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— Pas de (biperie) ?

— Non. Il n’y a que nous qui sachions faire ça. Personne ne le saura. Le Serment d’Hippocrate et tout ça, tu saisis ?

— Oui, c’est comme la loi du silence ?

— Absolument. Mais revenons à nos affaires. Tu connais les caïds d’Atlantic City, hein ? Tu connais des tas de gangs, hmm ?

— Exact.

— Et tu sais que ces gangs cachent des gens partout. Que ces gens ne peuvent pas se montrer à cause des dossiers du FBI et d’Interpol qui ont leurs empreintes et leur description. Exact ?

— Exact.

— Si on nous amène ces gens-là, dans notre bel Hôpital Mondial de la Pitié et de la Charité, nous pourrons modifier leur identité physique et leur fournir de nouveaux certificats de naissance, de nouveaux passeports, tout cela pour un bon prix, d’accord. Et toi, tu toucheras vingt pour cent de ce qu’ils balanceront.

Il se procura rapidement une serviette en papier et se mit laborieusement à coucher des chiffres par écrit. Il déclara au bout d’un moment :

— Je vais faire fortune.

— Exact.

— Mais il y a une chose qui cloche. Je peux faire passer le mot. Je peux avoir très vite des tas de célébrités. Mais ce n’est pas possible.

— Pourquoi ?

— Parce que j’ai déjà un boulot. Un contrat.

— Je sais. Gunsalmo Silva.

— Et comment vous êtes au courant ?

— J’ai mes sources d’information. (Je le fixai d’un air hautain.) Gunny Silva ne sera pas de retour avant sept semaines. Tu en as donc six pour trouver des clients pour l’hosto.

— Je vais avoir besoin de fric pour mes frais. Je ne peux pas taxer Babe pour ça.

— Prends-le sur ton avance.

— Hey ! s’exclama-t-il, tout ravi.

— Et, ajoutai-je, si tu te débrouilles pour nous avoir pas mal de clients et de blé pour que nous commencions dans deux mois, j’ajouterai peut-être un petit bonus.

— Vraiment ?

— Ouais. Je te refilerai Gunsalmo Silva sur un plateau d’argent.

— Sans (débiper) ?

— Tu le tireras comme un pigeon !

Il y avait des larmes de gratitude dans ses yeux. Il tendit la main.

— Mec, on marche ensemble !

Ah, la psychologie. Ça fonctionne toujours !

Quelques instants plus tard, j’étais dans ma voiture et je démarrais en fendant la foule qui vociférait sur mon passage.

J’avais l’impression d’être sur des nuages !

Soltan Gris, alias Sultan Bey, était en route vers la fortune ! Une sacrée fortune !

Après tout, le Grand Conseil n’avait-il pas ordonné de répandre un peu de technologies nouvelles sur cette planète ? Et dans des domaines où ça lui ferait le plus grand bien ?

3

Le soleil était chaud, le ciel clair, et je dévorais la route.

Et puis je me souvins qu’il y avait même une danseuse qui m’attendait !

Les perspectives étaient tellement prometteuses que je me laissai aller à chanter, ce que je ne faisais presque jamais :

Frankie et Jonnie s’aimaient d’amour tendre Et passaient leur temps à s’étreindre. Ils se promirent d’être toujours fidèles Aussi longtemps qu’il y aurait des étoiles dans le ciel.

Il y avait un obstacle devant moi. Une file de dix chameaux chargés de bâts. Ils avançaient tête baissée en blatérant mais je ne vis nulle part de chamelier. Le klaxon de la Renault était hors d’état et je passai sur l’autre file pour essayer de voir ce qui se passait à l’avant.

Ah ! Ah ! Je l’aurais juré !

Dans le coin, ils se contentent souvent de mettre un âne en tête de la file de chameaux avec une corde. L’animal sait où aller et les chameaux le suivent. Ce qui montre à quel point ils sont intelligents puisqu’un âne arrive à les guider !

C’était une occasion à ne pas laisser passer !

Je me remis à chanter à tue-tête :

Car c’était un homme ! Mais il m’a trompée !

Je me rabattis devant l’âne. A cause de ma chanson ou du pare-chocs qui venait de surgir sous son museau, il disparut dans le champ de tournesols. La corde cassa et les dix chameaux, instantanément, se lancèrent à la poursuite de l’âne, semant leur chargement.

Qu’est-ce que je me marrais !

Je roulai jusqu’au Centre International de Formation Agricole, dégommai un panneau de stationnement interdit qui n’aurait jamais dû se trouver là et me précipitai dans le bureau du commandant de la base.

Il y avait un contraste évident entre mon humeur et l’expression qu’il affichait sur son visage.

Il gémit et prit sa tête entre ses mains pendant un moment avant de me regarder.

— Officier Gris, est-ce que nous ne pourrions pas avoir un peu moins d’agitation dans la région ?

— Qu’est-ce que c’est qu’un panneau marqué « stationnement interdit », hein ?

— Non. Non, ce n’est pas ça. Hier soir, c’était cette bagarre, et aujourd’hui nos agents en ville nous rapportent que des conducteurs de charrettes n’ont pas cessé de se plaindre. Il y a eu aussi des plaintes de la police sur vos stationnements en double file. Il y a un instant, on m’a appelé pour me dire que vous et un autre gangster, vous tiriez des coups de feu dans un hôtel. Je vous en prie, officier Gris… Nous ne sommes pas censés nous faire remarquer par ici. Avant votre arrivée, tout allait…

— Vous n’étiez pas adaptés à cette planète c’est tout ! Vous êtes en train de devenir des ploucs, des culs-terreux ! Vous n’arrivez pas à suivre. Vous n’avez pas su faire corps avec ce monde. Laissez-moi m’occuper de ces choses-là. Je suis un spécialiste du comportement social de Blito-P3. Vous devriez aller voir les films qu’ils font. Même ceux qu’ils tournent en Turquie ! On y voit des gens qui n’arrêtent pas de tuer et de tout faire sauter ! Mais je n’ai pas le temps de vous apprendre les secrets de la psychologie de ce monde. Je suis là pour travailler.

Je balançai la pile de contrats sur son bureau et il la prit d’un geste las en secouant la tête.

— Un hôpital ? Un demi-million de dollars ?

— Exactement. Laissez-moi la partie politique, Faht Bey.

— Mais cela n’a pas été approuvé par le Conseil Local des Officiers. Notre expert-comptable va s’évanouir !

Cet expert-comptable, je le connaissais. C’était un réfugié de Beyrouth, au Liban. Un de leurs meilleurs banquiers jusqu’à ce que la guerre vienne ruiner la finance et l’oblige à fuir. Un Libanais particulièrement roublard.

— Dites-lui d’ôter ses pattes de la caisse avant que je ne les lui coupe, dis-je. Ce qui me fait penser que je vais être à court de livres. Donnez-m’en trente mille, cette fois !

Il se dirigea en tremblotant vers la pièce du fond et revint avec ce que j’avais demandé. Il nota la somme dans un registre, puis compta dix mille livres qu’il glissa dans sa poche !

— Eh là ! Qui est-ce qui vous a donné le droit de dérober l’argent du gouvernement ?

Ça, je peux vous le dire, j’étais furieux.

Il me tendit les vingt mille livres restantes.

— Il a fallu que je paie la fille. De ma poche.

— La fille ? Pourquoi ?