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Après un long trajet, il regagna les environs du forum entre le Capitole et le Palatin, où il se reposa en attendant le dernier quart de l'aube, quand il versa le chargement dans un coin obscur de la voie publique, et retourna tranquillement à son sommeil de chaque nuit.

Dans la matinée, le cadavre de Saul fut facilement Identifié et, quand le sénateur envoya chercher l'affranchi pour faire des déclarations, il fut surpris par cette nouvelle, se demandant quelles pouvaient être les raisons de ce décès inattendu et étrange. Abasourdi par l'engrenage des mécanismes de la justice divine, il demanda à sa propre conscience si Saul ne serait pas de ces criminels immédiatement jugés par la loi des compensations sur le chemin infini des destinées.

Son cœur, plus que jamais incliné à l'examen des profondes questions philosophiques, se perdait dans un abîme de conjectures et se rappela la recommandation de l'esprit de Flaminius et les leçons élevées d'Anne, calquées sur l'Évangile : il cherchait avec la meilleure bonne volonté du monde à résoudre le problème du pardon et de la pitié. Désireux de satisfaire sa propre conscience dans les activités quotidiennes, il contraria ses traditions et ses habitudes face à cet événement, et se dirigea à la résidence du bourreau de ses fils pour prendre toutes les mesures pour que la décence et le respect ne lui fassent pas défaut lors des cérémonies funèbres. Quelques esclaves et serviteurs de confiance furent habilités à résoudre tous les problèmes concernant les affaires laissées par le défunt, et en participant aux obsèques, Publius Lentulus se sentit satisfait de vaincre son aversion personnelle, rendant hommage en même temps à la mémoire de Flaminius.

Se trouvant avec sa nouvelle compagne dans l'Avenio, Pline Sévérus apprit, par l'intermédiaire d'amis, la tragédie qui s'était déroulée à Rome la nuit de son absence, et fut également informé des funestes doutes qui planaient à son respect. Profondément touché dans ses sentiments en se souvenant de son frère qui, tant de fois, lui avait témoigné les plus grandes preuves d'affection, il désira retourner à Rome pour éclaircir correctement l'affaire et venger sa mort. Mais les bras d'Aurélia le firent faiblir et se méfiant du jugement du vieux sénateur respecté comme un père, outre les soupçons que lui causaient la nouvelle de l'inexplicable maladie de sa femme, il se laissa aller à sa vie incompréhensible à travers l'Avenio, Massilia, Arelate14, Antipolis15 et Nice, cherchant à oublier dans le vin des plaisirs, les grandes responsabilités qui lui incombaient.

Aujourd'hui Arles. (NDT)

Antibes (NDT)

Auprès d'Aurélia, la vie de l'officier s'écoula pendant trois longues années dans une tranquillité répréhensible quand un beau jour, il eut la pénible surprise de trouver sa compagne perfide et insensible dans les bras du musicien et du chanteur Sergius Acerronius, arrivé à Massilia avec les bruyantes joies de la capitale de l'Empire.

En ce jour amer de son existence, l'arme à la main, le fils de Flaminius saisit la femme traîtresse, disposé à lui ôter sa vie criminelle et décadente. Pourtant à l'instant de sa vengeance, il pensa qu'assassiner une femme, bien que diaboliquement perverse, ne devait pas faire partie de sa vie, et il se dit que la laisser vivre le chemin scabreux de ses cruautés serait la meilleure vengeance de son cœur trahi et malheureux.

Il abandonna, alors, pour toujours, cette misérable créature qui fut éliminée plus tard à Anzio, par le poignard implacable de Sergius qui ne put tolérer son infidélité et son obstination dans le vice.

Se sentant alors seul, Pline Sévérus réfléchit amèrement aux tapageuses erreurs de sa vie. Il revit son passé fait de futilités condamnables et d'attitudes folles. Presque pauvre, il était à présent trop misérable pour retourner à Rome où tant de fois il avait brillé dans sa jeunesse dans des aventures prodigues et heureuses.

