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L’homme est naturellement bon…

Faut-il vous le dire ? Faut-il prendre le risque de vous couper l’appétit (ou de vous donner faim, c’est selon…). Voulez-vous savoir ce que faisait cet homme dans la grotte de Tautavel ? Oui ? Vous l’aurez voulu : cet homme de Tautavel porte sur son fémur des traces de découpage, sa boîte crânienne a été éclatée comme une noix ! Et qui a fait ça ? Eh bien ses congénères ! Oui, l’homme de Tautavel a servi de repas à ses semblables, il a été mangé par d’autres hommes de Tautavel. Et tout porte à croire qu’il a constitué le plat de résistance, car autour de lui on a trouvé des os de lapins, de grives, de perdrix ou de canards – petits animaux qui ont sans doute servi à confectionner les petits canapés pour l’apéritif… Quoi qu’il en soit, cet homme, avant de rôtir, se tenait debout, bien droit, d’où son nom d’homo erectus, il succède à l’homo habilis.

De Neandertal à Cro-Magnon

Sapiens est un adjectif latin qui signifie : « sage, intelligent, raisonnable ». Cet adjectif peut qualifier les deux types d’hommes qui se sont succédé depuis plus de 100 000 ans : il y eut d’abord l’homme de Neandertal, un homme point si rustre ou brutal qu’on a pu le dire, et qui mérite donc un

« sapiens » (homo sapiens) ; et puis est apparu l’homme de Cro-Magnon auquel on attribue deux « sapiens » (homo sapiens sapiens) supérieur à son prédécesseur en sagesse, intelligence et raisonnement, homme duquel, évidemment, nous sommes issus…

L’homme de Neandertal : de -135000 à -35000

En 1856, on découvre dans la vallée de Neander, près de Düsseldorf, en Allemagne, le premier squelette fossile humain que l’on considère différent de celui de l’homme actuel : on l’a nommé l’homme de Neandertal. Quelle est son apparence (on ne sait jamais : peut-être que vous allez reconnaître en lui quelqu’un qui vous est proche…) : il mesure entre 1,55 m et 1,78 m, mais la moyenne se situe à 1,65 m. Il a le visage prognathe, ses pommettes s’inclinent vers l’arrière, son ossature est massive et supporte une masse musculaire importante, comme celle des bodybuilders. Il apparaît dans le paysage vers -135000, au lendemain d’une période de glaciation de 100 000 ans ! Il est bien sûr présent sur le territoire de France qu’il parcourt de long en large, de grotte en grotte, fabriquant des racloirs, des grattoirs, des couteaux, des outils à encoches, des burins, autant d’éléments qu’on qualifie de « moustériens ». (Vous rappelez-vous ce que signifie cet adjectif ? Non ? On ne suit pas ? Retournez lire l’encadré du paléolithique !) Il chasse l’ours, le mammouth, enterre ses morts dans les grottes.

La fin des Néandertaliens

Et puis voilà que, en cinq millénaires environ, entre -40000 et -35000, après avoir cohabité avec les Cro-Magnon, les Néandertaliens disparaissent ! Pourquoi ? Mystère ! On a avancé l’hypothèse d’un virus dévastateur, de la malnutrition, peut-être un ras le bol général de ne pas pouvoir dépasser le stade du racloir et du grattoir alors que, comme tout le monde, ils nourrissaient les projets de rouler vite, de voler et d’aller dans la lune… peut-être, mais on ne saura jamais.

L’homme de Cro-Magnon : de -35000 à -3000

L’homme de Cro, l’homme de Ma, l’homme de Gnon, l’homme de Cro-Magnon, chantaient les Frères Jacques, comme pour saluer la survenue sur terre de notre ancêtre direct. N’oublions pas que, lorsque apparaît cet homme nouveau en Europe, nous sommes encore au paléolithique supérieur, il y a environ 35 000 ans. Le climat est encore très capricieux, et souvent il fait un froid de canard pendant 1 000 ou 2 000 ans. Une calotte glaciaire s’élève au nord de la France et constitue un étrange et gigantesque mur blanc qui borde une Manche n’existant pas : on va à pied de France en Angleterre. Le niveau de la mer est de 110 mètres inférieur à ce qu’il est aujourd’hui. Ainsi, la Loire se jette dans l’océan à 150 kilomètres au sud-ouest de Saint-Nazaire ! Les îles sont rattachées au continent, et lorsqu’on habite à l’emplacement de l’île d’Ouessant, il faut faire 50 kilomètres à pied vers l’ouest pour aller bronzer sur la plage, pendant une période de dégel ! La France du Nord est celle du froid, de -5° à -70°, celle du sud est comme d’habitude favorisée par les températures : 15°.

La grotte de Lascaux

Le 12 septembre 1940, quatre enfants se promènent dans la campagne de Montignac-sur-Vézère en Dordogne : Georges Agnel, Jacques Marsal, Marcel Ravidat et Simon Coencas ; ils sont accompagnés de Robot, le chien de Marcel Ravidat. Soudain, Robot gratte le sol et disparaît dans une sorte de crevasse qui a servi de dépôt d’ordures. Le chien ne remontant pas, les enfants descendent le chercher et découvrent une grotte immense. Sur ses parois : le plus grand trésor pictural de la préhistoire ! Depuis 15 000 ans, personne n’avait fait face à ce qu’ils contemplent ! La grotte de Lascaux et ses secrets viennent de se livrer à l’imagination de l’homme moderne.

Aller faire les courses

Et à quoi les Cro-Magnon occupaient-ils leur temps ? Eh bien, ils l’occupaient comme nous le faisons aujourd’hui : par exemple, ils allaient faire leurs courses pour manger. Mais leur supermarché, c’était la vaste nature. Ils en rapportent du gibier de toutes sortes qu’ils dépècent dans des zones précises leur servant d’abattoirs. Et puis, lorsque le froid revient, ils se réfugient dans les grottes sur les parois desquelles ils dessinent et peignent des animaux. En contemplant les dessins de la grotte de Lascaux, pompeusement baptisée « la chapelle Sixtine de l’histoire », et à propos de laquelle Picasso déclara « On n’a jamais fait mieux depuis ! » (ah bon ?), notre premier réflexe est de baptiser œuvres d’art ces dessins étranges. Œuvres d’art ? Pas si sûr !

Regarder Arte sur la paroi…

On a avancé récemment l’hypothèse suivante : les peintures rupestres seraient des « aide-mémoire » pour les chasseurs, des pages qui indiquent la valeur bouchère des espèces, et même des documentaires animaliers remplaçant ceux d’Arte, en attendant… Mais on ne peut mettre de côté la valeur esthétique des dessins de Lascaux, la splendeur étrange des représentations animales et humaines. On ne peut s’empêcher d’imaginer quelque chaman implorant, sous ces dessins illuminés et lumineux, quelque divinité de la chasse afin qu’elle révèle au groupe affamé les bons plans de bisons futés…