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Rien qui répondît à ses questions. Geary descendit faire un tour dans les entrailles du vaisseau, où les lieux de culte attendaient ceux qui cherchaient un peu d’intimité. Il s’assit dans un compartiment vide et alluma la chandelle de cérémonie. Très honorés ancêtres, vous savez déjà quelle décision je dois prendre. Que me conseillez-vous ?

Il attendit, ne ressentit aucune inspiration, réitéra sa question en vain, finit par moucher la chandelle et sortir, manquant télescoper un matelot qui se ruait dans le compartiment. L’homme afficha une mine inquiète assez comique et salua. « Excusez-moi, amiral.

— Pas de problème, répondit Geary en lui faisant signe de passer. Vous avez manifestement une question urgente à poser.

— Rien de vraiment pressant, amiral. » Le matelot eut un sourire penaud. « C’est juste entre moi et… euh… un ami. Savoir si… Vous voyez ? Une affaire personnelle. Je sais déjà tout ce qui importe, vu que vous êtes aux commandes et que vous nous ramènerez chez nous. C’est ce que mes parents m’ont demandé : “Tu reviendras à la maison ?” Et j’ai répondu : « L’amiral Geary est aux commandes.” Là, ils ont su que la flotte n’aurait pas d’ennuis.

— Merci. » Geary resta figé un moment pendant que le matelot se précipitait à l’intérieur. Puissent ses ancêtres lui fournir une réponse. Vous nous ramènerez à la maison. Nonobstant tout ce qui risquait de lui arriver personnellement, qu’est-ce qui, vraisemblablement, serait le plus susceptible de rapatrier ces vaisseaux et leurs matelots ?

De retour dans sa cabine, Geary s’efforça d’afficher la plus prosaïque des assurances pour envoyer sa réponse à Iceni. « J’accepte votre proposition. Je ne m’engagerai pas spécifiquement à défendre Midway contre toute agression, sauf de la part de l’espèce Énigma, mais vous avez aussi ma parole d’honneur que j’éviterai consciencieusement de nier m’y être engagé oralement. Je ne peux pas vous garantir que cette flotte ni aucune autre force de l’Alliance ne recevront l’ordre de notre gouvernement d’aider celui des Mondes syndiqués à rétablir son contrôle sur Midway, mais je compte bien m’opposer à cet emploi de la flotte et décliner le commandement d’une telle force.

» En contrepartie, et en sus du dispositif dont vous avez promis de m’envoyer les plans, je tiens à ce que vous vous engagiez à ne pas divulguer le soutien tacite qu’apporte cette flotte à vos entreprises ni à aucun de vos projets. Si vous en faites état publiquement, je démentirai. Et si vous commettez des atrocités contre votre population ou agressez d’autres systèmes stellaires, je regarderai cet accord comme nul et non avenu. »

Une dernière chose. « J’aimerais qu’on me tînt informé de ce qu’il est advenu du commandant en chef Boyens après sa relaxe.

Dans l’attente de votre acceptation de mes conditions et de la réception des plans du dispositif interdisant l’effondrement des portails. »

Moins de dix minutes après la transmission, l’écoutille de la cabine de Geary carillonna. Il l’ouvrit et constata avec surprise la présence du lieutenant Iger. Qu’est-ce qui pouvait bien conduire l’officier du renseignement à lui rendre visite en personne ?

« Amiral, il s’agit d’une affaire concernant un officier supérieur et sur laquelle je dois intervenir », déclara Iger, manifestement agité.

Dix

« Veuillez m’excuser ? » Le renseignement aurait-il surveillé ses propres transmissions ? S’agirait-il d’une sorte de contrôle policier de sa loyauté, dont certes il avait entendu parler, mais dont il avait du mal à croire qu’elle pût avoir sa place dans la flotte de l’Alliance.

La fébrilité d’Iger s’accrut encore. Geary ne l’avait jamais vu plus mal à l’aise. « Une… question concernant un officier supérieur, amiral. On m’a demandé de vous rendre compte.

