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Il y eut un roulement de tambourin.

Et Amina apparut.

Superbe… Elle avait troqué ses vêtements européens pour une jupe de mousseline accrochée très bas sur les hanches. Les chevilles disparaissaient sous de lourds bracelets d’argent. Ses mains n’étaient plus que bagues. De toutes les couleurs.

Sa taille était incroyablement fine. En haut, elle ne portait qu’un soutien-gorge pailleté, très décolleté, en tissu transparent brodé d’or.

Ses cheveux coulaient sur ses épaules, accentuant son air jeune, fragile et sauvage. Le chef des musiciens poussa un cri rauque, frappa dans ses mains, le joueur de tambourin s’emballa.

Amina baissa la tête, gonfla sa poitrine, réunit les mains au-dessus de sa tête et commença à danser. Elle accomplit d’abord le tour de la piscine à petits pas, ondulant, s’arrêtant devant chaque spectateur, puis arriva devant Malko et Eleonore. Elle marqua un temps d’arrêt adressa à Malko un sourire éblouissant et froid puis reprit son exhibition sur un rythme beaucoup plus lent, presque à contretemps de la musique.

Virevoltant se reculant creusant le ventre, faisant onduler vertigineusement son bassin, ou restant presque immobile, avec des contractions du pubis parfaitement explicites.

Malko en était gêné. Il eut un coup d’œil en coin pour Eleonore Ricord. La Noire dégoulinait de réprobation. Son regard traversait Amina comme si elle n’existait pas. Il eut envie de s’amuser et se pencha à son oreille :

— Elle est superbe, n’est-ce pas ?

— Vous aimez les putains ! répliqua la vice-consul d’une voix cinglante.

À geler une banquise…

Ouvertement, elle s’écarta de lui. Aussitôt, Amina s’approcha encore, dansant à quelques centimètres de Malko. Les musiciens se levèrent et vinrent se placer derrière lui, l’assourdissant de tambourins.

C’était une danse à la fois extraordinairement sensuelle et chaste. Chaque fois que Malko avait l’impression qu’elle allait mimer l’amour jusqu’au bout ou se laisser tomber à ses côtés, Amina s’écartait brusquement et repartait sur un autre enchaînement de figures… Et Malko pouvait se prendre pour le khalife de Bagdad, trois siècles plus tôt.

Eleonore Ricord se leva, soudain, murmurant que la musique l’assourdissait, pour aller s’installer à l’autre bout du patio. Malko avait beaucoup de mal à garder à l’esprit les vraies raisons de sa présence avec cette fille superbe, à moitié nue, qui s’amusait à le provoquer.

La musique s’arrêta aussi brutalement qu’elle avait commencé. Il y eut des cris de joie, des exclamations. Le sheikh Sharjah applaudit bruyamment.

D’un geste naturel, Amina vint s’asseoir sur les coussins à côté de Malko, hiératique et lointaine, arrangeant soigneusement les plis de sa jupe. Avec un sourire mécanique, elle accepta un verre de « Seven-up ». Sa lourde poitrine palpitait encore de son effort et sa peau était couverte de fines gouttelettes de transpiration.

— Vous avez merveilleusement bien dansé, Amina, dit Malko en anglais.

La danseuse inclina silencieusement la tête. Les musiciens avaient recommencé à jouer en sourdine. Le patio était beaucoup plus sombre.

Silencieuse et immobile, Amina contemplait l’eau de la piscine de ses immenses yeux sombres en amande.

Malko ne savait pas très bien par quel bout la prendre. Il fit sourire ses yeux dorés et dit :

— Je vous ai vue l’autre soir au Phoenicia et je tenais absolument à vous revoir.

Pas de réponse. Elle le fixait, avec une amorce de sourire sur sa belle bouche. Et une ombre de mépris, aussi. Il l’attira sur les coussins, lui passant un bras autour des épaules. Elle se laissa aller passivement, sans résistance.

