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Tout en attendant des réponses ou des réactions à ses messages, Geary continuait d’observer les mouvements des vaisseaux de guerre et des cargos de réfugiés, mouvements qui, en raison des énormes distances qu’ils devaient parcourir, semblaient s’effectuer au ralenti. Pajari avait disposé la majeure partie de ses escorteurs disponibles en deux formations rectangulaires faisant chacune face à l’une des flottilles ennemies en approche. Les destroyers du neuvième escadron continuaient de recueillir des modules de survie à leur bord et d’en extraire les hommes et femmes qui les occupaient, jusqu’à pratiquement excéder leur capacité d’accueil, auquel cas ils filaient rejoindre le Formidable et l’Implacable pour transférer les prisonniers sur les croiseurs de combat, plus spacieux.

Il repéra la manœuvre avant que ne l’annonce le lieutenant chargé de la surveillance des combats. « Les croiseurs lourds accélèrent vers une interception de nos destroyers, amiral ! »

Quelques instants plus tard, il vociférait une nouvelle mise en garde : « Les deux flottilles de croiseurs légers accélèrent à leur tour pour mener des passes de tir sur les vaisseaux de réfugiés, amiral ! »

Treize

« Ils continuent de coordonner leurs opérations et de répondre aux ordres d’une autorité qui ne se trouvait pas à bord du cuirassé. » L’Inspiré et Geary étaient encore à cinq minutes-lumière de l’essaim des cargos et à près de dix de la région de l’espace d’où s’élançaient les croiseurs lourds ennemis pour s’en prendre aux croiseurs de combat et destroyers de l’Alliance. « Les croiseurs lourds ne sont qu’une diversion. »

Duellos acquiesça d’un hochement de tête. « Ils ne se presseront pas d’attaquer. Ils cherchent seulement à ce que vous concentriez votre attention sur eux plutôt que sur le sort que leurs croiseurs légers vont réserver aux cargos. Ils doivent vous croire sur le Formidable ou sur l’Implacable.

— Toujours est-il que je suis encore assez loin des escorteurs pour me trouver contraint de compter sur une réaction judicieuse de Pajari. » S’il cherchait à donner des ordres, déjà basés sur des informations vieilles de cinq minutes mais qui, de surcroît, en mettraient encore cinq autres à atteindre leur destinataire, il risquait de sérieusement compromettre la défense du convoi.

Les croiseurs légers arrivaient de deux directions différentes ; la flottille d’origine se composait de deux croiseurs légers et de quatre avisos, l’autre de deux croiseurs légers seulement. Ils avaient poussé leur vélocité jusqu’à 0,15 c et, avec un convoi qui lambinait à 0,05 c, ils bénéficieraient encore d’excellentes solutions de tir, tandis que leur interception par les vaisseaux de l’Alliance en serait davantage compliquée. Mais, alors qu’ils allaient fondre sur le convoi, les croiseurs légers arrivant par tribord décrochèrent pour le survoler tandis que ceux qui arrivaient de face, comme les avisos qui les accompagnaient, plongeaient et se retournaient pour décrire une large boucle inversée.

« Ruse syndic classique, lâcha Duellos. Ils cherchent à pousser Pajari à négliger ceux qui rappliquent de front et ils font mine de fuir pour se lancer dans une traque des deux qui passent au-dessus, juste hors de leur portée. »

Geary ne put réprimer un grognement de surprise en voyant les quatre croiseurs légers restants de l’Alliance jaillir de leur formation, en apparence pour se lancer aux trousses de l’ennemi qui les survolait. Pajari aurait-elle mordu à l’hameçon en dépit de ses assurances ?

Mais un seul garda le cap et continua de poursuivre les deux leurres. Les trois autres virèrent sur l’aile en adoptant une trajectoire incurvée les ramenant à l’avant du convoi. La moitié des destroyers de Pajari avaient également bondi pour se porter devant les cargos de réfugiés, tout en maintenant avec eux une bonne distance.

Au lieu de fuir, les deux croiseurs légers et les deux avisos ennemis avaient bouclé la boucle et revenaient sur les vaisseaux de réfugiés après avoir décrit un cercle complet. Cela étant, leur petite flottille se retrouva en train de foncer la tête la première dans la parade de Pajari alors qu’elle s’attendait à se voir opposer une défense affaiblie par le départ des quatre vaisseaux qui avaient quitté leur position pour traquer les deux appâts.

Trois croiseurs légers et une douzaine de destroyers l’enfoncèrent. Sans doute le feu nourri ne fut-il pas unilatéral. Le Perroquet accusa deux sérieuses frappes de la part des avisos ennemis et les croiseurs légers concentrèrent leurs tirs sur l’Éperon, qu’ils pilonnèrent littéralement. Mais le même Éperon et le croiseur léger Flanconade portèrent des coups mortels à un croiseur léger, tandis que les frappes cumulées du croiseur léger Nukiwaza et d’une demi-douzaine de destroyers en faisaient tanguer un autre. Le destroyer Fléau cueillit même un des avisos, coup de chance qui réduisit au silence sa propulsion principale et le laissa également désemparé.

Les trois avisos rescapés décampèrent quand Pajari ramena ses vaisseaux pour une nouvelle passe de tir. Un des croiseurs légers riposta alors même qu’il tentait de fuir sur une seule aile, mais l’équipage du second s’en échappa dans des capsules de survie, tout comme celui de l’aviso blessé.

La seconde passe de tir déchiqueta le croiseur léger qui combattait encore, ainsi que l’aviso désormais déserté. Le croiseur léger abandonné par son équipage explosa, lui, le cœur de son réacteur victime d’une surcharge consécutive à un tir de barrage.

Au-dessus de la formation des vaisseaux de réfugiés, les deux croiseurs légers qui avaient servi d’appât et revenaient à présent légèrement sur sa gauche modifièrent brusquement leur trajectoire en prenant conscience de l’anéantissement de la Flottille Un.

« Ils piquent sur le point de saut pour Tiyannak, rapporta le lieutenant de l’Inspiré chargé de la surveillance des opérations. Les avisos rescapés de la Flottille Un aussi.

— Une autre bonne nouvelle ! » s’exclama Duellos en pointant son écran.

L’image des événements qui s’étaient déroulés plus de dix minutes auparavant était désormais visible. Les deux croiseurs légers ennemis avaient poussé un peu trop loin leur manœuvre de diversion et le capitaine Savik avait placé ses croiseurs de combat en bonne position. Un brusque coup d’accélération du Formidable et de l’Implacable avait amené un des croiseurs lourds à l’extrême limite de la portée de leurs missiles, et la salve tirée par les deux croiseurs de combat avait fait mouche plusieurs fois, assez sévèrement en tout cas pour le ralentir de manière appréciable. Tandis que son compagnon et les deux avisos qui l’escortaient s’enfuyaient, le croiseur lourd blessé riposta, dernier et futile défi à l’Implacable et au Formidable, qui fondirent sur lui et le réduisirent en miettes en une seule passe de tir.

Entre-temps, un des avisos qui fuyaient vers le point de saut pour Tiyannak avait négocié un virage dangereusement serré pour s’orienter de nouveau vers la planète habitée. Probablement celui-là même dont Araya croyait que Batara avait réussi à le maintenir en service, sans doute réquisitionné plus tard par les forces de Tiyannak, mais qui, maintenant que les anciens conquérants déguerpissaient, réaffirmait son indépendance.

« Nous avons affronté l’ennemi et Batara nous appartient, affirma Duellos avec un sourire satisfait.