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— Le tueur se serait donc débarrassé de sa combinaison de survie ? Ce ne serait donc pas seulement un assassinat mais une mission suicide.

— Oui, madame la présidente. »

Une mission suicide. Ça ne ressemblait guère aux forces terrestres de Drakon. Mais plutôt… au SSI.

Marphissa jeta à Iceni un regard qui trahissait son incompréhension. « Vous croyez qu’il restait encore des serpents dans l’équipage de nos unités mobiles ? Mais toutes ont expurgé leurs loyalistes, et aucun n’aurait pu quitter son vaisseau pour gagner ce croiseur sans qu’on détecte aussitôt son départ, même revêtu uniquement d’une combinaison de survie. »

Iceni se tourna de nouveau vers Togo. « Ces purges ont-elles été bien scrupuleuses ?

— Oui ! insista Marphissa. Voyez ce qui s’est passé sur l’A-6336 quand il a abandonné les autres vaisseaux loyalistes. Les deux tiers de l’équipage sont morts durant les combats !

— Ça pourrait paraître… » Iceni s’interrompit. Elle venait brusquement de se le rappeler, quand elle avait appris que l’A-6336 s’était séparé de ses pairs, elle finissait tout juste de parler avec Drakon. De la découverte d’un agent opérant en sous-marin pour le SSI. Sans qu’il en fît partie.

« Vice-CECH Marphissa, ne m’avez-vous pas affirmé à une certaine occasion que vous n’aviez pas parlementé avec les cadres de l’A-6336 avant qu’ils ne se débarrassent des serpents ? demanda-t-elle en s’efforçant de s’exprimer avec sérénité.

— Si, madame la présidente, répondit Marphissa, visiblement surprise. Ils n’étaient arrivés à Midway qu’une semaine avant le début de notre opération et n’avaient eu que la seule CECH Kolani pour interlocutrice.

— Donc vous n’avez eu personnellement connaissance de leur existence qu’après qu’ils vous ont appris qu’ils avaient liquidé tous les serpents et loyalistes à bord de leur unité ?

— Oui.

— Connaissiez-vous un des cadres de l’A-6336 avant ? Vous ou quelqu’un des unités qui vous accompagnaient ?

— Non, madame la présidente, mais ce n’est pas impossible, loin de là. Les forces mobiles comprennent de très nombreux cadres. »

Togo avait saisi. Il voyait où voulait en venir Iceni et il s’était tendu.

« Comment saviez-vous que les hommes et femmes avec qui vous vous êtes entretenue appartenaient aux forces mobiles ? demanda Iceni.

— Je… On a eu sous les yeux le rôle de l’équipage qu’ils avaient joint à leur… Mais… que… » La mâchoire de la vice-CECH s’affaissa. « Voulez-vous dire que…

— Que ce qui s’est peut-être réellement passé, c’est que les serpents et les plus fermes suppôts des Mondes syndiqués à bord de cet A-6336 ont massacré leurs cadres et tous ceux dont la loyauté leur semblait sujette à caution puis remplacé le rôle de leur équipage par un faux donnant les serpents pour de vrais cadres et ceux-ci pour des serpents morts. L’A-6336 n’a pas surpris le C-625 en restant à Midway quand ce croiseur a emprunté le portail. C’était un stratagème destiné à nous leurrer. Les serpents de l’A-6336 avaient reçu l’ordre de demeurer sur place.

— Un cheval de Troie bourré de serpents, chuchota Marphissa en écarquillant les yeux. Et désormais posté près de nos forces mobiles, madame la présidente. Je ne dispose d’aucun moyen d’aborder et d’arraisonner l’A-6336. Ni par surprise ni en l’assaillant. Il n’y a pas de forces spéciales à bord de mes unités. »

C’était un problème qu’elle aurait déjà dû régler avec Drakon, songea Iceni avec irritation. Et maintenant on n’avait plus le temps d’envoyer là-haut ces forces spéciales. « Que pouvez-vous faire d’autre ? »

Marphissa réfléchit, les yeux brillants. « Je peux au moins couper l’A-6336 du réseau de commandement sans qu’il s’en aperçoive. Il se croira toujours connecté. Puis ordonner à mes unités d’alimenter en énergie leurs boucliers et leurs lances de l’enfer.

