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Vers 5000 av. J.-C., les côtes sont déjà très peuplées. Les hommes sont établis tout le long du littoral pacifique et sur la côte atlantique, qu’ils jalonnent d’immenses amas de coquilles et de déchets divers. Environ un millénaire plus tard, les premières traces d’agriculture apparaissent : le haricot, la courge, un peu plus tard le coton sont cultivés sur la côte pacifique, mais les hommes vivent encore surtout de pêche et de cueillette. Les maisons de ces premiers sédentaires, retrouvées au Pérou, sont petites, souvent semi-souterraines, aux parois de terre sèche ou de galets couvertes d’un toit de roseaux. Le maïs, probablement apporté de Méso-Amérique et qui deviendra très vite le principal produit alimentaire, n’est cultivé qu’à partir du IIe millénaire avant notre ère. Quant à la poterie, elle apparaît à des dates différentes suivant les régions, soit dans un contexte préagricole (sur les côtes équatoriennes et colombiennes), soit chez des cultivateurs (au Pérou, au Venezuela). Cette poterie fut-elle inventée sur place ou apportée d’un autre pays ou d’un autre continent ? Le problème n’est pas résolu et les thèses s’affrontent.

Ces diverses innovations techniques marquent le début des véritables

cultures précolombiennes et inau-

gurent une longue période, dite souvent

« formative » ou « expérimentale », pendant laquelle ces cultures vont se constituer et se développer. À partir de ce moment, il devient impossible de retracer dans un tableau d’ensemble l’évolution générale des cultures sud-américaines. Lorsque apparaissent, simultanément ou non, l’agriculture et la poterie, chaque région, chaque aire culturelle va peu à peu acquérir sa personnalité et évoluer selon un rythme

qui lui sera propre.

L’influence du milieu géographique sera primordiale ; l’altitude et la sécheresse des régions andines, l’exubérance de la végétation amazonienne, l’aridité venteuse des pampas vont influer de façon déterminante sur l’évolution culturelle. Au moment où les Européens découvriront l’Amérique du Sud, ils seront confrontés à trois types principaux de culture : l’un, le moins évo-lué, fondé sur la chasse et la cueillette, et les deux autres sur une agriculture plus ou moins élaborée.

Les agriculteurs

des Andes

Zone la plus dynamique de l’Amérique du Sud, les Andes et leurs piémonts downloadModeText.vue.download 536 sur 543

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verront se développer, en quelque quarante siècles, les plus hautes civilisations qu’ait connues le continent.

Les Andes centrales

Les Andes centrales, qui comprennent le désert coder et les hautes terres du Pérou et de la Bolivie, ainsi que l’ex-trême nord du Chili, constituent une région privilégiée. Des conditions climatiques exceptionnelles ont permis la conservation d’une énorme quantité de vestiges, et nous avons à l’heure actuelle une vision relativement complète de la succession des cultures pendant plus de dix mille ans. Les divisions spatiales et surtout chronologiques que l’on a pu établir sont plus fines ici que dans toute autre région. C’est ainsi que les spécialistes divisent la préhistoire des Andes centrales en sept périodes.

• Les prédateurs (environ 10000-

4000 av. J.-C.). Chasseurs ou pé-

cheurs, ils ne connaissent ni l’agriculture ni la poterie.

• Les agriculteurs précéramiques

(4000-1800 av. J.-C.). Dans de petits villages côtiers, des groupes de pê-

cheurs déjà sédentaires commencent

à cultiver quelques plantes (haricot, courge, puis coton).

Ces deux premières périodes ont été évoquées plus haut. Dans les hautes terres, l’économie de prédation doit se poursuivre plus longtemps, mais les documents nous font défaut pour en reconstituer les étapes.

• La période formative (1800-300

av. J.-C.). La poterie apparaît sur la côte et dans les Andes vers 1800 av.

J.-C. Les centres de population s’accroissent, et l’on voit se construire les premiers édifices cérémoniels.

Cette expansion est facilitée par la culture du maïs, qui devient le principal produit alimentaire. La sensibilité esthétique s’affirme peu à peu dans la fabrication de multiples objets de poterie, de pierre, d’os et de coquille, d’or enfin. Cette période culmine, vers 900-800 av. J.-C., avec l’épanouissement de l’influence chavín.

L’art de Chavín*, inspiré par de nouvelles croyances religieuses (culte du félin, peut-être apporté d’Amérique centrale), rayonne sur toute la côte du Pérou ; les cultures dites « de Cupis-nique », sur la côte nord, d’Ancón-Supe, sur la côte centrale, et, dans une certaine mesure, celle de Paracas, sur la côte sud, ne sont que les reflets de cette influence nouvelle.

• Le développement régional (300

av.-600 apr. J.-C.). Progressivement, les centres côtiers et andins se libèrent des canons esthétiques et religieux de Chavín. Chaque vallée, chaque bassin devient un foyer culturel indépendant. Les techniques d’agriculture (irrigation) et l’artisanat atteignent leur apogée vers 200 apr. J.-C. Sur la côte, les constructions d’adobe (pyramides, temples) se multiplient.

Les cultures les plus florissantes sont alors la culture mochica*, sur la côte nord, celle de Nazca*, sur la côte sud, et celles, moins spectaculaires, de la côte centrale autour de Lima. Les centaines de milliers d’objets retrouvés dans les cimetières le long du Paci-

fique ainsi que les fameuses scènes peintes sur les poteries mochicas ont beaucoup contribué à faire connaître l’organisation sociale, la vie maté-

rielle et les croyances religieuses des hommes de cette époque.

Dans les Andes, cette période est moins connue, mais le niveau culturel n’égale sans doute pas celui des peuples côtiers. Il est probable que le centre de Tiahuanaco* est alors au faîte de son dé-

veloppement, tandis que dans les Andes downloadModeText.vue.download 537 sur 543

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du Nord existent de petits centres assez actifs (Cajamarca, vallée du Santa).

• L’expansion de Tiahuanaco (600-

1000 apr. J.-C.). L’influence de ce centre, qui couvre d’abord la région andine du Sud, atteint rapidement l’extrême nord du Pérou et pénètre au sud jusqu’au Chili. Les cultures régionales sont submergées par cette avance, qui impose de nouvelles

idées et un style artistique panpéruvien. Les conquérants édifient sur la côte et dans les Andes les premiers grands centres urbains, à l’intérieur desquels s’accentue la hiérarchisation des classes sociales.

• Les nouveaux royaumes (1000-

1400 apr. J.-C.). L’influence de

Tiahuanaco semble disparaître aussi brusquement qu’elle s’était imposée.

Le régionalisme renaît, mais les diffé-

rentes populations se regroupent cette fois en royaumes ou confédérations, désireuses d’étendre leur domination.

Sur la côte nord, le royaume chimú a pour capitale Chanchán, immense métropole d’adobe couvrant plus de 30 km 2, où les murs des palais sont décorés de grands bas-reliefs en terre sèche. Les vallées des côtes centrale et sud forment respectivement les confé-

dérations de Chancay et le royaume chincha.

Les styles artistiques régionaux renaissent en partie, mais sans retrouver la richesse et la qualité d’autrefois. Les poteries sont produites en masse, et les formes sont de plus en plus standardisées. La métallurgie et le tissage, en revanche, sont remarquables. L’usage du bronze apparaît ; l’or, l’argent et le cuivre servent à faire de somptueux bijoux.

Les hautes terres ne se prêtent guère à l’établissement de larges groupes humains ; aussi n’a-t-on pas retrouvé de grands centres urbains correspondant à cette période dans les Andes.