Выбрать главу

— Ben il m’a donné le droit d’appliquer la justice divine, et on va les calmer.

— Et c’est quoi la justice divine ?

— Cause pas des choses qui fâchent môme, on n’a pas tout à fait la même définition avec le Patron… donc tu te lances dans l’aventure ?

— Oui, je suis venue te chercher dans ton église pour ça.

— On attend un peu, tu ne mords pas à l’hameçon tout de suite, ils t’ont donné 24 h 00. Une nana ne peut pas donner son accord d’un coup comme ça pour une merde pareille, même avec un matelas de pognon à la clé. Tu me permets d’installer un truc sur ta bécane ?

— C’est quoi ?

— Timeviewer, avec ça, si tu as besoin je peux prendre le contrôle de ton ordinateur, une application de rien du tout.

— Vas-y, je suis sûre que tu vas fouiller dans mes archives vidéos…

— Non, voyons, n’oublie pas que je suis prêtre !

Ok, il y a encore peu, je bafouais mon sacerdoce, mais pour la bonne cause. C’est toujours pour ma mission, jamais mon propre plaisir.

Je prends un bloc de papier qui traîne sur le côté du bureau, note de mon écriture racée quelques lignes.

— Voilà, avant de te coucher tu tapes ce message et tu l’envoies, si réponse il y a, tu me contactes. Pas d’initiative perso ma belle, d’accord ?

— Oui pas de problème.

Je ramasse le papelard avec les accès au site, dépose un baiser sur les lèvres fruitées de Martine. Vu où était ses labiales il y a encore peu, je te fais pas de dessin sur le fruit en question. Je remets mon Perfecto sur mes endosses et quitte ce lieu de débauche pour rejoindre mon bercail.

5

Chapitre où je fais pénitence…

Je pousse la lourde sculptée en chêne et j’ai comme l’impression que les angelots et autres saints se foutent gentiment de ma gueule. Personne dans l’église à première vue. Je trempe ma pogne dans le coquillage scellé dans la pilasse et me signe. Un courant d’air froid me fout un frisson dans le bas de l’échine.

Ça, c’est un signe divin. Le Vieux devait me surveiller, il me montre son mécontentement, va falloir faire pénitence.

Je me dirige vers la grande croix de bois derrière l’autel, le Jésus est pratiquement à l’échelle un, une belle pièce. Je m’agenouille.

— Je sais, ô oui je sais… Vous allez dire que j’ai encore déconné, que je n’aurai pas dû. Mais c’est pour le boulot. Vous vous rendez compte ? Des enfants ! Je ne peux pas laisser faire. Alors oui, je sais que je n’étais pas obligé de la… de l’… On ne peut pas causer d’autre chose ?

Je balance une belle prière avec toute la foi qui va avec, un acte de contrition, toujours le même : Mon Dieu, j’ai un très grand regret de t’avoir offensé, parce que tu es infiniment bon, et que le péché te déplaît. Je prends la ferme résolution avec le secours de ta sainte grâce de ne plus t’offenser et de faire pénitence. J’attrape le crucifix qui pend à mon lacet de cuir, le baise religieusement, ça change.

Je me relève. Le vent s’est calmé, le Vieux est détendu. J’ai plutôt intérêt à être efficace si je ne veux plus entendre causer de mes exploits au Palais des glaces.

Surtout que je risque de retourner là-bas, et donc de rechuter… La chair est aussi faible que la fidélité de ta femme.

Je vais rejoindre mes appartements, fini la pénitence pour aujourd’hui, le prochain show aura lieu demain dès laudes à l’heure où blanchit la campagne… punaise va falloir que je me lève à cinq heures. Comme d’habitude j’aurai juste la vieille Bardoure. Pratiquement centenaire, elle est présente à tous les offices. Une bigote, une vraie de vraie. Veuve depuis la seconde guerre mondiale, son bonhomme la supportait plus, il a préféré se barrer au front, où il est resté. Depuis pas un homme n’a trouvé grâce auprès de son vieux cœur desséché. Ou à la rigueur si, le chef. Elle en bouffe à toutes les sauces, je suis sûr qu’elle le bassine Mamie pruneaux. C’est le petit surnom que je lui ai donné, ça la fait sourire, elle ne comprend pas pourquoi ce sobriquet, mais vous pensez bien, monsieur le curé lui cause, alors elle est heureuse, je suis l’entremetteur avec le tout puissant. C’est vrai qu’elle m’apprécierait moins si elle savait que Mamie pruneaux c’est simplement parce qu’elle est ridée et qu’elle me fait chier.

