Après la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Jacques Chirac, la gauche qui remporte les législatives va, à son tour, être appelée à cohabiter avec le président.
Cohabitation : troisième épisode
Afin de mieux asseoir son gouvernement, de lui donner une nouvelle légitimité, le président Jacques Chirac décide de dissoudre l’Assemblée nationale le 21 avril 1997, un an avant la date prévue des législatives. Les élections qui ont lieu le 25 mai donnent l’avantage à la gauche, à la surprise générale, avantage confirmé au second tour, le 1er juin : la gauche obtient 320 sièges – 249 PS, 37 PC et 8 écologistes –, la droite 256, et le FN un seul. Une troisième cohabitation se met en place : Lionel Jospin devient Premier ministre le 4 juin 1997.
1997 : la gauche plurielle
Le gouvernement de Lionel Jospin est celui de la « gauche plurielle » composé de socialistes, de communistes et d’écologistes. Le 19, dans sa déclaration de politique générale, il annonce la création de 700 000 emplois pour les jeunes, la mise en place de la semaine de trente-cinq heures dans les cinq années à venir, et cela sans perte de salaire, l’augmentation de 4 % du SMIC à partir du 1er juillet 1997, l’attribution des Allocations familiales sous conditions de ressources, de nouvelles lois sur l’immigration, l’indépendance de la justice, la transparence de la police.
Mammouth : Allègre au rayon froid
Dans le même temps, le 24 juin 1997, une déclaration de politique particulière, effectuée par le nouveau ministre de l’Éducation nationale, va mettre en effervescence le monde enseignant : Claude Allègre, en quelques phrases, monte en épingle l’absentéisme supposé des professeurs, et parlant de l’excès de bureaucratisation de l’Éducation nationale, il projette de « dégraisser le mammouth » – un « mammouth » qui va se mettre à bouder son ministre à la métaphore sibérienne qui a jeté entre eux un froid définitif.
« Je suis une gamine finie ! »
Le 4 août 1997, décède, à l’âge de 122 ans, la doyenne de l’humanité : Jeanne Calment. Elle était née le 22 février 1875, plus jeune de quinze jours que Maurice Ravel… Dans le magasin de couleurs que tenait son père à Arles, elle se rappelle avoir vu Vincent Van Gogh. À la fin de sa vie, elle prétend même avoir eu l’occasion d’une danse avec lui – ce qui est plausible puisqu’au cours du séjour de Van Gogh non loin de chez les Calment, Jeanne avait, en 1888-1889, treize-quatorze ans. Elle a cinq ans à la naissance d’Apollinaire, dix ans à la mort de Victor Hugo, vingt-huit ans à la naissance de Marguerite Yourcenar. Elle survit à trois guerres et un mari. À 90 ans, elle vend en viager sa maison à un notaire qui lui verse 500 euros par mois ; à la mort de Jeanne, la maison doit lui revenir. Hélas pour lui, il meurt avant elle, à 77 ans, en 1996 ! Sa famille doit continuer à payer les mensualités ! En 1996, à 121 ans, elle enregistre son premier CD : La Farandole sur un rythme de rap. Elle y chante « Je suis une gamine finie ! »… et meurt quelques semaines plus tard.
6 février 1998 : Claude Érignac assassiné
La loi du silence
Une tragédie marque le début de l’année 1998 : le 6 février, le préfet de la région Corse, Claude Érignac, est abattu de trois balles de revolver dans la nuque dans une rue d’Ajaccio, alors qu’il se rendait au théâtre. Cet assassinat du représentant de l’État suscite de vives réactions d’indignation dans l’île et sur le continent. Il faudra des semaines d’enquête pour qu’au-delà de la loi du silence des indices suffisamment sûrs puissent permettre l’arrestation puis le procès des auteurs de l’attentat. Ce procès se déroule en juin et juillet 2003 à Paris.
Colonna en prison
Après six semaines d’audience et huit heures de délibération, le verdict tombe dans l’après-midi du 11 juillet 2003 : la cour d’assises spéciale de Paris condamne à la réclusion criminelle à perpétuité les deux cerveaux du crime. Six autres prévenus écopent de peines qui vont de quinze à trente ans de réclusion. L’assassin présumé, Yvan Colonna, aujourd’hui en prison après une cavale de quatre ans, a été arrêté le 4 juillet 2003, dans le sud de l’île, près de Propriano où il était berger, par les policiers du RAID. Son procès devrait avoir lieu dans les deux années qui viennent.
1998 : la France gagne au tiercé
Pauvre Aimé Jacquet ! Pendant toute la période de préparation de l’équipe de France qui va participer à la coupe du monde de football, il est la cible des journalistes, des critiques de toutes sortes. On le ridiculise, on le désapprouve ! Pourtant, il demeure ferme sur ses choix, sur sa politique d’entraînement. Les matches se déroulent en juin dans plusieurs villes de France. Le grand favori est le Brésil. C’est alors que se produit l’inattendu, mais pas l’inespéré : l’équipe de France de football se retrouve en finale contre le Brésil le dimanche 12 juillet 1998 ! Mieux : l’équipe de France de celui que tout le monde adule maintenant, et affuble de l’hypocoristique « Mémé » – Aimé Jacquet – bat le Brésil ! 3 buts à 0 ! C’est la première fois que la France remporte la coupe du monde de football depuis sa création. Les joueurs devenus des héros sont acclamés sur les Champs-Élysées par plus d’un million et demi de personnes. Le tiercé gagnant « black-blanc-beur » enrichit (d’espoirs, d’énergie, d’optimisme) la France tout entière – du moins celle qui aime le football.
1998, c’est aussi :
1999 : « Gai, gai, pacsons-nous ! »
En janvier 1999 commencent les discussions qui vont conduire le 15 novembre au vote de la loi concernant le PACS : le pacte civil de solidarité. Le PACS est un contrat passé devant le greffe du tribunal d’instance, et qui permet à deux personnes majeures, de sexe différent ou de même sexe, d’avoir une vie commune. Il apporte, en dehors du mariage, des avantages fiscaux, des solutions juridiques, de protection sociale ou de succession qui répondent à une attente et suppriment une certaine précarité dans des couples hétérosexuels ou homosexuels. Cette nouvelle possibilité d’union de deux êtres déclenche des réactions de rejet dans la plupart des sensibilités religieuses qui voient là une remise en question du mariage traditionnel et une fragilisation des valeurs de la conjugalité. Des manifestations sont organisées – dont l’une le 31 janvier 1999 qui rassemble 100 000 personnes. Cependant, le lundi 15 novembre 1999, la loi sur le PACS est votée.