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[Bonjour mon coeur]), Baïf, du Bellay*, Mellin de Saint-Gelais (1491-1558), R. Belleau (1528-1577), O. de Magny (1529-1561)...

Sur le plan musical, quatre grands types se dégagent. La chanson « oeuvre de terroir » est pleine de saveur, ainsi Dessus le marché d’Arras. La chanson satirique permet à l’auteur d’exercer une verve ironique (Quand mon mari vient de dehors ou Un jeune moine).

Nous trouvons encore des chansons

d’amour, de type madrigalesque,

comme Amour donne moi, ou Un doux

nenni. Dans de nombreuses pièces,

enfin, le pittoresque l’emporte, et le compositeur ne se fait pas faute d’en exploiter toutes les possibilités expressives (Margot labourez les vignes, O

vin en vigne). Ajoutons encore qu’une des chansons de Lassus constitue l’un

des plus grands succès de la seconde moitié du XVIe s. : c’est la célèbre Suzanne un jour, composée sur un texte de Guillaume Guéroult et qui se retrou-downloadModeText.vue.download 20 sur 573

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 12

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vera dans nombre de recueils, vocaux ou instrumentaux.

Si le madrigal est le plus sou-

vent à cinq voix, les chansons sont à quatre, cinq, six et même huit parties. Certaines sont à refrain, d’autres construites en forme de da capo. Le musicien y montre son aptitude à traduire toutes les situations, qu’elles soient élégiaques, comiques ou satiriques. C’est un art sans faiblesses, sans inégalités, qui donne son dernier éclat à un genre musical qui ne survivra guère au compositeur.

y Les lieder polyphoniques alle-

mands. Fondés sur des mélodies

populaires en langue allemande utilisées comme ténor et traitées en

contrepoint, les quatre-vingt-treize lieder de Lassus s’inscrivent dans la tradition de Finck, de Senfl et de nombreux compositeurs contemporains de Luther*. Les textes en sont de caractère très divers. Certains sont de véritables chants religieux, se rattachant à l’esprit de la Réforme. D’autres, au contraire, relatent des scènes de chasse (Es jagt ein Jäger), de la vie populaire (Ein Körbelmacher) ou

célèbrent l’amour mélancolique (An-nelein, Frölich und frei). À l’exception des premiers, qui sont écrits à trois parties, le compositeur traite ces lieder à cinq voix, y insérant nombre d’éléments stylistiques empruntés à la chanson et au madrigal.

L’oeuvre religieuse

Tout aussi universelle que l’oeuvre profane, l’oeuvre religieuse de Lassus aborde tous les genres alors en usage.

y Les messes. Cinquante-deux

messes nous sont restées du compo-

siteur. Se conformant à la tradition créée par ses devanciers, Lassus

traite les cinq textes de l’ordinaire : Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus suivi du Benedictus. Toutefois, au moment où il aborde cette forme, une transformation importante vient de s’opérer : l’usage d’écrire des messes à plusieurs voix sur une partie de ténor empruntée au chant grégorien est tombé en désuétude. Une nouvelle technique se fait jour, celle de la « messe-parodie ». Dans cette dernière, ce n’est plus une seule voix qui emprunte sa substance à une mélodie préexistante, mais ce sont toutes les parties. En outre, le thème n’est plus qu’exceptionnellement emprunté à la liturgie. Au contraire, il appartient à une chanson polyphonique (fût-elle des plus lascives), à un madrigal ou

— fait assez exceptionnel — à un

motet. La ligne mélodique se trouve alors développée, déformée, afin

d’adhérer au nouveau texte. Parmi

les chansons utilisées, nous trouvons notamment : Puisque j’ai perdu ; Là, là, maître Pierre ; Douce Mémoire, la célèbre chanson de Pierre Sandrin. De son côté, la messe Ite rime dolente est écrite sur un madrigal de Cyprien de Rore. Quant à celle qui est intitulée In te Domine speravi, elle emprunte sa substance à un motet de Lassus

lui-même.

