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Là, il paraissait sincère. Il tourna à droite dans une petite voie sans nom et s’enfonça dans un quartier pauvre. Jusqu’à une allée en terre battue où la Jaguar se mit à cahoter.

— C’est là, dit l’Italien d’une voix étranglée.

Malko aperçut, sur leur gauche, un long bâtiment gris au toit de tôle ondulée au milieu d’un jardin maigrichon. Ils parcoururent encore quelques mètres et l’Italien dut faire demi-tour, la voie se terminant en impasse. Les phares de la Jaguar éclairèrent un panneau : Phuku Close.

Au moment où ils repassaient devant le bâtiment, un projecteur s’alluma, prenant la voiture dans son pinceau lumineux ! L’Italien jura et accéléra brutalement, suivi par le faisceau.

Malko se retourna au moment où le projecteur s’éteignait. Cet incident confirmait les dires de l’Italien. Il venait probablement de trouver la planque secrète des assassins de Johanna et de Ferdi.

Il fallait agir vite.

— Ramenez-moi auGaborone Sun, dit Malko, et ne parlez de cette promenade à personne.

L’Italien ne répondit pas, crispé sur son volant, blanc comme un linge.

* * *

Gudrun Tindorf, les pupilles agrandies par la peur, un Beretta au poing, vêtue du T-shirt qu’elle mettait pour dormir, surveillait la porte par où Wanda était allée aux nouvelles, quelques minutes plus tôt. L’Allemande, qui ne dormait pas, avait entendu le bruit de la voiture dans Phuku Close. Un véhicule, à cet endroit et à cette heure, c’était un signal d’alarme. Elle était arrivée la veille au soir d’Afrique du Sud, après un voyage de cauchemar et ses nerfs étaient à bout. D’où elle était, elle entendait les Noirs s’interpeller dans le hangar. Joseph Grodno devait être réveillé aussi.

Wanda réapparut. Elle avait juste passé un jean et un T-shirt blanc.

— Ils ont reconnu la voiture de mon Jules, dit-elle avec un sourire contraint. Il doit me chercher.

Gudrun eut l’impression qu’une main glaciale lui serrait le cœur.

— Ton Jules ! Il connaît cet endroit ?

Wanda baissa les yeux. La gifle de Gudrun partit à toute volée. Jetant le pistolet sur le lit, elle marcha sur la métisse. Cette fois, de la main droite, elle la frappa de nouveau, les lèvres serrées, les yeux glacés, et continua, alternativement des deux mains, de toutes ses forces. Jusqu’à ce que Wanda s’effondre à ses pieds, en larmes.

— Imbécile ! Pauvre conne ! siffla l’Allemande. Tu veux nous faire prendre !

D’un coup de genou, elle repoussa Wanda qui sanglotait toujours, puis revint, rampant comme un chien puni, serrant les jambes de Gudrun Tindorf.

— Je te demande pardon, je ne savais pas, bredouilla-t-elle.

— Imbécile !Dummkopf[39] ! répéta l’Allemande.

Peu à peu, elle se calmait, reprenant son sang-froid.

Doucement, Wanda se redressa puis l’étreignit, le visage baigné de larmes.

— Pardon ! Pardon !

— Bon ça va, arrête ! fit sèchement Gudrun.

Wanda rapprocha son visage du sien, murmura :

— Tu m’aimes quand même ? Dis ?

— Oui, oui, fit Gudrun d’un ton excédé, mais tu es une conne imprudente.

Wanda l’entraîna vers le lit, l’y poussa et sans cesser de pleurer, enfouit son visage entre les cuisses musclées de l’Allemande. Celle-ci, les yeux au plafond, n’était guère sensible aux efforts de sa compagne. Son cerveau s’était remis en marche, cherchant le meilleur moyen de limiter les conséquences de l’imprudence de la métisse.

Il fallait agir vite.

