– une croûte externe de trente-cinq kilomètres de profondeur, s'amincissant à onze kilomètres sous les océans ;
– le « manteau », région allant de la base de la croûte à deux mille neuf cents kilomètres de fond, et comprenant une zone de cent kilomètres rigide (la lithosphère), une zone partiellement en fusion, de plusieurs centaines de kilomètres (l'asthénosphère), et une zone de rigidité considérable (la mésosphère) ;
– le centre, dont la température serait de 6 000 °C, la température de la limite noyau-manteau étant vraisemblablement de 4 000 °C. La chaleur de la lithosphère est constante, mais cependant plus élevée le long d'une bande étroite au fond des océans, que l'on a nommée la chaîne médio-océanique.
Autre caractère des fonds sous-marins : une ligne de fosses entourant la Terre, large de seize kilomètres et profonde de sept à huit mille mètres, siège d'une grande activité sismique.
Il s'agit là, dans l'ensemble, d'un modèle supposé. Nous ne disposons d'aucun moyen de voir la Terre en coupe et aucun forage réellement profond n'a encore pu être effectué. Notre connaissance de l'intérieur du globe est donc très imparfaite, en grande partie hypothétique. Si un système permet un jour de « radiographier » la Terre, nous saurons si Hapgood a raison.
Cependant, même si sa théorie devait être abandonnée, la thèse de la dérive des continents retrouva un regain de valeur dans l'explication fournie en 1963 par deux professeurs américains, Hess (de Princeton) et Diez (de l'Experimental Science Service Administration). Hess et Diez pensent qu'il existe des soulèvements dans le manteau de la Terre, sous la ride médio-océanique.
Une croûte neuve se formerait au sommet de cette lignée de crêtes, alors que l'ancienne écorce serait absorbée par les fosses marines. C'est ainsi que le fond de l'océan situé entre les chaînes et celui des fosses se déplaceraient progressivement.
Si l'on éprouve de la difficulté à se représenter ce mécanisme de l'expansion du fond des mers, on peut utiliser l'analogie suivante : il suffit d'imaginer deux bandes transporteuses placées bout à bout, mais réglées de façon à tourner dans des directions opposées. L'espace qui les sépare représente la ride médio-océanique et leurs extrémités opposées, le côté le plus voisin des fosses. On pose des blocs de pierre sur chaque bande transporteuse, du côté de la crête, pour simuler un bassin, et l'on met l'installation en marche.
L'idée de l'expansion des fonds sous-marins est relativement récente. Si l'on obtenait des indications dans ce domaine, cela constituerait l'un des éléments les plus solides de la longue chaîne de preuves qui tendent à montrer la mobilité de l'écorce terrestre.
Si une nouvelle croûte se crée au niveau des chaînes, il faut que l'écorce plus ancienne soit détruite, quelque part, afin que la Terre garde toujours la même superficie. Selon l'hypothèse de l'expansion des fonds sous-marins, cette croûte est détruite à l'emplacement des fosses océaniques.
Par la violence et la fréquence des tremblements de terre, le système des fosses est la zone du globe la plus active. Dans ces régions, les tremblements de terre sont courants et importants. En outre, les fosses sont le lieu des plus profonds séismes connus, se produisant à sept cents kilomètres. Les tremblements de terre associés au réseau des fosses s'étendent sur un plan formant un angle d'environ 300 avec celui du bassin océanique. Certains tremblements de terre ont lieu sous les fosses.
À l'heure actuelle, les preuves de l'expansion des fonds marins et de la mobilité de l'écorce terrestre ne manquent pas. De plus, des études sismiques permettent de saisir ce qui se passe de nos jours à la surface de la Terre.
En outre, les continents se déplaçant en même temps que le fond de l'océan, il semble inévitable que deux ou plusieurs masses continentales doivent finalement entrer en collision.