Il sentait son corps raide contre le sien. C’était clair. Le sheikh avait donné des ordres pour qu’elle honore Malko, et elle l’honorerait. Abu Sharjah était trop puissant pour qu’une danseuse de night-club puisse refuser une faveur aussi banale. Mais, ce n’était pas ce que Malko était venu chercher. Il se redressa.

— Vous ne parlez pas du tout anglais ? demanda-t-il, en détachant bien ses mots.

Elle secoua négativement la tête. Toujours sans un mot. Cela devenait agaçant Malko se leva et la prit par la main. De nouveau, elle se laissa faire docilement, allant d’elle-même vers l’intérieur de la maison. S’attendant visiblement à être consommée sur-le-champ. Sans même avoir littéralement échangé un mot.

Fermement, Malko dévia la danseuse vers le sheikh Sharjah et s’arrêta devant lui.

— J’ai des problèmes, annonça-t-il.

Abu Sharjah se redressa et apostropha violemment la fille en arabe. Malko se hâta de dissiper le malentendu. D’ici à ce qu’il lui coupe une main…

— Non, non, ce n’est pas cela, dit-il. Mais je n’arrive pas échanger un mot avec elle. Pouvez-vous servir d’interprète ?

Le sheikh n’eut pas le temps de répondre. S’apercevant de la discussion, le chef des musiciens était accouru. Après une courbette à ras de terre, il murmura quelque chose à l’oreille du sheikh. Ce dernier fixa alternativement la danseuse et Malko, avec un air d’intense satisfaction, puis il éclata d’un rire énorme. Pleurant de joie, il éructa.

— Je ne peux pas vous aider ! Elle est sourde-muette !

Chapitre VII

Sourde-muette ! Malko crut à une plaisanterie. Il observa Amina : il y avait des larmes dans ses immenses yeux noirs. Le sheikh Abu Sharjah s’arrêta de rire brusquement, gêné. Puis son regard s’éclaira de nouveau et il dit à Malko :

— Cela ne fait rien. Elle est d’accord.

Malko sourit poliment. Le mépris muet et résigné qu’il lisait dans les yeux du vieux musicien le mettait mal à l’aise.

— Je suis très touché de l’attrait que j’exerce sur elle, dit-il avec diplomatie, mais je ne pense pas que j’en profiterai.

Abu Sharjah fronça les sourcils, peu accessible à ces finesses.

— Elle ne vous plaît pas ?

— Elle me plaît beaucoup, affirma Malko.

Les dents en or brillèrent, comme de petits lingots inégaux.

— Alors il n’y a plus aucun problème.

Comme pour balayer les dernières hésitations de son hôte, il prit Amina par le bras et l’entraîna à l’intérieur de la maison. Malko comprit qu’il allait se faire un ennemi mortel d’Abu Sharjah s’il refusait son « présent ». Il entra à son tour. Le Koweiti avait ouvert la porte d’un petit salon encombré de coussins et de divans très bas. Amina attendait, debout au milieu de la pièce.

— Vous serez très bien ici, dit Abu Sharjah avec un clin d’œil égrillard.

Il avait déjà refermé la porte. Malko se retourna. Amina avait fait sauter son soutien-gorge, libérant deux seins incroyablement fermes pour leur volume. Elle ne devait pas avoir plus de dix-huit ans. Elle fixait sur Malko un regard totalement inexpressif. Il s’approcha pour lui dire de ne pas se déshabiller et réalisa tout à coup qu’il n’avait aucun moyen de communiquer avec elle !

Mécaniquement, elle continuait son strip-tease résigné : la jupe, puis le slip doré. Puis, nue à l’exception de ses bracelets, de ses colliers, méprisante et consentante, elle s’allongea sur le divan bas, la tête légèrement tournée vers le mur, une main dans le vide, les jambes ouvertes.

Malko hésita, ne sachant que faire. Il ramassa sa jupe et la lui tendit. Elle secoua la tête sans la prendre. Puis elle lui prit la main et tenta de le faire venir sur le lit Malko comprit que ses efforts seraient vains. Elle avait peur de déplaire au sheikh.