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Jenson lança :

— Si vous revenez maintenant, je promets qu’aucun mal ne vous sera fait.

La main de Valeria rencontra enfin ce qu’elle cherchait : une clé. Elle se précipita vers les battants métalliques, l’introduisit dans la serrure, mais ne réussit pas à l’actionner. Stefan vint lui prêter main-forte et, ensemble, ils parvinrent à forcer le mécanisme grippé.

Une silhouette se profila dans le couloir. Peter fit feu. L’ombre recula. Il entendit des chuchotements, puis un silence inquiétant s’installa.

En forçant, Stefan et Valeria réussirent à entrouvrir le premier battant. Stefan glissa ses doigts dans l’interstice et tira. Le passage s’ouvrit en grinçant. Il donnait au pied d’un foisonnant buisson de ronces dans lequel une souris n’aurait pas pu se faufiler. Stefan jura. Valeria, qui avait repéré quelques vieilles lattes de parquet dans un recoin, sauta du tas de charbon pour aller les chercher.

— On va se frayer un chemin, dit-elle, décidée. On en sortira tailladés mais je préfère ça plutôt que de retomber entre les mains de l’autre malade…

Dans le couloir retentit un choc sourd et violent. Peter crut d’abord qu’il s’agissait d’une grenade fumigène, mais il ne vit rien apparaître. Il entendit d’autres chuchotements, puis soudain une ombre se dessina. Il fit feu. Cette fois, la forme ne recula pas. Peter écarquilla les yeux. À l’autre bout du couloir, le garde avançait dans sa direction, protégé par la porte de leur cachot qu’il avait dégondée et tenait devant lui tel un bouclier. Bien que ralenti par le poids du battant, il progressait assez rapidement. Peter ouvrit le feu en visant les bords pour essayer de toucher les mains. Les balles ricochèrent. Le jeune homme tenta alors de viser les pieds, sans plus de succès.

— Dernier avertissement ! gronda Jenson, ne me mettez pas en colère…

Dans l’inextricable buisson, à plat ventre sur les planches, Stefan avait progressé d’un bon mètre. Debout sur le tas de charbon dans son peignoir maculé de terre et de charbon, Valeria lui passait les planches au fur et à mesure. Les morceaux noirs irréguliers roulaient sous ses pieds. Elle se retourna vers Peter.

— Il faut y aller, lui souffla-t-elle.

Le jeune homme répondit sans détourner le regard de sa cible.

— Filez, je vais les bloquer.

Il cherchait désespérément où faire feu pour stopper l’avance du garde derrière son bouclier improvisé.

Toujours allongé, Stefan fit remonter une planche le long de son corps et la poussa devant lui. En utilisant cet appui et son poids, il parvint à coucher les tiges de ronces qui se dressaient comme autant de barreaux. Il donna un dernier coup de reins et déboucha enfin. Valeria le suivit, ses bras et ses jambes nues lacérés par les épines.

Peter ne disposait plus que d’une seule balle. Il commença à reculer sur la pointe des pieds. Lorsque le garde ne fut plus qu’à quelques mètres de l’entrée de la réserve, le jeune homme tira en direction de l’ampoule électrique située juste au-dessus de son assaillant. Le globe explosa, projetant des éclats de verre sur le garde et plongeant le couloir dans la pénombre. Peter en profita pour battre en retraite. D’un bond, il sauta pour agripper le bord de la trappe de service. Une fois à l’extérieur, il attira les battants à lui, et les bloqua comme il le pouvait, sans se soucier des ronces qui l’entaillaient à chacun de ses mouvements. Trois coups de feu claquèrent. Le dernier percuta la plaque d’acier de la porte qu’il venait de refermer.

— Peter ! s’écria Valeria.

— Ça va ! répondit-il. J’arrive.

— Fais vite, par pitié !

À l’angle de la maison, une ombre apparut dans la nuit. Debbie fixait Valeria et Stefan de son regard inhumain, un couteau à la main.