Le compositeur conçoit ces messes

à quatre, cinq ou six voix, plus rarement à huit. Deux formes d’écriture ont essentiellement sa faveur : l’une josquinienne, polyphonique et dense ; l’autre, au contraire, de type madrigalesque, dynamique et allégée. Lassus emploie en outre le double choeur. En dépit de la valeur musicale intrinsèque de ces oeuvres, ce n’est pas là qu’il faut chercher le meilleur du compositeur ; celui-ci ne trouve pas dans les textes des messes l’élément émotionnel propre à susciter l’écriture dramatique où il excelle.

y Le Magnificat. Les cent versets

de Magnificat composés par Lassus

voient le jour en 1619, publiés par ses fils. Ici encore, le musicien se conforme à l’usage de l’époque, qui est de faire alterner les versets impairs, monodiques, et les versets pairs, polyphoniques. De plus, il utilise tantôt un cantus firmus grégorien (la moitié de

Magnificat est construite ainsi), tantôt un texte de chanson, de madrigal ou de motet, qu’il parodie. Dans ce cas, il existe une mélodie commune à tous les couplets, et celle-ci s’allonge ou se contracte en fonction du nombre de syllabes du texte. Lorsqu’il s’agit d’un cantus firmus, celui-ci se voit, en revanche, traité de façon différente à chaque verset, donnant ainsi l’impression d’une série de variations sur un thème donné.

y Les motets. Dans ce genre, Lassus

« triomphe par l’effet d’une adéquation parfaite entre les sujets à traiter et les prédilections intimes de son coeur et de son esprit » (Ch. Van den Borren). Sa foi ardente et sa haute culture littéraire lui permettent de choisir des textes de qualité, puisés dans l’Ancien Testament (dans les Psaumes, le Cantique des cantiques, l’Ecclésiaste, les Lamentations de Jérémie ou le Livre de Job) et le Nouveau Testament. Le compositeur laisse ainsi plus de sept cents motets, écrits pendant environ quarante années (1555-1594) et qui permettent d’apprécier l’évolution de son style. Il ne peut, toutefois, être parlé de progression, car, dans ce genre, Lassus atteint, dès ses premières oeuvres, une maîtrise achevée.

Quatre types principaux d’écriture s’y remarquent ; le « motet archaïque », construit sur un cantus firmus grégorien placé à une seule voix, est peu représenté. Lassus utilise plus volontiers un contrepoint à imitations, où les différentes voix empruntent leurs mélodies au thème liturgique, un peu à la manière de Josquin Des Prés (Salve Regina, à quatre voix, de 1573). Le motet « madrigalesque » a toutefois ses préférences. Il s’y livre à une recherche d’allusions musicales propres à souligner les inflexions du texte, parvenant ainsi à un véritable travail de miniaturiste (Non des mulieri, écrit vers la fin de sa vie). Nous trouvons enfin de véritables fresques sonores, à la ma-nière vénitienne, tel le motet Timor et tremor, où la profonde angoisse exprimée par le texte se voit traduite par des modulations chromatiques d’un effet dramatique puissant.

Le compositeur traite ses textes de

deux à huit voix (dans ce cas, il utilise la technique du double choeur), mais il a une préférence pour l’écriture à cinq voix, qui lui rappelle celle du madrigal. La cinquième partie revêt alors une importance toute particulière, apportant à la polyphonie un élément de va-riété et de contraste. Par la nouveauté de cette écriture, qui allie la tendance analytique du madrigal à une recherche harmonique colorée, Lassus peut être considéré comme le grand maître du motet dans la seconde moitié du XVIe s., dépassant dans ce domaine son illustre contemporain, Palestrina.

À ce nombre impressionnant de

motets, il faut ajouter les Psaumes de la pénitence (écrits vers 1559-60), les Lamentations d’après Job, pièces en langage syllabique, d’écriture volontairement simple, et les Prophetiae Sibyllarum (composées à l’âge de dix-huit ans), où le compositeur fait appel aux ressources du chromatisme pour exprimer l’étrangeté mystérieuse du texte. Notons encore que, parmi les motets à deux voix parus à Munich en 1577, douze sont dépourvus de paroles et portent le nom de ricercare. Leur destination instrumentale est donc bien évidente.