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Bon administrateur, ambassadeur

de talent, Guilleragues est aussi un merveilleux écrivain. Que ce soit dans ses oeuvres légères, comme la Chanson du Confiteor ou les Valentins, dans les Lettres portugaises et dans sa correspondance, l’harmonie du style, la sensibilité la plus délicate jointe à un humour contenu font de lui l’égal des grands écrivains de son temps.

Ses Lettres portugaises sont, dans un genre différent, une sorte d’équivalent de Bérénice, et les lettres privées que nous avons conservées de lui, à Mme de Sablé, à Mme de La Sablière, à Racine ou à Seignelay, le classent au premier rang des épistoliers, tout à côté de la marquise de Sévigné. La lettre à Racine révèle quel critique Guilleragues aurait pu être : nul, de son temps, n’a parlé avec plus de pénétration de la tragédie racinienne. Celle à Mme de La Sablière, d’une extraordinaire spontanéité, passe sans discontinuer d’un humour débridé aux vivacités du coeur. « L’oubli me paraît une mort », y écrit Guilleragues.

Par une curieuse rencontre, il a fallu exactement trois cents ans d’oubli, après les Lettres portugaises, pour que son nom émerge de l’ombre comme

celui d’un des écrivains les plus attachants du siècle de Louis XIV.

F. D.

G. J. de Guilleragues, Lettres portugaises, éd. par F. Deloffre (Droz, Genève, 1972).

Guimarães Rosa

(João)

Romancier brésilien (Cordisburgo, Minas Gérais, 1908 - Rio de Janeiro, Guanabara, 1967).

Guimarães Rosa exerça la médecine de 1930 à 1934. À cette date, il entra dans la carrière diplomatique, qu’il ne devait plus quitter jusqu’à sa mort. Il fut élu en 1963 à l’Académie brésilienne des lettres, et un pressentiment lui fit retarder la prise de possession de sa chaire ; quand il s’y décida finalement, il mourut trois jours après, le 19 novembre 1967.

En 1934, Guimarães Rosa reçoit le prix de l’Académie brésilienne des lettres pour des poèmes, Magma, qu’il n’a jamais rendus publics. En 1946 paraissent ses premiers contes, Sagarana (un mot qu’il a formé de saga et d’un suffixe tupi équivalent de à la manière de), qui déclenchent une querelle littéraire : il crée en effet de nombreux néologismes à partir de vocabulaires régionaux et dialectaux. Les éditions successives de Sagarana ont été d’ailleurs reprises de manière à rendre ce procédé plus systématique.

En 1956 paraît l’oeuvre majeure du romancier, Grande sertão : veredas.

Euclides da Cunha avait publié en 1905

un essai sous le titre d’Os Sertões, qui révéla au Brésil et au monde la géographie physique et humaine d’une grande partie de l’arrière-pays brésilien au nord de Bahia ; Grande sertão : veredas en est, quant au titre, une réplique, suivi d’un synonyme local, veredas,

« sentiers », dans les hautes terres de Minas Gerais. Mais Guimarães Rosa a choisi la fiction, qu’il trouve plus apte à faire comprendre un problème qu’une simple documentation ou un reportage méticuleux. Son livre est un panorama épique, lyrique et dramatique d’une humanité qui survit héroïquement, repliée sur elle-même physiquement et mentalement. Un seul narrateur imaginaire (l’écrivain n’est que son scribe) récapitule son existence et celles de plu-

sieurs compagnons dans la lutte pour la vie au milieu de la nature et de ses semblables. Tout l’epos se fonde sur le langage, qui s’élève ici à une forme d’expression qui s’apparente à celle de James Joyce* dans Ulysse : hommes, femmes, enfants, démons, amours, espoirs, malheurs, morts, richesses se mêlent et se fondent dans des créations phoniques plastiques, musicales, dissonantes, qui constituent un défi permanent à la traduction — qui, cependant, a déjà été faite en plusieurs langues. Guimarães Rosa a également publié un livre de nouvelles, Corpo de baile (1956), divisé plus tard en trois livres (en 1969). Conteur, il a restauré le mot archaïque estória (pour lui, le portugais estória est à história ce que l’anglais story est à history) : il a ainsi donné Primeiras estórias (1962), Tuta-méia (Terceiras estórias, 1967), Estas estórias (1969 ; posthumes) et Ave, pa-lavra (1970), ce dernier recueil contenant quelques poèmes, des notes de voyages, des récits autobiographiques.

