La mort pour Sirven
Le 29 mars 1764, Sirven est condamné par contumace à la roue, sa femme à la pendaison et ses deux filles au bannissement. À Mazamet, on brûle leur effigie sur la place le 11 septembre ! Les Sirven prennent alors contact avec Voltaire qui, sept ans plus tard, va obtenir une révision du procès. Afin que celui-ci se déroule de nouveau, Sirven se constitue prisonnier, il est incarcéré à Mazamet. Le traumatisme causé par l’exécution, en 1762, du protestant Jean Calas qui était innocent, conduit les juges à reconstruire sans les excès du fanatisme toute la vérité. Le 25 septembre 1771, le Parlement de Toulouse prononce la cassation du jugement de Mazamet (1764). La ville de Mazamet est contrainte de verser une indemnisation à la famille Sirven.
L’affaire Calas, 1761
Un commerçant protestant dans une population catholique. Son fils meurt. La rumeur catholique se déchaîne. Une situation idéale pour que se déploie la verve de Voltaire.
Marc-Antoine veut se convertir
Jean Calas, né près de Castres en 1698, de famille protestante, épouse en 1731, Anne-Rose Cabibel, protestante comme lui. Il s’établit comme marchand linger, rue des Filatiers à Toulouse. Le couple donne naissance à quatre enfants : Marc-Antoine, Pierre, Louis et Donat. En 1756, sans doute sous l’influence de la très pieuse – et catholique – servante des Calas, Jeanne Viguière, Louis Calas se convertit au catholicisme. Trois ans plus tard, son frère est reçu bachelier en droit, mais ne pouvant soutenir sa licence parce qu’il est protestant, il envisage lui aussi de se convertir au catholicisme.
Si on invitait Gaubert…
Le 13 octobre 1761, Gaubert Lavaisse, jeune avocat de Toulouse, décide de rentrer chez ses parents afin d’y passer quelques jours. Il cherche un cheval de louage. Il fait alors la rencontre de Jean Calas et de son fils Marc-Antoine qui se promènent dans la ville. Gaubert reconnaît alors son ami Marc-Antoine et se dirige vers les deux hommes avec un large et bon sourire qui font sa réputation d’homme à la sympathie communicative. Il remarque immédiatement de la tristesse sur le visage de Marc-Antoine et cela ne l’étonne qu’à demi : Gaubert sait que depuis quelque temps l’aîné des Calas souffre de ce qu’on appelle aujourd’hui un état dépressif. Jean Calas se dit alors qu’inviter Gaubert à sa table pour le repas du soir distrairait son fils de ses pensées noires. Gaubert accepte.
La mort de Marc-Antoine
Le repas se déroule dans une atmosphère détendue. Mais avant la fin, Marc-Antoine demande à son père la permission de se retirer. Personne ne le reverra vivant : le repas terminé, Marc-Antoine est retrouvé mort par strangulation au rez-de-chaussée de la demeure des Calas ! Dès le lendemain, Jean Calas, son fils Pierre et Gaubert Lavaisse sont interrogés et, ne sachant pas ce qui s’est passé, soutiennent la thèse du meurtre par un inconnu, puis sur le conseil de leurs avocats, disent avoir trouvé Marc-Antoine pendu. Le 18 novembre 1761, les capitouls (magistrats municipaux) de Toulouse concluent à la culpabilité de tous ceux qui participaient au repas de ce soir-là : Jean Calas, Anne-Rose son épouse, Pierre son fils, Gaubert Lavaisse et Jeanne Viguière ! Cette sentence est le reflet d’une rumeur qui n’a cessé d’enfler : dans la bonne ville de Toulouse, le protestant Calas a assassiné son fils qui voulait se convertir au catholicisme !
