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y Les Passions. Outre les Sept Pa-

roles du Christ, Lassus laisse quatre Passions, dont une seule, la Passion selon saint Matthieu, a été publiée de son vivant (1575). Comme pour

le Magnificat, l’ensemble du texte n’est pas traité par le compositeur.

Une alternance est pratiquée entre les versets chantés dans le ton du choral grégorien et les fragments polyphoniques. Les paroles de Jésus sont confiées au choral monodique ; les divers protagonistes du drame s’expriment en duos et trios ; le choeur, enfin, intervient pour exprimer les situations collectives, augmenté parfois d’une cinquième partie afin d’intensifier sa présence. Un demi-siècle plus tard, Schütz* s’inspirera directement de cet exemple.

Par l’universalité de son oeuvre tout autant que par sa puissante personnalité, Lassus apparaît comme l’un des grands humanistes de la Renaissance.

Esprit ouvert à tous les courants artis-

tiques, tant littéraires que musicaux, il sait recueillir l’héritage de ses pré-

décesseurs sans pour autant négliger l’apport de ses contemporains. S’assi-milant le meilleur de leurs découvertes, il les féconde de son propre génie créateur. C’est ainsi qu’il clôt avec éclat la grande lignée des polyphonistes franco-flamands, opère une synthèse parfaite des styles français et italien, pressent toutes les nouvelles formes et techniques d’écriture qui seront en usage jusque vers 1750. S’il ne laisse aucun successeur réel, tous les compositeurs — de musique religieuse en particulier — porteront la marque de son empreinte, Jean-Sébastien Bach*

pouvant être considéré comme le dernier représentant de cette tradition.

H. C.

C. Van den Borren, Roland de Lassus (La Renaissance du livre, Bruxelles, 1942).

latin de

Constantinople

(Empire)

État fondé par les croisés sur les ruines de l’Empire d’Orient.

La fondation de l’Empire

Constantinople ayant été prise d’assaut le 12 avril 1204 et mise au pillage pendant trois jours par les Occidentaux, un conseil composé de six Francs et de six Vénitiens se réunit conformément au traité conclu entre les deux partis en mars précédent. Sous la pression du doge de Venise, Enrico Dandolo, ce conseil écarte la candidature au trône impérial du trop prestigieux chef de la quatrième croisade, Boniface de Montferrat, et élit à sa place le comte downloadModeText.vue.download 21 sur 573

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 12

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Baudouin de Flandre, qui est couronné le 16 mai empereur latin de Constantinople à Sainte-Sophie. En compensation, des chanoines installés dans cette église par les Vénitiens élisent leur compatriote Tommaso Morosini

au patriarcat latin de Constantinople,

désignation que confirme le pape Innocent III en mars 1205. Reste à partager l’Empire byzantin entre les vainqueurs toujours en conformité avec l’accord de mars 1204. Ainsi deux huitièmes reviennent-ils à l’empereur Baudouin, qui reçoit la Thrace, l’Asie Mineure du Nord-Ouest, Lesbos, Chios et Samos.

Trois huitièmes sont attribués à titre de fiefs aux autres chefs de la quatrième croisade, dont le premier est le vassal direct et les autres les vassaux indirects (par son intermédiaire) de l’empereur : Boniface de Montferrat, qui conquiert la Macédoine et la Thessalie et les constitue en royaume de Thessalonique (1204-1224) ; Otton de La Roche, qui réunit l’Attique et la Béotie en un duché d’Athènes (1205-1456) ; Guillaume de Champlitte et Geoffroi de Villehardouin, neveu du chroniqueur, qui érigent enfin le Péloponèse en principauté française d’Achaïe ou de Morée (1205-1428). Les trois derniers huitièmes sont cédés aux Vénitiens, qui renoncent à exercer, faute de moyens humains, leur souveraineté directe sur l’Épire, l’Acarnanie, l’Étolie et le Pé-

loponèse pour se contenter d’occuper les places marchandes de Raguse et de Durazzo, les bases navales de Coron et de Modon, la plupart des îles de la mer Égée, des ports des Dardanelles et de la mer de Marmara (Gallipoli, Rodosto, Héraclée) ainsi que la ville thrace d’Andrinople et les trois huitièmes de la capitale de l’Empire.

