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Stop one kilometer ahead. Customs.

Il était presque arrivé. Il jeta un coup d’œil dans le rétroviseur. Ses poursuivants se rapprochaient maintenant. Il écrasa l’accélérateur, mais cette fois sans résultat. Un bruit bizarre se fit entendre sous le capot et de la fumée blanche commença à en filtrer, se rabattant à l’intérieur à cause du pare-brise absent. Il jurait tout seul, accroché à son volant comme à une bouée de sauvetage, apercevant dans le lointain les lumières de la frontière. Hélas, à cette heure tardive il n’y avait personne sur la route.

Tout à coup, il n’eut plus rien sous le pied ! Le moteur venait de s’arrêter. Il passa en neutre, perdant encore de la vitesse, tentant désespérément de remettre en route. En vain, le démarreur n’accrochait pas ! Il remit en « D », sans plus de résultat. Tous les voyants rouges étaient allumés, formant un halo sinistre devant lui. La Sierra filait en roue libre. Il se retourna : les deux véhicules arrivaient à toute vitesse. Dans quelques instants, ils l’auraient rattrapé.

Il y eut un claquement sec : la portière de droite venait de s’ouvrir. Une forme glissa du plancher à l’extérieur avant qu’il puisse intervenir.

Wanda !

Pris par ses problèmes mécaniques, il avait négligé sa surveillance. Dans le rétroviseur, il la vit se relever et partir en courant vers les Land-Rover.

Il braqua sur la gauche et la Sierra vint mourir sur le bas-côté. D’un coup d’épaule, il ouvrit la portière, et sauta à terre. Les deux Land-Rover étaient à cinquante mètres. Il partit en courant à travers le bush, perpendiculairement à la route, priant pour un miracle. Ses adversaires allaient le massacrer tranquillement dans cet espace découvert sans le moindre endroit où se dissimuler.

Chapitre XIV

Malko courait à travers le bush. Il se retourna : la lune éclairait le ruban plus sombre de la route où il distinguait vaguement les véhicules arrêtés. Une douleur cuisante au visage. Il n’avait pas vu la branche d’un épineux qui venait de lui déchirer la peau. Il porta la main à sa joue, sans s’arrêter, sentit le contact poisseux du sang. Un peu plus, c’était l’œil. Ses poumons commençaient à le brûler. Il ralentit, prêtant l’oreille, entendit le bruit d’une course derrière lui. Jusque-là, ses adversaires n’avaient pas tiré. La frontière se trouvait à moins d’un kilomètre, mais le poste de police sud-africain était trop loin pour qu’il y arrive avant ses poursuivants.

Il comprit qu’il n’y avait qu’une solution. Donner l’alerte. Évidemment, du même coup, il se faisait repérer. Mais c’était la seule chance.

Un gros épineux lui barrait la route. Il se jeta à l’abri du tronc, laissant les battements de son cœur se calmer. Puis, posément, il leva le bras et appuya sur la détente du Browning. Une fois, deux fois, trois fois. En direction de ses adversaires… Dans le silence de la nuit, les détonations furent encore plus assourdissantes.

Personne ne riposta. Ils n’étaient pas tombés dans le piège… Malko attendit, tapi derrière l’épineux, une réaction du côté de la frontière. Rien. Scrutant l’obscurité, il lui sembla alors apercevoir à une centaine de mètres, une silhouette se déplacer vers lui en courant. Ceux qui le poursuivaient l’avaient repéré. Ils allaient lui couper la route de la frontière !

D’un bond, il repartit droit vers les lumières du poste-frontière. Le sang coulait de son visage. La lune et le ciel clair ne lui facilitaient pas la tâche.

« Clac-clac-clac-clac-clac. »

La rafale le cueillit par surprise. Instinctivement, il plongea à terre. Cela venait d’un point situé entre la frontière et lui… Ils avaient réussi leur manœuvre d’encerclement. Il releva la tête, cherchant à apercevoir ses adversaires. En vain. Ils pouvaient être embusqués derrière un épineux ou tout simplement à terre comme lui. Invisibles. La différence c’est quelui avait à bouger. Patiemment, il se mit à ramper. Toujours aucune réaction chez les Sud-Afs.