— L’A-6336 ne le détectera-t-il pas ?

— Si, mais longtemps après que le processus aura été enclenché. Si je constate qu’il s’apprête à son tour à préparer ses armes et ses boucliers au combat, je lui intimerai d’arrêter. Dès lors que nous serons pleinement parés au combat avant lui, il se retrouvera désarmé. »

Iceni chercha des trous dans ce plan, hâtivement improvisé par nécessité. « Et s’il continuait de se préparer au combat malgré vos ordres ?

— Alors, avec votre permission, j’ordonnerais à mes vaisseaux de le pilonner. Seul moyen de lui interdire de s’enfuir ou d’endommager mes unités.

— Ça me paraît une solution extrême, dans la mesure où nous ne nous reposons encore que sur des soupçons.

— Madame la présidente, si les occupants de cet aviso appartiennent aux forces mobiles, ils obtempéreront. Ils ne commettront pas la folie de contrevenir à mes ordres sachant que je pourrais les détruire. »

Iceni hocha la tête au bout d’un long moment de réflexion. « L’argument me paraît solide, et nous n’avons effectivement pas le choix. Pourriez-vous réduire cet aviso à l’impuissance sans le détruire, ce qui nous permettrait de l’aborder ultérieurement ?

— Ça me paraît difficile…

— Concentrez-vous sur sa mise hors circuit. S’il en reste quelque chose, ce sera du bonus. Espérons qu’il se rendra en prenant conscience de sa situation désespérée. » Mais Iceni surprit une lueur éloquente dans les yeux de Togo et de Marphissa ; ils pensaient comme elle : jusque-là, les serpents n’avaient jamais consenti à se rendre.

« Quand les matelots des autres vaisseaux apprendront ce qu’on aura fait à l’équipage de cet aviso, il ne restera aux serpents que bien peu de chances de se rendre, même s’ils en avaient l’intention.

— Je comprends. Pouvez-vous me connecter durant toute l’opération ? » La flottille des forces mobiles était toujours en orbite assez proche pour que le retard dans la transmission ne posât pas un trop gros problème.

« Oui », répondit illico Marphissa. Mais déjà son regard s’était fait lointain ; elle se concentrait sur d’autres questions.

Iceni la regarda sans mot dire entrer des ordres, attendre la réponse, vérifier, en crier de nouveaux aux opérateurs de la passerelle de son croiseur, patienter encore puis entreprendre d’appeler les autres unités des forces mobiles à l’exception du seul A-6336. « Activez vos boucliers à plein régime et alimentez vos lances de l’enfer à T 20. Votre cible sera l’A-6336 s’il refuse d’obtempérer. »

Nouveau silence, puis Iceni entendit une question : « Pourriez-vous nous dire pourquoi l’A-6336 est visé, vice-CECH Marphissa ?

— Ses cadres et ses spatiaux à qui nous avons eu affaire sont probablement des serpents. La présidente Iceni et moi-même les croyons coupables d’avoir assassiné ses cadres réels et la majorité de son équipage. Les survivants étaient disposés à aider les serpents à massacrer leurs camarades. Y a-t-il d’autres questions ? »

Togo eut un hochement de tête approbateur. « Réponse claire et stimulante, commenta-t-il à l’intention d’Iceni.

— Elle fera un très bon commandant de mes forces mobiles », convint Iceni. Mais, en dehors des serpents de l’A-6336, autre chose continuait de la tracasser. Pourquoi la première cible de l’assassin avait-elle été Akiri ? Les talents de ce dernier, en tant que cadre exécutif, étaient pour le moins limités, pourtant, en dépit de la réputation dont jouissait Kolani, selon laquelle elle virait tous ceux qui lui déplaisaient, elle avait maintenu Akiri à son poste de commandement. Et voilà maintenant qu’un tueur en faisait sa cible prioritaire. Hélas, il était trop tard pour boucler Akiri dans une salle d’interrogatoire afin d’apprendre ce qu’il avait dans le ventre. « Fais fouiller la chambre à coucher et les effets d’Akiri, ordonna-t-elle à Togo. Consciencieusement. Tâche de découvrir tout ce qui sort de l’ordinaire.