Chapitre XVI

Carl van Haag tournait machinalement sa cuillère dans sa tasse de café, écoutant le récit de Malko. La véranda embaumait, le ciel était immaculé et il faisait déjà une chaleur de bête, bien qu’il ne soit que sept heures du matin. Le Sud-Africain abandonna sa cuillère et dit posément :

— Je crois que vous avez gagné le jackpot. J’envoie immédiatement un rapport au NSC. Il faut détruire ce nid de vipères. Les faits sont assez graves pour justifier une action de commando. Seulement ce genre de décision doit être prise au plus haut niveau.

— Il faudrait d’abord s’assurer que ceux que nous cherchons sont bien là, remarqua Malko.

— Je mets immédiatement deux de mes adjoints en planque, dit le major. Ce sont des Noirs, ils se feront moins facilement repérer. Phuku Close est facile à surveiller.

— Comment comptez-vous agir ? demanda Malko.

Le major écarta une guêpe trop gourmande.

— Comme l’année dernière au Lesotho. Après avoir eu la confirmation que ces salauds sont bien là. Une trentaine d’hommes suffiront, mais il faut avertir les Botswanais.

L’année précédente, un commando sud-africain avait attaqué et détruit une base terroriste de l’ANC au Lesotho.

— Peut-être que ce Marcello ne m’a pas tout dit, remarqua Malko. Je vais lui rendre visite, en attendant que vous ayez la réponse de Pretoria. Retrouvons-nous pour faire le point au déjeuner.

* * *

C’est en arrivant auGaborone Sun que Malko réalisa qu’il ignorait où demeurait l’Italien ! Une seule personne pouvait l’aider : Carol. La réception était déserte. Il la contourna, poussa une porte et aperçut des cheveux roux. Carol se leva aussitôt, sexuelle en diable dans sa robe de toile rouge ultra-moulante, vint embrasser Malko et mit le verrou à sa porte…

— J’espère que tu viens pour une bonne raison, fit-elle avec un sourire trouble.

— Je veux savoir où habite Marcello, dit-il.

— Tu as viré ta cuti ?

Elle avança la main pour s’assurer du contraire.

— Non, dit-il, mais c’est important.

— Il habite quelque part du côté de Sobuza Road, dans le quartier des ambassades. Une villa jaune. Il a une Jaguar noire…

— Merci, dit Malko.

Il s’apprêta à sortir. Carol lui barra le chemin, appuyée à la porte, le bassin en avant, ses yeux verts arborant une expression sans équivoque. Décidément, elle confondait le yoga et le kamasoutra. Avec une lenteur calculée, elle commença à défaire les boutons du bas de sa robe, découvrant un charmant triangle de nylon blanc.

Sans un mot, elle le fit glisser le long de ses jambes. Puis s’appliqua à mettre Malko en condition. Lorsqu’il la prit, elle poussa un « ah » rauque et ses ongles s’enfoncèrent dans sa nuque. Ce fut une étreinte rapide et exquise. Quand, à peine rajusté, Malko referma, la porte du bureau, Carol se baissait pour récupérer son slip tombé dans la corbeille à papiers. Dehors, il faisait horriblement chaud et le bitume de Nyerere Drive semblait fondre sous le soleil.

* * *

Marcello Dente lisait unPenthouse, allongé au bord de sa piscine – luxe inouï à Gaborone – lorsqu’il entendit du bruit derrière son portail. Son doberman se mit aussitôt à gronder.

— Il y a quelqu’un ? cria l’Italien.

Pas de réponse. Il allait reprendre sa lecture lorsqu’il vit une silhouette surgir en haut de son mur d’enceinte, près du portail, en train de l’escalader tranquillement !

L’homme se laissa tomber dans son jardin. Un métis, petit et trapu, le béret enfoncé jusqu’aux oreilles.

— Hé, attention au chien ! cria Marcello.

Déjà le doberman se ruait vers l’intrus, écumant, les babines retroussées. Le Noir demeura accroupi. D’un geste fulgurant, il arracha une machette de sa ceinture et balaya l’espace, à l’horizontale, juste au moment où le chien arrivait. L’aboiement se transforma en gargouillis. Il s’écroula, les pattes secouées par les sursauts de l’agonie, la tête presque détachée du corps ! Dans un flot de sang.

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Idiote !