Je me sers une bonne dose de raide. Rien de tel que de prier avec Jack Daniel’s en fin de journée pour se remettre les idées en place. Je lance le navigateur Internet et me connecte au site sur lequel Martine a été contactée.

Tu vas me demander pourquoi je lui ai dit de me prévenir en cas de message alors que j’ai tout ce qu’il faut pour y aller ? Puisque la petite m’a filé ses identifiants et mots de passe.

Simplement parce que je ne tiens pas à me connecter sous son identité, par respect pour sa vie privée. Enfin privée, sa vie sexuelle quoi, ce qu’elle fait ne me regarde pas, surtout quand c’est avec les autres.

Puis surtout je ne sais pas à qui j’ai affaire, alors pas question de poster d’une autre adresse I P, si ils ont repéré la sienne, et qu’ils voient qu’elle change, ça pourrait leur foutre la puce à l’oreille, et vois-tu, je tiens à éviter ce genre de souci.

Par contre je tiens à regarder ce que proposent les autres filles inscrites là-dessus. Non, pas par vice, même si je dois t’avouer que je ressens comme une raideur que la moralité m’interdit de nommer ici, mais que moi j’appelle une putain de gaule, n’en déplaise au Patron. Je te jure que je vois des sacrés trucs : chouettes, bandants, érotiques, sales, rebutants, débutants, envoûtants. Bref le cul c’est comme le reste il en faut pour tous les goûts, et que même pour certaines pratiques, c’est surtout pour l’égout.

En fait là-dessus il y a des filles bien plus trash que Martine, suffit de voir celle avec son clébard, elle est barrée, pauvre bête. Il ne mérite pas ça le chien. Une grosse blonde peroxydée, lunettes Cartier qui lui font des yeux de mouche, l’air conne à quatre pattes face à la caméra dans un manoir, avec un braque chocolat sur le dos langue pendante.

Ça me fait pitié, faut-il être tombé bas pour en arriver là, à s’exposer de la sorte sur la toile.

J’en trouve d’autres des trucs louches sur la libido de mes contemporains, il y a des tarés je te jure.

J’ai donc deux solutions, soit nos cinglés ont envoyé le message à plusieurs destinataires, en prenant le risque d’être balancés autant de fois, soit leur client a des critères physiques bien définis qui sont ceux de Martine.

Je pencherais plus pour ça. C’est vrai qu’elle est mignonne la petite, il y a pas à dire, carrossée comme une Bentley mais avec une mécanique de chez Ferrari. C’est le Dom Pérignon de la donzelle, le haut de gamme, pas fait pour le petit joueur. Tiens, toi par exemple, non pas toi, lui, là, celui qui bave, oui toi, tu en ferais quoi de Martine avec ton Curly ?[8]

Que dalle, rien, t’aurais l’air de quoi ?

Ce serait pire que de donner de la confiture à un cochon. Martine c’est du caviar mon pote. Le commanditaire est un foutu pervers qui mérite une ordonnance et une sévère, le genre avec Parabellum pour faire passer la fièvre, mais question gonzesse il sait choisir.

Ce qui ne m’avance pas plus, mais de t’en causer cela fait du caractère, ça soulage mon éditeur, il voit que le bouquin avance.

Je ferme l’ordinateur, j’ai beau aimer ces dames, et les multiples façons de passer du bon temps avec elle, là, sur écran, c’est glauque, c’est triste. Pas le genre de truc qui m’excite, pourtant je ressens de drôles de vibrations… je décide donc de sortir mon mobile de ma fouille et de répondre à l’appel. C’est justement Martine.

вернуться

8

Virginia Valmain, je t’aime !