande bibliothèque qui en occupe le fond et de son absence totale de glaces.

Les techniciens sont là. On place les caméras…

Je sais que ce ne sera pas facile. Georges Pompidou, son Directeur de Cabinet, m’a prévenu : « Vous verrez, Ragueneau, il ne voudra même pas se laisser maquiller… » (Bon, on peut toujours essayer…)

Le Général fait son entrée dans ce studio improvisé et, du premier coup d’œil, il repère la maquilleuse :

« Qui est cette dame ?

— La maquilleuse, mon Général.

— Vous n’y pensez pas, Ragueneau ! Je ne suis pas une starlette !

— Mon Général, la question n’est pas là. J’accomplirais bien mal ma tâche si je ne faisais pas en sorte que votre passage, à la télévision, soit, pour les Français, aussi marquant que possible. Un nez qui brille n’a jamais amélioré une image de marque…

— Une image de marque ? Mais je ne suis pas non plus une savonnette !

— Très bien. Les téléspectateurs seront fascinés par votre nez qui brille et n’écouteront que la moitié de ce que vous voulez leur dire. »

Il me lance un regard furieux, réfléchit, et bougonne :

« Bon. Allez-y !… De toute façon, vous n’en ferez jamais qu’à votre tête ! »

Et la maquilleuse lui poudra le nez en tremblant comme une feuille…

* * *

Le quatrième voyage du Général en Algérie, après son retour au pouvoir en 1958, fut appelé « la tournée des popotes » car, du 3 au 7 décembre de cette année-là, il rendit essentiellement visite aux unités engagées, notamment à Télergma, Aïn-Abid, Ouenza, Tebessa et Edjelé.

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5

GARAP était le symbole, sans aucune signification, d’une campagne voulant démontrer que la curiosité est un support majeur de la publicité.