En vain le sénateur lui avait envoyé des appels affectueux. Blessé dans son honneur par les douloureuses leçons de sa destinée et soutenu par quelques amis à Rome, l'officier préféra s'efforcer de se réhabiliter dans des villes en Gaules où il demeura pendant de longues années à réaliser un travail silencieux et rude pour redresser l'honneur de son nom devant ses parents et ses amis les plus proches.

Alors qu'il entrait déjà dans l'âge mûr des profondes réflexions, il fit un gros effort de réhabilitation, loin des êtres qui lui étaient les plus chers.

Quant au vieux sénateur, il résista avec énergie aux coups durs du destin grâce à sa forte structure spirituelle. Il faisait des luttes de chaque jour un véritable chemin d'élucidation et vit ainsi passer les années sans découragement et sans oisiveté.

Depuis les tragiques événements où Agrippa et Saul avaient perdu la vie mystérieusement et avec l'abandon définitif de son mari, Flavia Lentulia avait la santé à jamais ébranlée. Sur son épiderme, les marques

provoquées par les poisons d'Athée avaient disparues, vaincues par les substances médicamenteuses appliquées, mais la lumière de ses yeux s'était éteinte pour toujours. Découragée et aveugle, elle trouva néanmoins dans le cœur généreux d'Anne, l'affection maternelle qui lui manquait en de si pénibles circonstances.

Quant au sénateur, sa constitution physique résistait à tous les choques et malheurs.

Entre les efforts aimants pour assister sa fille et les combats politiques qui lui demandaient la plus grande attention, les jours calmes et tristes s'écoulaient comme toujours pleins de luttes ingrates. Il avait maintenant à l'esprit les meilleures dispositions qui soient et les plus sincères pour appréhender l'essence sacrée des enseignements du christianisme et c'est ainsi que son cœur pénétra le crépuscule de la vieillesse comme si les ombres étaient éclairées par des étoiles caressantes et douces. Au fond de lui, il gardait une sérénité imperturbable, mais dans sa vie d'homme du monde, il était animé du souffle inquiet de l'effort pour les réalisations de son temps. Son cœur était résigné face aux fâcheuses désillusions de la destinée, mais au pouvoir suprême de l'Empire il y avait un tyran qui devait tomber au profit de l'édification du droit et de la famille ; et c'est ainsi qu'avec de nombreux compagnons, il se livra au travail subtil de la politique interne pour arriver à la chute de Domitius Néron qui continuait à assujettir la cité avec les odieux spectacles de son règne infâme.

Caius Pisan, Sénèque, ainsi que d'autres personnalités vénérables de l'époque, plus exaltées de patriotisme et d'amour pour la justice, tombèrent entre les mains criminelles du scélérat qui ceignait la couronne. Mais Publius Lentulus, aux côtés d'autres frères d'idéal qui travaillaient en silence et dans l'ombre de la diplomatie secrète auprès des militaires et du peuple, guettait la mort ou le bannissement du tyran, en attendant les clartés de l'avenir survenues avec le règne éphémère de Sergius Sulpicius Galba qui, aux dires de Tacite, aurait été par tous considéré comme digne du gouvernement suprême de l'Empire, s'il n'était pas devenu Empereur.

LA DESTRUCTION DE JÉRUSALEM

Depuis l'an 58, plus de dix années silencieuses et tristes s'étaient écoulées dans la vie quotidienne des personnages de cette histoire.

Ce ne fut qu'en 68, que la politique conciliante d'un grand nombre de patriciens, dont Publius Lentulus, réussit à obtenir l'éloignement définitif de Domitius Néron et ses infâmes cruautés. Toutefois, l'ascension de Galba ne dura que quelques mois et en l'an 69, la vie de l'empire allait être marquée par de grands événements.

De nombreuses luttes frappèrent la cité de terreur et de sang.