L’organisation de

l’Empire latin

La substitution des dignitaires francs aux hauts fonctionnaires civils et militaires grecs, exception faite de Théodore Vranas qui épouse Agnès

de France, l’introduction relativement facile du système féodal dans un monde byzantin depuis longtemps en voie de féodalisation et où la pronoia grecque présente une grande similitude avec le fief occidental, enfin le retour, qui suscite des graves réserves chez les autochtones, de l’Église grecque à l’obédience de Rome, telles sont quelques-unes des innovations essentielles introduites par les Francs dans l’Empire latin.

Très vive dans l’aristocratie ter-

rienne et au sein des milieux religieux,

qui sont les principales victimes du changement de régime, l’opposition s’apaise très rapidement lorsque les Francs ont l’habileté de garantir à Thessalonique et aux autres cités de l’Empire leurs privilèges et leurs coutumes, aux membres de la classe moyenne la possession de leurs pro-noiai et de maintenir sur leurs terres les paysans libres et les parèques, dès lors dénommés francs hommes et vilains.

En fait, ces derniers sont soumis aux mêmes impôts, services et corvées

que précédemment : ils n’ont fait que changer de maîtres et n’auraient guère réagi au changement de régime sans l’introduction de certaines pratiques romaines qui blessent les sentiments religieux de tous les Grecs, telles le célibat ecclésiastique, l’usage du pain azyme et la récitation du filioque.

Erreurs et défaites

(1204-05)

En soustrayant dès septembre 1203

l’Église bulgare au patriarcat de

Constantinople, le pape Innocent III avait d’ailleurs déjà commis une grave maladresse en ce domaine. En écartant avec arrogance l’aristocratie grecque des fonctions auliques ou administratives, l’aristocratie franque en commet une seconde, car elle incite cette dernière à une révolte qui se traduit par la fondation, en 1204, de deux nouveaux États byzantins : l’Empire de Nicée, constitué en Asie Mineure par Théodore Lascaris, et le despotat d’Épire*, fondé en Grèce occidentale par Michel Ange Doukas. Les Byzantins prennent en tenaille l’Empire latin de Constantinople et s’efforcent, dès 1205, de reconquérir la Mysie et la Bithynie, lorsque la maladresse de Baudouin Ier provoque l’entrée en guerre du tsar des Bulgares Jean II Kalojan et, par contrecoup, la révolte des populations grecques de Thrace. Le tsar refuse, en effet, de restituer les anciens territoires byzantins dont l’empereur revendique la possession ; le 14 avril 1205, il bat à Andrinople les troupes latines rappelées d’Asie par Baudouin Ier, qui meurt peu après en captivité.

La survie de l’Empire

latin (1205-1216)

L’habileté de Geoffroi de Villehardouin, qui sauve l’arrière-garde de l’armée vaincue, la prudence du frère de Baudouin Ier, Henri de Flandre et Hainaut, assurent la survie de l’Empire latin. Comme régent d’abord (1205-06), comme empereur ensuite (1206-

1216), Henri rétablit habilement une situation très compromise. Peu après la mort du doge Enrico Dandolo, il conclut en effet en octobre 1205 avec le nouveau podestat Marino Zeno

un accord qui impose aux Vénitiens comme aux Francs le service de chevauchée. La Thrace est en partie reconquise, Andrinople est dégagée le 28 juin 1206, et les Grecs sont ralliés.

Sauvés de leurs dangereux et redoutés alliés bulgares, admis à la Cour par Henri, ces derniers voient dans l’empereur latin un sauveur. Menacé par Théodore Lascaris, David Comnène,

souverain du royaume byzantin de Tré-

bizonde* qui a annexé la Paphlagonie, s’allie même en 1206 à la garnison française de Pigae, ce qui permet aux Latins de reprendre pied en Asie Mineure, où ils s’allient bientôt aux Turcs contre l’empereur de Nicée. L’assassinat de Jean II Kalojan aux portes de Thessalonique (oct. 1207) et la défaite de son successeur aux portes de Phi-lippopoli (1er août 1208) facilitent le redressement des Francs, dont le souverain impose alors sa tutelle au jeune Démétrius de Montferrat, qu’il couronne le 6 janvier 1209, peu avant de contraindre les barons francs de Grèce à lui prêter hommage au « Parlement »