— À moi ? » Il ne s’agissait donc pas de lui. « De qui parlez-vous ?

— D’un de vos commandants, amiral. Du commandant d’un de vos croiseurs de combat. »

Geary se raidit. « Qui est-ce ? Rien qui rappelle le capitaine Kila, j’espère ?

— Non, amiral. » Iger secoua brièvement la tête. « Pardonnez-moi, amiral. Non, rien de tel, mais je dois pourtant vous rendre compte », répéta-t-il.

Il ne devait pas lui être facile de moucharder sur un officier supérieur. Geary s’efforça de recouvrer son calme et hocha la tête. « Que cela vous serve de leçon, lieutenant, sur la façon de s’y prendre pour me faire part de mauvaises nouvelles. De qui s’agit-il ?

— Du capitaine de frégate Bradamont, amiral. Commandant du Dragon. »

Bradamont. Une femme à qui Desjani accordait désormais sa confiance. « Qu’a bien pu faire le commandant Bradamont ?

— Elle a eu accès à nos analyses confidentielles des capacités militaires syndics dans ce système, amiral. »

Celles précisément que Geary avait consultées un peu plus tôt. « Elle… voulait se renseigner sur les capacités militaires d’un éventuel adversaire ? Un de mes commandants de vaisseau cherchait à s’informer de l’état des forces syndics dans ce système ?

— Oui, amiral.

— En quoi exactement est-ce un problème, lieutenant Iger ? »

Celui-ci, qui commençait légèrement à se détendre devant la réaction de Geary, s’agitait de nouveau. « Bien que son poste autorise le capitaine Bradamont à consulter ces rapports, et qu’elle avait de toute évidence besoin de ces renseignements, ses états de service comportent un bandeau de sécurité, amiral. Je ne sais pas si vous êtes au courant…

— Parce qu’elle a été prisonnière des Syndics, voulez-vous dire ? » Il avait préféré accepter l’explication de Desjani plutôt que d’aller fouiller lui-même dans les états de service de Bradamont, mais il n’était guère surpris d’apprendre que la sécurité la tenait à l’œil. « Je croyais la question résolue.

— Elle l’était, amiral, mais nous sommes tenus de rendre compte dans certaines circonstances et… Avez-vous eu l’occasion de consulter notre analyse des forces militaires syndics dans ce système, amiral ? »

Geary faillit sourire des précautions oratoires d’Iger : en réalité, le lieutenant cherchait à savoir si son supérieur avait déjà lu le rapport. « Oui, voilà quelques minutes à peine. Que contient-il donc qui puisse susciter de l’inquiétude vis-à-vis du commandant Bradamont ?

— Le nom d’un des officiers syndics de ce système, amiral, expliqua Iger. Un sous-commandant de quatrième classe, Donald Rogero. Nous croyons savoir que c’est avec cet homme que le capitaine Bradamont a eu une… euh… liaison durant sa captivité.

— Oh ! Je vois.

— Je dois aussi vous en informer, poursuivit le lieutenant Iger sur le ton de l’excuse. Même si ça concerne un officier supérieur.

— Je comprends. » Du moins comprenait-il la démarche d’Iger. Mais que méditait Bradamont ? « Y a-t-il une raison pour que je ne pose pas directement la question au capitaine Bradamont ?

— Non, amiral. Je ne suis pas habilité à me pencher davantage sur ce problème sans autorisation, mais, de votre côté, rien ne limite votre action, sinon le règlement. Le capitaine Bradamont est déjà au courant de tous les aspects confidentiels de l’affaire.

— Très bien. Merci. Je vous suis reconnaissant de m’avoir parlé de ce problème, et de façon appropriée. Je ne vois aucune raison d’aller plus loin. » Geary devait laisser entendre à Iger que rapporter sur un supérieur hiérarchique était sans doute une corvée pénible, mais qu’il s’en était correctement acquitté.