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Quelques jours plus tard, il lui disait :

« Et souvenez-vous que, jusqu’à nouvel ordre, nous sommes trop faibles pour n’être pas intransigeants. »

* * *

Ce soir de blitz, sur Londres en guerre, de Gaulle et ses collaborateurs sont descendus dans l’abri de Carlton Gardens car les bombardiers allemands cognent dur sur la cité…

On bavarde, en prenant le thé.

De Gaulle, du regard, fait le tour de ses compagnons :

« Vous, vous avez du mérite parce que vous avez préféré, à l’esclavage, la lutte sans espoir. Moi, je n’en ai aucun parce que je sais que nous vaincrons… »

* * *

Le 1er septembre 1941, de Gaulle regagne Londres après un périple de cinq mois et demi dans le Moyen-Orient et l’Afrique. Il se trouvait au Caire lorsque, le 22 juin, l’Allemagne a déclaré la guerre à l’Union soviétique et, bien qu’il se soit tenu informé des opérations à chacune de ses étapes, il a hâte de connaître le sentiment du Haut Commandement allié.

Au Grand Quartier Général, où il s’est rendu, on lui montre, sur les cartes, l’irrésistible avance des armées nazies. Les villes russes tombent les unes après les autres. Rien ne semble pouvoir arrêter le déferlement des blindés allemands…

On demande au Général de Gaulle ce qu’il pense de cette situation.

« Je ne me fais aucun souci pour les Russes… (Il marque une pause.)… Mais je crois, par contre, qu’il faudra bientôt songer aux moyens d’arrêter la progression communiste en Europe… »

Et il ajoute :

« Je me trompe parfois dans ce que je fais, mais jamais dans ce que je prédis. »

* * *

Petit duel au sabre d’abordage, à Londres, en 1942 :

Winston Churchill :

… « Enfin, c’est insensé ce que vous prétendez là ! Vous vous prenez pour la France ! »

Charles de Gaulle :

« Et si je ne suis pas la France, pourquoi discutez-vous avec moi ? »

* * *

Après la campagne de Tunisie, début 1943, Roger Carcassonne-Leduc se rend à Londres, et comme il a joué un rôle important dans la préparation et l’exécution du « Coup d’État » qui, à Alger et à Oran, notamment, a facilité le débarquement allié, de Gaulle le reçoit pour l’interroger sur la situation en Afrique du Nord.

Au cours de la conversation, Carcassonne-Leduc est amené à préciser qu’il se trouvait, bien avant le débarquement, sous les ordres du Colonel Clouet des Perruches, à la 6e D.L.M., et de Gaulle l’interrompt : « Je le connais, votre Clouet des Perruches ! Il a le culot d’avoir deux centimètres de plus que moi ! »

* * *

Le 25 août 1944 au soir, de Gaulle, qui vient d’arriver à Paris, ordonne au Général Leclerc de prendre toutes dispositions utiles pour défiler, à la tête de la 2e D.B., le lendemain 26, de l’Arc de Triomphe à Notre-Dame.

Le Général américain Gerow, sous les ordres de qui a été placée la 2e D.B., réagit brutalement et fait porter à Leclerc un contrordre péremptoire : « … Les troupes placées sous votre commandement ne participeront à aucun défilé à moins d’en avoir reçu l’ordre signé de moi personnellement. »

Pris entre deux feux, Leclerc escorte l’émissaire de Gerow jusqu’au Général de Gaulle qui lui déclare, superbement :

« Rappelez au Général Gerow que je lui ai prêté Leclerc, mais qu’il me semble que je peux le lui reprendre pendant quelques heures. »

* * *

Le 28 octobre 1944, le Chef du gouvernement provisoire impose la dissolution des « milices patriotiques », largement dominées par le parti communiste. Les armes individuelles devront être remises dans les quarante-huit heures aux autorités militaires.

À ceux de son entourage qui s’inquiètent des réactions du P.C., de Gaulle répond :

« Les communistes ne sont pas dangereux. Tout au plus des roseaux peints en fer… Et puis on ne fait pas de révolution sans révolutionnaires ! Et il n’y a qu’un révolutionnaire, en France : c’est moi. »

* * *

Au Comité directeur du R.P.F., certains insistent pour que de Gaulle se présente lui-même aux élections législatives de 1951.

« Votre présence au parlement, dit quelqu’un, serait d’un tel poids que tout deviendrait possible ! »

De Gaulle se tourne vers lui :

« Sincèrement, vous voyez le Général de Gaulle demander à Édouard Herriot la permission de prendre la parole ? »

À Jacques Soustelle. Secrétaire général du R.P.F., il dira :

« Vous me voyez mettre mon petit chapeau dans ma petite armoire au vestiaire du Palais-Bourbon ? »

À la réunion suivante, d’autres membres du Comité directeur plaident pour que de Gaulle fasse publiquement connaître le programme que les candidats du R.P.F. auraient à défendre.

De Gaulle les regarde pensivement :

« Vous devriez le savoir : il n’est pas possible de se faire élire sur un programme et de l’appliquer. Car le choix est simple : ou l’élu trompe ses électeurs, ou il trompe l’intérêt de son pays. »

* * *

Louis Vallon, Délégué à l’action professionnelle et sociale du R.P.F. et le Général s’entretiennent du temps présent, évoquent le temps passé, fustigent les adversaires d’hier, brocardent les ennemis d’aujourd’hui…

« À Londres, dit le Général, j’étais comme un roc que venaient battre les vagues. Je me retrouve, aujourd’hui, dans la même situation mais, en face de moi, je n’ai plus que des vaguelettes…

* * *

Le 12 juin 1954, le gouvernement de Joseph Laniel est renversé (un de plus, un de moins, les Français n’y prêtent plus guère attention), et Pierre Mendès France est appelé à en former un autre (qui chutera, lui aussi, sept mois plus tard).

Pressenti pour faire partie de la fugace équipe gouvernementale, le Général Kœnig, très tenté malgré tout, vient prendre l’avis du Général au siège du R.P.F., 5, rue de Solférino.

Il entre chez le Général, vide sa musette, écoute et ressort.

André Astoux, Chargé de mission du Rassemblement, qui se trouvait dans le bureau voisin, est curieux de connaître le résultat de l’entrevue, et Kœnig le lui livre :

« Le Général de Gaulle m’a dit : Kœnig, je ne vous demande pas de ne pas être ministre : je ne vous demande pas, moi, d’être ministre. Vous saisissez la différence ?…

— Alors, conclut Kœnig, j’avais compris. Je ne serai pas ministre. »

* * *

Revenu « aux affaires » sur la vague écumante des événements d’Alger, Charles de Gaulle reçoit. À Matignon. Et ce jour-là, c’est le tour des dirigeants de la C.F.T.C. (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens) : Théo Braun, Bouladoux, Jeanson, Levard.

Il revient à Levard d’exposer les préoccupations des syndicats chrétiens :

« Mon Général, comme nous l’avons déjà dit à l’un de vos prédécesseurs… »

De Gaulle lui coupe la parole :

« Le Général de Gaulle n’a pas de prédécesseurs. »

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Au député Bettencourt qui lui confie, à l’occasion d’un voyage en Normandie :

« Pour le présent, nous sommes tranquilles. C’est pour l’avenir que nous avons des inquiétudes », de Gaulle répond :

« Eh bien, messieurs, faites un autre de Gaulle. »

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