Nombre de ses contes et nouvelles ont déjà paru aux États-Unis, en France, en Italie, en Espagne et en Allemagne, et il existe des traductions intégrales de Grande sertão : veredas en espagnol et en allemand.

A. H.

Guimard (Hector)

F ART NOUVEAU.

Guinée

État de l’Afrique occidentale.

La situation

Le territoire de la république de Guinée, avec une superficie légèrement supérieure à la moitié de celle de la France, figure un vaste croissant partant d’une façade atlantique et se développant vers l’intérieur dans l’arrière-pays des États côtiers de la Sierra Leone et du Libéria.

Située entre les 7e et 13e degrés de lat. N., la Guinée occupe une position moyenne au contact du climat subtropical humide dit « subguinéen » (zone forestière) et du climat soudanien à sai-

son sèche marquée (zone de la savane).

Son relief varié contribue à en faire downloadModeText.vue.download 19 sur 581

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 10

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une sorte de pays carrefour, point de convergence réunissant des fractions ou échantillons de paysages différenciés qui s’étendent dans d’autres parties de l’Afrique occidentale de façon uniforme.

Le découpage artificiel des fron-tières, héritage des hasards de la conquête coloniale, a réuni dans une même entité politique quatre régions naturelles nettement individualisées par leur relief, leur climat, leur population.

Les régions

La Guinée maritime ou

basse Guinée

C’est une zone de plaines côtières marécageuses, prolongées par de bas plateaux, brutalement limitée vers l’in-térieur par les plateaux inférieurs du Fouta-Djalon.

D’énormes estuaires ou « rias » (les

« Rivières du Sud » des navigateurs d’autrefois) au tracé sinueux (rio Ca-cine, rio Nunez, rio Pongo, Konkouré, Mellacorée) s’enfoncent profondément dans l’intérieur, remontés par la marée sur 30 km et plus. La mangrove littorale (forêt de palétuviers) a été partiellement remplacée par les rizières inondées. Deux indentations rocheuses (cap Verga ; mont Kakoulima et presqu’île du Kaloum, prolongée par l’archipel de Los) interrompent seules ces plaines marécageuses. À l’intérieur, le socle ancien (granités et gneiss au sud, grès précambriens et primaires au nord) constitue une surface basse, plus ou moins recouverte de sédiments récents ou de dépôts d’altération (sables et argiles).

Le climat subguinéen est chaud et humide : 26-27 °C, avec une faible variation annuelle ; précipitations très abondantes (4 300 mm de pluies à Co-

nakry), dues à la mousson et presque entièrement concentrées dans la saison des pluies, de juin à novembre ; saison sèche marquée, mais durant laquelle le degré hygrométrique de l’air reste très élevé. La végétation naturelle (forêt claire sèche, avec des noyaux de forêt dense) a largement disparu devant les cultures (riz, palmiers à huile). L’ethnie dominante est celle des Soussous (ou Sossos), appartenant au groupe mandé, qui tend à assimiler les ethnies résiduelles du littoral et de la région de Boké. La basse Guinée compte environ 900 000 habitants.

Le Fouta-Djalon ou

moyenne Guinée

C’est une zone « montagneuse » ou, plus exactement, un ensemble de hauts plateaux hachés de fractures quadran-gulaires limitant des compartiments effondrés ou guidant le tracé des cours d’eau « en baïonnette ». Ces plateaux sont constitués de grès subhorizontaux précambriens et primaires, et, à l’ouest, de schistes gothlandiens donnant des reliefs plus estompés. Les altitudes varient entre 500 et 1 500 m. L’impression de relief tient à la brutalité des dénivellations, avec des « falaises »