Выбрать главу

» Quand l’humanité a quitté la Vieille Terre pour les étoiles, elle ne les a pas laissés sur derrière elle. Elle les a emportés. Exportés. »

Tanya s’interrompit de nouveau pour consulter son unité de com. « L’Indomptable affirme nous dévions de la trajectoire directe.

— Vers quelle destination ? Où mène ce nouveau vecteur ?

— Aucune idée. » Les yeux de Tanya cherchèrent les siens. « Le message a été coupé au beau milieu. On brouille nos communications. »

Deux

La mine sévère, Geary pianota sur le panneau de com de son accoudoir. « La pilote ne répond pas.

— Ici non plus, déclara Tanya en raclant le sien du poing. Que crois-tu qu’ils mijotent ?

— Ne viens-tu pas de dire que l’Indomptable nous pistait ?

— En effet. » Elle eut un mauvais sourire. « Si je connais bien mon équipage, et je le connais mieux que personne, mon croiseur doit être en train d’accélérer pour intercepter cette navette au plus vite. »

Leur véhicule fit une brusque embardée vers le haut et tribord. « Manœuvre évasive, reconnut Geary en consultant à nouveau son unité de com. Les sous-programmes antibrouillage de mon unité de com ont repéré quelque chose. »

Desjani étudia la sienne. « Les miens aussi. Ils ont trouvé un chemin au travers jusqu’à un récepteur, mais ce n’est pas celui de l’Indomptable. Oh, bon sang ! C’est interne.

— La console de commande de la navette ? suggéra Geary.

— Probablement. Nous pourrions sans doute bidouiller les commandes si nous établissions le contact, mais nos unités ne peuvent pas se connecter aux systèmes terrestres. Ça ne nous mènera nulle part. »

La navette tangua vers bâbord.

Tanya fronça les sourcils puis se tourna vers Geary. « Si elle cherche à éviter l’Indomptable, pourquoi ne plonge-t-elle pas dans l’atmosphère ?

— Tu crois qu’il y a… »

Le panneau de Geary s’illumina soudain, révélant une femme assise dans le siège du mécanicien de bord. « Quoi que vous cherchiez à faire, soyez aimable de cesser immédiatement. Les signaux que vous émettez perturbent nos systèmes.

— Alors cessez de brouiller nos communications, exigea Desjani avant que Geary eût pu réagir.

— Vos communications ? » La femme parut sincèrement intriguée quand elle consulta ses voyants. « Oh ! Nos systèmes furtifs sont automatiquement passés sur brouillage quand ils ont identifié vos signaux.

— En ce cas, outrepassez manuellement, ordonna Geary.

— En émettant des signaux, vous compromettez notre furtivité, se plaignit la femme. Votre vaisseau continue de modifier sa trajectoire pour nous intercepter. Vous devez sans doute encore transmettre des données de localisation en dépit de notre brouillage.

— Mon vaisseau n’a besoin d’aucune assistance pour vous filer, déclara Desjani. Vous ne pouvez pas l’esquiver. Je vous suggère instamment d’y renoncer. »

Le visage de la femme exprima de nouveau l’étonnement. « Esquiver votre vaisseau ? Nous ne cherchons nullement à l’éviter. »

Tanya fusilla son image du regard. « Alors qui cherchez-vous à fuir ?

— Nous ne le savons pas exactement, mais nos contrôleurs de vol au sol affirment qu’au moins deux autres appareils furtifs cherchent à nous approcher. Nous nous efforcerons d’en rester éloignés jusqu’à ce que nous ayons atteint votre vaisseau, tâche d’autant plus difficile que nous n’avons qu’une vague idée de leur position, et que l’interférence de vos systèmes avec les nôtres complique encore.

— Si c’est vrai, alors cessez de brouiller nos coms pour permettre à mon vaisseau de vous transmettre la position et les vecteurs de ces appareils, répondit Tanya d’une voix trahissant un profond scepticisme.

— Leur position et leur vecteur précis, ajouta Geary.

— Vous pouvez… ? » La mécano se tourna de nouveau vers le pilote pour lui parler très vite.

Les fonctions de sécurité du panneau étouffaient ses paroles et floutaient les mouvements de ses lèvres, mais Geary pouvait encore déchiffrer son expression, qui, d’intriguée, se fit très vite insistante puis exigeante. « Elle est en train de lire ses droits au pilote, persifla Geary.

— Bonne idée, rétorqua Tanya. Les pilotes ont bien besoin de ça de temps en temps. C’est le seul moyen de les ramener à la modestie. »

La femme se tourna vers Geary. « J’outrepasse le brouillage de vos coms et je déverrouille l’écoutille du poste de commande. Veuillez nous rejoindre pour vérifier avec nous les données que nous transmet votre vaisseau sur la position de ces appareils. »

Tanya déboucla ses sangles, ouvrit l’écoutille et fit signe à Geary de ne pas bouger. « Très bien. Ça a l’air sûr. Venez, amiral. L’équipage de la navette joue sans doute franc-jeu, mais je n’en ai pas moins un mauvais pressentiment. »

Le poste de commande ressemblait peu ou prou à celui d’une navette de l’Alliance. Sa conception d’ensemble devait dater d’avant l’envol des hommes pour les étoiles, se dit Geary. Il agrippa une poignée pour se stabiliser pendant que Tanya s’installait dans un siège libre près du pilote. « Je capte de nouveau des transmissions, annonça-t-elle. Indomptable, fournissez-moi une vue éloignée du voisinage de la navette. »

Elle tapota sur son unité pour activer la 3D et l’hologramme s’afficha au-dessus de sa main.

« Il y a trois Gorms ! cracha la mécanicienne. Et plus proches de nous que nous ne le croyions.

— Vous savez qui ils sont ? demanda Geary.

— Non. Mais ils devaient nous attendre là-haut. On s’est fait avoir, Matt, dit-elle au pilote.

— Ils devaient guetter tout ce qui décollait en direction du croiseur, convint-il. Une chance qu’ils aient eu autant de mal à nous repérer que nous à les distinguer.

— Mais votre vaisseau peut nous voir si facilement ? demanda la mécano à Desjani. Comment ?

— Vous attendez-vous vraiment à ce que je réponde à cette question ?

— Non, mais ça valait la peine d’essayer, n’est-ce pas ? »

Le pilote venait d’étudier son écran ; il pivotait à présent et grimpait légèrement pour esquiver le plus proche appareil furtif, qui se trouvait juste sous la navette et piquait dans sa direction. Le second, sur une orbite un peu plus haute, s’en écartait comme s’il la cherchait encore, et le troisième, plus bas, entreprenait à son tour de monter pour converger avec sa trajectoire. Tout autour, des dizaines d’autres spationefs, satellites, vaisseaux et navettes suivaient leur propre orbite ou trajectoire ; eux ne recouraient pas à la technologie furtive et ils tissaient dans l’espace un maillage serré sans se soucier des quatre appareils invisibles qui jouaient à cache-cache au milieu.

« Martien, affirma la mécano en pointant leur plus proche poursuivant.

— Tu es sûre ? demanda le pilote.

— Catégorique. La signature de ce coucou est martienne. Pas moyen de dire si les deux autres sont aussi des Rouges.

— Pourquoi des ressortissants de Mars nous pourchasseraient-ils ? s’étonna Geary.