Après le supplice de Calas, Voltaire intervient
Les accusés plaident leur innocence et font appel devant le Parlement de Toulouse. Le 9 mars 1762, se fondant sur l’enquête des capitouls, le Parlement condamne Jean Calas au supplice de la roue ! Il est exécuté le lendemain, 10 mars 1762, place Saint-Georges, clamant son innocence avec une fermeté remarquable, sous les coups du bourreau. Pierre Calas est banni, sa mère, Gaubert Lavaisse et Jeanne Viguière sont acquittés ! C’est alors que Voltaire reprend l’enquête, il démontre sans difficulté l’innocence de Calas et souligne les invraisemblances de l’enquête guidée par le fanatisme religieux.
Calas réhabilité
Le 1er mars 1763, la famille Calas est reçue à Versailles par Louis XV, la demande en cassation étant jugée recevable. Anne-Rose supplie Louis XV d’intervenir auprès du Parlement de Toulouse afin que son mari soit réhabilité. Après bien des réticences, l’incarcération des Calas pour que le procès puisse de nouveau avoir lieu, et la publication du traité sur la tolérance à l’occasion de la mort de Jean Calas, la réhabilitation de Jean Calas est obtenue le 9 mars 1765, à l’unanimité. Le capitoul David de Beaudrigue qui avait tout manigancé est simplement destitué.
L’affaire du chevalier de la Barre, 1764
Chef d’œuvre de l’intolérance, du mensonge et de la lâcheté, l’affaire du chevalier de la Barre fait frémir d’horreur. Elle est l’une des illustrations les plus dramatiques du fanatisme religieux au XVIIIe siècle.
Belleval lorgne l’abbesse gaie
Abbeville, 1764. Une abbesse gaie et enjouée est importunée par un sexagénaire de sa connaissance, nommé Belleval – il est lieutenant du tribunal –, qui voudrait entretenir avec elle davantage qu’une intimité platonique. Elle fait alors venir auprès d’elle son neveu, le jeune chevalier de la Barre qui, à dix-sept ans, admoneste vertement le sexagénaire. Quelque temps plus tard, on trouve sur le pont d’Abbeville un crucifix profané – mais qui a probablement été accroché par une charrette. Qui a fait cela ?
La Barre fait face
La consternation générale est telle qu’il faut trouver des coupables. Le sieur Belleval désigne alors le jeune chevalier et trois de ses compagnons qui sont passés quelque temps auparavant, à trente mètres d’une procession du Saint-Sacrement sans enlever leur chapeau ! De plus, il demande aux domestiques du chevalier de le dénoncer car il aurait, à la fin d’un banquet, chanté une chanson impie ! Emprisonné, le chevalier est condamné à avoir la langue arrachée, la main droite tranchée. Il va faire appel au Parlement au moment où celui-ci est accusé d’encourager l’impiété, ayant chassé les jésuites : l’appel est rejeté.
Voltaire s’enfuit…
Le roi Louis XV veut faire un exemple. Le 1er juillet 1766, le jeune chevalier innocent, âgé de dix-neuf ans, va mourir sur le bûcher, après qu’on lui a arraché la langue jusqu’à la racine, et coupé le poing ! On brûle avec lui un exemplaire du dictionnaire philosophique de Voltaire – celui-ci, menacé d’arrestation à cause de cette affaire, s’est enfui au pays de Vaud, en Suisse, avant de demander asile au despote éclairé Frédéric II le Grand, roi de Prusse. Voltaire tentera, de Prusse – après l’exécution –, de faire réhabiliter le chevalier, en vain. Il faut attendre la Convention, en 1793, pour que cette réhabilitation soit effective, le chevalier de La Barre devenant un martyr du fanatisme.
L’affaire du collier de la reine, 1784
« Tête à vent » fait des siennes ! « Tête à vent », rappelez-vous, c’est la reine Marie-Antoinette ainsi surnommée par son propre frère qui reproche à sa royale sœur sa légèreté ! En août 1784 commence une escroquerie dont elle va se trouver bien involontairement le centre, cible toute désignée pour la vindicte populaire qui va se déchaîner en 1789. Voici l’histoire :