La ride médio-océanique est au contact d'une masse continentale en deux points : le golfe de Californie et la mer Rouge. Dans les deux cas cela entraîne une grande activité tectonique. La mer Rouge s'est formée à la suite de la séparation de la péninsule d'Arabie et du continent africain. Il semble que la Californie soit en train de se détacher le long de la fissure de San Andrea, à la vitesse de cinq centimètres par an. Si le mouvement actuel se poursuit, dans quelques millions d'années la Californie sera devenue une île.
On ne connaît pas actuellement la nature précise des mouvements du manteau. Il faut attendre le résultat des études poursuivies. Quoi qu'il en soit, la manifestation de ces forces affecte profondément la race humaine, et leur compréhension ouvre des hypothèses nouvelles et fantastiques sur le passé et l'avenir.
L'explication de Hess et de Diez, par expansion des fonds sous-marins, semble préférable à la thèse de Hapgood, qui suppose l'existence d'une couche visqueuse sur laquelle voguerait la croûte terrestre. La température de la limite entre le centre et le manteau est, nous l'avons signalé, de 4 000 0C. On ne voit pas comment cette température pourrait provoquer la formation d'une viscosité permettant le glissement rapide des continents. Cependant, nous ignorons beaucoup de choses sur les propriétés de la matière aux hautes températures combinées avec des pressions considérables.
Pour Hapgood, si l'on trouve des fossiles tropicaux dans l'Antarctique, c'est qu'il fut une époque où ce continent se trouvait à l'Équateur, puis a dérivé. Voici dix à quinze mille ans, l'Antarctique se trouvait à quatre mille kilomètres environ plus au nord. Le climat était tempéré. C'est alors que, pour des causes inconnues, un âge glaciaire commença. La glace s'accumula d'abord aux pôles, fondant et atteignant les zones tempérées. Sous l'effet des forces centrifuges produites par les deux centres de gravité des calottes polaires, la croûte terrestre commença de glisser, la baie d'Hudson et le Québec se déplacèrent en quatre mille kilomètres vers le sud, la Sibérie vers le nord, l'Antarctique vers le sud. En quelques milliers d'années, l'Antarctique atteignit le pôle Sud et le climat actuel s'y établit. C'est ce chiffre de dix à quinze mille ans seulement que la plupart des géologues se refusent à admettre. Cependant, la fonte des glaces en Amérique fut soudaine, à l'échelle géologique (quelques milliers d'années au plus) ; ainsi que la glaciation en Sibérie.
Quoi qu'il en soit, la géologie moderne rend plausible l'hypothèse initiale de Wegener ; la dérive des continents semble une réalité, même si son mécanisme demeure incertain, qu'il s'agisse du glissement des terres sur une couche visqueuse ou d'un élargissement du fond des océans. Et, si l'on admet la possibilité de grandes civilisations disparues sans laisser de traces, c'est sans doute plutôt du côté de ces phénomènes géologiques qu'il faudrait aller nourrir notre rêverie, que du côté des continents engloutis, Mu ou Atlantide, chers aux théosophes.
Un mot, en passant, sur l'Atlantide. Nous nous rangeons volontiers, quant à nous, à la thèse russe selon laquelle l'Atlantide n'aurait pas été un continent, mais l'île de Thêra, colonie crétoise en Méditerranée, que l'explosion du volcan Santorin, vers l'an 3 000 avant J.-C., aurait détruite.
Mais revenons à Hapgood. On est amené à supposer avec lui qu'une civilisation existait en Antarctique ou que d'autres civilisations eurent connaissance de ce continent avant la glaciation qui devait entraîner son relativement brusque déplacement. Peut-être des vestiges dorment-ils sous les glaces. Et l'on peut se demander si ne reposent pas, pour les mêmes raisons, à l'extrême Nord, d'autres traces de civilisations enfouies sous les glaces du Groenland, lequel correspondrait peut-être aux légendes de Thulé, d'Hyperborée et de Numinor.