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[262] On appelait modorros des filous expérimentés qui passaient à dormir la moitié de la nuit, et venaient, comme des troupes fraîches, tomber à minuit sur les joueurs échauffés, qu’ils achevaient aisément de dépouiller. C’est ce qu’ils nommaient, dans leur jargon, se réserver pour la glane (quedarse a la espiga).

[263] Le mot espagnol dormir signifie également coucher. De là l’espèce de coq-à-l’âne qui va suivre.

[264] Les hauts-de-chausses appelés calzas atacadas, serrés et collant tout le long de la jambe, arrondis et très-amples depuis le milieu de la cuisse, avaient le nom populaire de pedorreras, auquel je n’ai trouvé d’autre équivalent supportable en français que pet-en-l’air. Ces hauts-de-chausses furent prohibés par une pragmatique royale, peu après l’époque où parut la seconde partie du Don Quichotte. Ambrosio de Salazar raconte qu’un hidalgo ayant été pris vêtu de calzas atacadas, malgré la prohibition, fut conduit devant le juge, et qu’il allégua pour sa défense que ses chausses étaient la seule armoire qu’il eût pour serrer ses hardes. Il en tira effectivement un peigne, une chemise, une paire de nappes, deux serviettes et un drap de lit. (Las Clavileñas de recreacion, Bruxelles, 1625, f. 99.)

[265] Comme les gens de qualité, qui portaient en voyage une espèce de voile ou masque fort léger pour se garantir la figure de l’air et du soleil. Le peuple appelait ces masques papa-higos, gobe-figues.

[266] Jurer par la vie de ses père et mère était une formule de serment très-usitée du temps de Cervantès.

[267] De stercore erigens pauperem. (Ps. CXII, v. 7.)

[268] Voyez la note 250 – chapitre XLVII.

[269] De haldas o de mangas. Ces mots ont chacun un double sens: l’un, qui veut dire les pans d’une robe de magistrat, signifiait aussi les droits à percevoir comme gouverneur; l’autre, qui veut dire les manches, signifiait les cadeaux qui se faisaient aux grandes fêtes de l’année, comme Pâques et Noël, ou aux réjouissances publiques, comme l’avènement d’un nouveau roi. De là le proverbe: Buenas son mangas despues de Pascuas.

[270] On lit dans un auteur économique du temps de Cervantès: «Tandis que, ces années passées, le blé se vendait au poids de l’or à Ségovie, que le prix des loyers montait au ciel, et qu’il en était de même dans les autres villes, une paire de souliers à deux semelles valait trois réaux (quinze sous), et à Madrid quatre. Aujourd’hui on en demande effrontement sept réaux, sans vouloir les donner à moins de six réaux et demi. Il est effrayant de penser où cela va s’arrêter.» (Man. de la Bibl. royale. – Code 156, f. 64.) Une pragmatique de Charles-Quint, rendue à Monzon en 1552, avait établi un tarif pour le prix des souliers et de toute espèce de chaussure.

[271] Expression fort usitée dans un temps où Rome dispensait toutes les faveurs et tous les pardons.

[272] Tarde piache (pour piaste), phrase proverbiale dont voici l’origine: on raconte qu’un étudiant, mangeant des œufs à la coque, en avala un si peu frais que le poulet s’y était déjà formé; il l’entendit crier en lui passant dans la gorge, et se contenta de dire gravement: Tu piaules trop tard.

[273] Il y a là un intraduisible jeu de mots sur nones, qui veut dire impairs et non au pluriel, et pares, pairs.

[274] Allusion au proverbe: Les ailes sont venues à la fourmi, et les oiseaux l’ont mangée.

[275] Alpargatas, chaussure ordinaire des paysans espagnols.

[276] En Espagne et en Amérique, les vice-rois, gouverneurs et agents financiers devaient, en quittant leur emploi, résider quelque temps pour rendre leurs comptes.

[277] Du mot allemand Geld, qui veut dire argent.

[278] Cervantès parle, dans ce chapitre, du plus grave des événements dont il fut témoin, l’expulsion des Morisques. Après la capitulation de Grenade, en 1492, un grand nombre de Mores, restés musulmans, séjournèrent en Espagne. Mais bientôt, aux missions envoyées parmi eux, succédèrent les persécutions; et enfin un décret de Charles Quint, daté du 4 avril 1525, ordonna, sous peine de bannissement, que tous les Mores reçussent le baptême. Ces chrétiens convertis par force furent alors appelés du nom de Morisques (Moriscos), qui servait à les distinguer des vieux chrétiens. Sous Philippe II, on exigea plus que leur abjuration: en 1566, on leur défendit, par une pragmatique, l’usage de leur langue, de leurs vêtements, de leurs cérémonies, de leurs bains, de leurs esclaves et même de leurs noms. Ces dispositions tyranniques, exécutées avec une impitoyable rigueur, provoquèrent la longue révolte connue sous le nom de rébellion des Morisques, qui tint en échec toute la puissance de Philippe II, et ne fut étouffée qu’en 1570, par les victoires de don Juan d’Autriche. Les Morisques vaincus furent dispersés dans toutes les provinces de la Péninsule; mais cette race déchue continuant à prospérer, à s’accroître, par le travail et l’industrie, on trouva des raisons politiques pour effrayer ceux que ne touchait pas suffisamment le fanatisme religieux déchaîné contre elle. Un édit de Philippe III, rendu en 1609, et exécuté l’année suivante, ordonna l’expulsion totale des Morisques. Douze à quinze cent mille malheureux furent chassés de l’Espagne, et le petit nombre d’entre eux qui survécurent à cette horrible exécution allèrent se perdre, en cachant leur origine, au milieu des races étrangères. Ainsi l’Espagne, déjà dépeuplée par les émigrations d’Amérique, se priva, comme fit plus tard la France à la révocation de l’édit de Nantes, de ses plus industrieux habitants, qui allèrent grossir les troupes des pirates de Berbérie, dont ses côtes étaient infestées. (Voir l’Histoire des Arabes et des Mores d’Espagne, tome I, chap. VII.) Au milieu des ménagements dont Cervantès s’enveloppe, il est facile de voir que toute sa sympathie est pour le peuple opprimé.

[279] C’est le caviar des Russes.

[280] Un autre écrivain du temps de Cervantès, Cristoval de Herrera, avait dit quelques années plus tôt: «Il faudrait empêcher que les Français et les Allemands ne parcourussent ces royaumes en nous soutirant notre argent, car tous les gens de cette espèce et de cet habit nous en emportent. On dit qu’en France les parents promettent pour dot de leurs filles ce qu’ils rapporteront de leur voyage à Saint-Jacques-de-Compostelle, allée et retour, comme s’ils allaient aux Grandes-Indes.» (Amparo de pobres)