— Jusqu’au bout, vous nous compliquerez la vie, cracha-t-elle.

Peter sortit du buisson tel un diable en brandissant une planche. L’assistante de Jenson, surprise, n’eut pas le temps de réagir. De toutes ses forces, Peter lui balança la planche au visage. La jeune femme la prit en pleine figure, tourna sur elle-même et s’effondra. Peter se pencha au-dessus d’elle :

— C’est pas extrasensoriel, ça, comme raclée ?

44

Il leur avait fallu marcher près de deux heures dans la nuit avant de trouver une voiture à voler. À plusieurs reprises, ils avaient cru que Jenson et ses hommes étaient sur le point de les rattraper.

Pour remplacer la chaussure trop grande restée coincée dans le fourré de ronces, Peter avait enroulé son sweat-shirt autour du pied de Valeria.

Arrivés au premier hameau, Stefan avait jeté son dévolu sur une petite Mazda. Avant d’être sûrs d’aller demander la protection de la police, tous trois avaient décidé d’aller se réfugier dans l’ancienne cache de Stefan située derrière les bungalows pour pêcheurs. Ils comptaient aussi sur les quelques boîtes de conserve et les vêtements qui y étaient restés. Tous savaient que le répit ne serait que de courte durée.

Valeria jouait avec les bouclettes du tissu éponge de son peignoir que les ronces avaient effiloché. Peter conduisait et Stefan, qui semblait se repérer dans les parages, le guidait. Le faisceau des phares accrochait des arbres, des murs de pierre. Une fois, un renard traversa juste devant eux.

Cette fois, ils se garèrent à l’extérieur de la zone de chalets et gagnèrent la cachette par la forêt. En tirant la plaque dissimulée sous les feuilles, Stefan eut l’impression de revenir chez lui. Il se laissa glisser dans le trou.

À tâtons, il chercha la lampe de camping et la boîte d’allumettes. Elles étaient un peu humides mais il finit par réussir à allumer. La lampe baignait l’endroit d’une chaude lueur.

— Les vêtements sont sous le lit de camp, indiqua-t-il à Valeria.

La jeune femme passa le bras sous la literie et tira la pile soigneusement pliée. Les tissus étaient eux aussi un peu humides mais cela n’avait pas d’importance. Elle était impatiente de se promener autrement qu’à moitié nue.

— Les garçons, pourriez-vous vous retourner pendant que je me change ?

Côte à côte, Peter et Stefan s’assirent sur la table basse. La lampe projetait leurs ombres vacillantes sur les parois. Stefan attrapa trois boîtes de boulettes de viande et vérifia la date de péremption.

— Si on s’était échappés deux semaines plus tard, on n’aurait rien eu à manger ! plaisanta-t-il.

— On va les faire réchauffer sur la lampe, proposa Peter.

— Vous pouvez vous retourner, annonça Valeria. Je suis prête !

Elle avait enfilé un pantalon de chasseur, une chemise et un pull bien trop grands pour elle. D’un geste, elle arrangea ses longs cheveux. Dans la lumière orangée, ses yeux semblaient encore plus veloutés.

Peter disposa la première boîte en équilibre sur le sommet chromé de la lampe. Valeria s’assit sur le lit de camp. Elle frissonna.

— Il faut aller voir les flics le plus tôt possible, dit-elle, sinon Jenson aura le temps de disparaître.

— Pour gagner du temps, on pourrait se séparer, proposa Stefan. L’un de nous va à la police et les deux autres vont planquer la mallette…

En chœur, Valeria et Peter secouèrent vigoureusement la tête.

— Non, fit Peter. On reste ensemble.

Stefan n’insista pas.

La sauce commençait doucement à bouillir. De petites bulles apparaissaient à la surface de l’épais jus rougeâtre. Stefan essuya un vieux verre puis son assiette et dit :

— Le service n’est pas génial. Je n’ai que ces deux récipients, mais ce n’est pas grave, je vais manger dans la boîte.

— J’ai tellement les crocs que je pourrais manger par terre, déclara Peter.