Il repartit à quatre pattes, avec une prudence de Sioux, s’arrêtant tous les dix mètres. Jusqu’à un autre épineux… Il allait le quitter lorsqu’il devina en face de lui une forme qui se déplaçait doucement : un homme en train de ramper, un PM dans la main droite… Celui-ci ci le vit à son tour. Malko appuya sur la détente du Browning une fraction de seconde avant son adversaire. La rafale de son PM partit vers le ciel. L’homme retomba.

Malko entendit un appel sur sa droite, puis des pas pressés. Il se rua en avant et plongea à côté de celui qu’il venait d’abattre. À son immobilité, il réalisa aussitôt qu’il était mort. Il récupéra son PM, trouva un sac de toile plein de chargeurs et s’éloigna en rampant.

Bien lui en prit. Une rafale balaya l’endroit qu’il venait de quitter, faisant sauter des pierres un peu partout. Quand Malko voulut se redresser, une balle siffla tout près de sa tête. Il aperçut plusieurs hommes qui ne se cachaient même pas, dressés devant lui, coupant l’accès à la frontière. Il lâcha à son tour une rafale pour se couvrir et reprit sa course d’épineux en épineux, parallèlement à la frontière.

« Poum-poum-poum-poum. »

Il s’arrêta, le cœur dans la gorge. Une mitrailleuse lourde juste devant lui. Aussitôt, le son plus clair et plus saccadé d’un pistolet-mitrailleur lui succéda.

Tassé contre un tronc rugueux, il écouta. Cette fois, il entendit nettement un bruit de moteur ! Il y eut de nouveau des coups de feu, puis deux hommes passèrent en courant en direction de la route, à une vingtaine de mètres. Trente secondes plus tard, la silhouette d’un véhicule approcha. Malko allait lui faire signe, lorsqu’une voix sèche dit derrière lui :

— Laat val fou pistool[35] !

Il se retourna, devina dans la pénombre un homme avec un chapeau de toile, braquant sur lui un fusil d’assaut.

— J’en ai un ! cria en afrikaans celui qui le tenait sous le feu de son arme.

Malko se redressa, les mains en l’air. C’eût été trop bête de se faire abattre par ses amis. Une Range-Rover surgit en cahotant, escortée de plusieurs soldats noirs et blancs. Une torche fut braquée sur lui et un soldat s’exclama :

— My magtig ! Dit is in blanke[36] !

— Je suis un ami, dit aussitôt Malko en anglais. Je travaille avec le major Carl van Haag.

On l’entoura. Visiblement, les Sud-Afs n’en revenaient pas de trouver un Blanc au milieu du désert ! Il aperçut le canon noir d’une mitrailleuse de 50 montée sur la Range-Rover. Un officier lui dit de s’installer à l’avant de la Range.

— Vous êtes seul ? demanda-t-il.

— Oui.

— Bien. On vous emmène chez nous.

La Range démarra et s’arrêta quelques instants plus tard à côté de celui que Malko avait abattu. L’officier sud-africain se pencha sur le corps, fouilla les poches, et remonta.

— ANC, annonça-t-il laconiquement.

Dix secondes plus tard, ils roulaient à toute vitesse dans le bush, sans phare. Malko grelottait, le sang continuait à couler sur son visage. L’officier, un jeune moustachu, lui demanda :

— Qu’est-ce que vous foutiez là ?

— J’ai été attiré dans un guet-apens, expliqua Malko. Je travaille avec vos gens de Gaborone. Ma voiture est tombée en panne.

— Bon, bon, on va vérifier tout cela, grommela l’officier.

* * *

Les tasses de thé se succédaient, toutes plus brûlantes les unes que les autres. Malko, le visage couturé de sparadrap, pansé, réchauffé, se disait qu’il n’avait jamais connu de lieu plus confortable que ce petit poste de police sud-africain, avec son râtelier d’armes, son vieux téléphone manuel et le mobilier administratif patiné. Le lieutenant Vryburg, celui qui l’avait sauvé, n’arrêtait pas de tirailler sa grosse moustache blonde, tout excité d’être mêlé à une affaire confidentielle. Les vérifications n’avaient pas été longues. Carl van Haag avait identifié Malko comme un membre à part entière des Services de renseignements sud-afs… Il était en route pour le récupérer.

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35

Lâche ton pistolet !

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36

Bon sang ! C’est un Blanc !