Выбрать главу

– Je tiens à vous le répéter: Mme Jacqueline Aubry et Jeannot sont en parfaite sécurité! Judex les a récemment amenés à Sainte-Maxime dans une propriété où ils sont entourés, je dois le reconnaître, de tous les égards possibles. Mais en attendant, ils lui servent d’otages.

– Il faut les délivrer.

– C’est à quoi, mon frère et moi, nous allons nous employer.

– Judex est un adversaire terrible.

– Il n’est plus à redouter.

– Comment cela?

– Il est entre nos mains.

– Que me dites-vous là?

– Judex est ici… dans la cabine du capitaine Martelli. Il est venu pour traiter de votre rançon. Il m’a offert un million pour que je vous rende à lui. J’ai si bien feint d’entrer dans ses vues… de céder à ses arguments qu’il n’a pas hésité à me suivre à bords de l’Aiglon.

– Je veux le voir!… exigeait Favraut d’un accent impérieux, farouche.

– Vous y tenez beaucoup?

– Absolument.

– J’aurais tant voulu vous épargner cette émotion… déclarait hypocritement l’aventurière.

– Je veux le voir! Je le veux, insistait Favraut.

– Eh bien, cette entrevue aura lieu.

– Tout de suite…

– Tout de suite… Cependant, mon ami, insinuait l’astucieuse créature, permettez-moi de vous mettre en garde contre les menées de cet homme… qui ne va pas manquer de nous blâmer, mon frère et moi, et de chercher à nous salir à vos yeux en inventant contre nous les plus lâches et les plus perfides calomnies.

– Soyez tranquille, je saurai lui répondre.

– Il est tellement habile.

– Je ne le crains pas…, affirmait le banquier… Et puis, vous serez là tous deux pour me défendre.

– Désormais…, fit simplement l’aventurière – sûre maintenant de son influence sur Favraut -, Judex vous appartient. Il est à votre merci. J’aurais pu nous en débarrasser tout de suite. Mais j’ai mieux aimé vous laisser la joie de prendre vous-même votre revanche. C’est donc à votre tour de prononcer le verdict, à votre tour d’être impitoyable. Soyez sûr que votre arrêt sera fidèlement exécuté.

Et, mettant le comble à son infâme hypocrisie, l’ex-institutrice ajouta:

– Rappelez-vous, mon ami, que si vous voulez, désormais, vivre heureux, et si vous tenez à revoir vos enfants, il faut que ce Judex disparaisse à tout jamais de la scène du monde.

– Il disparaîtra.

– Il faut que vous soyez sans pitié.

– Je le serai!

Et le banquier qui, dominé par l’infernale créature, sentait revivre en lui tous ses appétits de férocité instinctive, s’écria d’une voix rauque:

– Il mourra!… oui, il mourra!… et je ne regrette qu’une chose, c’est de ne plus être assez fort pour l’étrangler de mes propres mains.

– Alors, venez! fit l’aventurière dont le visage rayonnait du plus criminel des triomphes.

II MENSONGE ET VÉRITÉ

Sûre désormais de son succès, Diana Monti allait livrer l’assaut suprême avec tout l’aplomb cynique d’un joueur qui a su, en faisant sauter la coupe, mettre tous les atouts dans son jeu.

Ouvrant toute grande la porte de la cabine où attendait Judex, elle lança sur un ton solennel et dans une attitude théâtrale:

– Monsieur Favraut… voici votre bourreau… voici l’homme qui séquestre votre fille!

À ces mots, Judex ne répondit que par un sourire de froide et tranquille ironie.

Il avait compris.

L’aventurière démasquait entièrement ses batteries… Et ce procédé n’était nullement fait pour lui déplaire.

La situation se présentait ainsi nette et franche et ce fut d’une voix qui ne révélait pas la moindre inquiétude que Judex répliqua:

– C’est la bataille… eh bien, soit, je l’accepte.

Et, enveloppant de son regard tout de loyauté admirable le père de Jacqueline qui le considérait avec une expression de haine farouche, il fit de sa belle voix grave, harmonieuse:

– Monsieur, je tiens avant tout à m’inscrire en faux contre les assertions de cette femme. Mme Jacqueline Aubry et son fils ne sont nullement séquestrés par moi. Et si j’ai cru devoir leur offrir l’hospitalité dans ma maison, où ils sont en parfaite sécurité… ce n’était nullement pour en faire des prisonniers… mais uniquement pour leur permettre d’échapper à des bandits qui voulaient les assassiner tous les deux.

Et désignant Diana et Moralès, qui à la suite de Favraut étaient entrés dans la cabine, il fit avec un accent de force superbe et de dignité incomparable:

– Et ces bandits, les voilà.

– Je ne m’abaisserai même pas à vous démentir…, sifflait l’aventurière.

– J’affirme…, reprenait Judex, que vous, Diana Monti, et votre amant, Robert Kerjean…

– Mon amant! ricana l’ex-institutrice…

– Oui, votre amant!…

– Assez! interrompit violemment Favraut… Je ne sais qu’une chose… c’est que ceux que vous accusez m’ont rendu la liberté et sauvé la vie.

– Si vous ne me croyez pas, déclarait Judex, suivez-moi à Sainte-Maxime… Je vous mettrai en présence de votre fille à laquelle je suis décidé à vous rendre… et vous verrez si elle ne confirmera pas elle-même les accusations que je ne crains pas de porter contre ces deux gredins.

– Je ne vous suivrai pas! s’écriait le marchand d’or.

– Pourquoi?

– Parce que je ne veux pas tomber dans le piège que vous me tendez.

– Je ne vous tends aucun piège! répliqua Judex. La preuve, c’est que je suis venu ici sans autre arme qu’un carnet de chèques… que voici, et qu’en échange de votre liberté, je suis prêt à payer un million à cette femme, qui réellement vous tient en son pouvoir et qui n’a pas reculé et ne reculera devant aucun crime pour s’emparer de votre fortune.

– Je ne vous crois pas! s’obstinait le banquier complètement subjugué par le regard infernal dont l’enveloppait savamment l’ancienne institutrice.

– Si votre fille était ici…, affirmait Judex, elle vous crierait que je dis la vérité.

– Eh bien! rugit Favraut, allez la chercher.

– Mais oui, appuyait Diana, allez… allez donc.

Mais Judex ripostait: