et 1109 du comte de Toulouse Rai-
mond IV de Saint-Gilles, qui s’empare de Tortose (Tartous) le 21 avril 1102, mais meurt le 28 février 1105, de son cousin Guillaume Jourdain, comte de Cerdagne, assassiné en 1109, et de son fils Bertrand, qui obtient la capitulation de Tripoli le 12 juillet 1109 grâce à l’aide que lui ont enfin apportée les autres princes francs : Baudouin Ier, roi de Jérusalem, Baudouin II du Bourg († 1131), comte d’Édesse, et Tancrède de Hauteville († 1112), régent d’Antioche. En fait aucun texte ne contraint downloadModeText.vue.download 24 sur 573
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 12
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ces derniers à intervenir, puisque les principautés régies par chacun d’eux sont juridiquement indépendantes les unes des autres, ayant été fondées à l’issue d’initiatives individuelles par des hommes que n’unit aucun lien
de dépendance. Mais, isolés au sein d’un monde islamique hostile, qui a exterminé en juillet, août et septembre 1101 en Asie Mineure les trois armées de secours organisées par la papauté pour renforcer leur puissance démographique et militaire ; ne pouvant en cas de péril espérer de prompt secours d’un Occident trop lointain ; conscients par ailleurs que leur intérêt vital est de ne pas tolérer le maintien d’une base maritime et militaire adverse sur leurs arrières, ces princes ont compris la nécessité de faire taire leurs rivalités personnelles : telle est la signification de l’événement de 1109.
L’oeuvre de Baudouin Ier
de Boulogne (1098-1118)
Comte d’Édesse (1098-1100), puis roi de Jérusalem (1100-1118), Baudouin Ier a, plus que tout autre, contribué à tisser ces liens de solidarité entre les princes francs du Levant, qui finissent par lui reconnaître une primauté d’honneur de type hégémonique.
L’instrument de cette action a été incontestablement le royaume de Jérusalem, que l’énergique et ambitieux Baudouin Ier a créé à son profit en imposant entre le 11 novembre et le 25 décembre 1100 la reconnaissance de sa royauté au patriarche pisan Daimbert, dont les prétentions théocratiques ainsi déçues ne sont pas reprises par son successeur Arnoul de Roeux, dont l’élection en 1122 est conditionnée par sa docilité envers le souverain. Avec encore plus d’audace, Baudouin Ier entreprend de consolider les assises territoriales de son nouvel État, qui ne comprend à son avènement que les deux villes saintes de Jérusalem et de Bethléem — et
qu’un seul port, Jaffa, uni aux agglomérations précédentes par la route qui traverse Lydda (Lod) et Ramla —,
auxquelles il faut ajouter la Samarie, occupée vers le 25 juillet 1099, et la
Galilée, conquise ainsi que le port de Caïffa (Haïfa) vers le 20 août 1100
par Trancrède et érigée au profit de ce dernier en « princée » par Godefroi de Bouillon en 1100. L’oeuvre est pourtant difficile, car, après le retour en Occident de 20 000 croisés, dès 1099-1100, Baudouin Ier ne dispose plus alors que de 200 chevaliers et de 1 000 piétons.
Les utilisant avec habileté, obtenant des Italiens le concours temporaire de leur flotte en leur promettant en échange la cession de quartiers autonomes dans les villes conquises, Baudouin Ier parvient à repousser une première contre-offensive égyptienne devant Ramla le 7 septembre 1101, à parer aux consé-
quences de la défaite qu’une nouvelle armée égyptienne lui inflige également dans la plaine de Ramla le 17 mai 1102
et surtout à occuper progressivement les ports du littoral palestinien restés jusqu’alors entre des mains hostiles.
Ainsi Arsouf le 29 avril 1101, Césa-rée le 17 mai suivant, Acre le 26 mai 1104, Beyrouth le 13 mai et Sidon le 4 décembre 1110 sont enlevés aux
Égyptiens, qui ne contrôlent plus à cette dernière date que Tyr et Ascalon (Asqalān), dont ses successeurs ne s’emparent que les 7 juillet 1124 et 19 août 1153.
En intervenant personnellement dès 1109, devant Tripoli, pour accélérer la chute de ce port entre les mains de Bertrand (de Saint-Gilles), Baudouin Ier assure donc au-delà des frontières de son royaume le succès de sa politique, qui vise à donner aux chrétiens la maî-
trise de tout le littoral oriental de la Méditerranée, des bouches de l’Oronte aux portes du delta du Nil, maîtrise qui seule lui permet de maintenir avec l’Occident les liaisons maritimes régu-lières sans lesquelles le renforcement en hommes et le ravitaillement en ma-tières premières (fer, bois) et en produits fabriqués (armes, draps) des États latins du Levant seraient impossibles.
Déjà maître incontesté du royaume
latin de Jérusalem, jouissant d’un grand prestige dans le comté d’Édesse, sur lequel règne son cousin et successeur Baudouin II du Bourg (1100-1118), qui lui doit tout, exerçant en outre une influence considérable dans la principauté d’Antioche, où, durant la
captivité de Bohémond Ier, la régence est exercée par son vassal, le prince de Galilée Tancrède de Hauteville (1101-1103 et 1104-1111), Baudouin Ier
tire profit en outre de son expédition victorieuse devant Tripoli pour faire reconnaître sa suzeraineté au comte Bertrand. Ainsi se trouve parachevée la mise en place du système hégémonique de Baudouin Ier, dont le prestige se trouve encore rehaussé par les succès qu’il remporte contre les Turcs Seldjoukides entre 1110 et 1115 ainsi que par la conquête et par la mise en état de défense du Moab et de l’Arabie Pétrée, où il fait construire en 1115 et en 1117 les forteresses de Montréal à al-Chawbak et de Val Moyse, qui brisent la continuité territoriale du monde islamique afro-asiatique et assurent aux Francs le contrôle du commerce caravanier unissant Le Caire à Damas et à Bagdad.
Forces et faiblesses
des États latins dans la
première moitié du XIIe s.
Cédant à Jocelin Ier de Courtenay le comté d’Édesse (1119-1131), sur lequel il conserve comme son prédécesseur une grande influence, Baudouin II du Bourg, nouveau roi de Jérusalem (1118-1131), doit assurer dès 1119
la régence d’Antioche, dont le prince Roger de Salerne (1112-1119) a été vaincu et tué par les Turcs à Tell-
’Aqibrīn (près d’Alep) le 28 juin. En moins de trois ans, le territoire perdu en Syrie du Nord est reconquis, et la prépondérance du roi de Jérusalem
dans les États du Levant est confirmée lorsque Jocelin Ier de Courtenay, puis Baudouin II lui-même sont capturés en septembre 1122 et en avril 1123 par un chef turc, l’Ortoqide Balak, qui les enferme dans la forteresse de Harput (près de Elâziğ, Turquie). Contrairement à toutes les prévisions, cette décapitation politique n’ébranle pas la puissance franque, alors assez enracinée non seulement pour repousser une offensive égyptienne, mais aussi pour liquider l’enclave musulmane de Tyr le 7 juillet 1124 sous la direction successive des deux régents du royaume : le connétable Eustache Garnier, seigneur de Sidon, et Guillaume de Bures, seigneur de Tibériade. À sa sortie de cap-
tivité, Baudouin II peut donc renouer les liens de la coalition latine, qui, sous sa direction, tente d’occuper Alep à la fin de 1124, puis Damas en janvier 1126 et en 1129 afin de tenir les clefs du désert et de mettre définitivement la Syrie maritime à l’abri d’une attaque par surprise.
C’est un échec, mais l’occupation de Bānyās, au nord-est du lac Houleh, assure néanmoins la protection de la Galilée du Nord contre une telle éventualité. Renforcée par la militarisation de l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean et par la fondation en 1119 par Hugues de Payns de l’ordre militaire des Templiers, la défense de la Syrie franque est dès lors mieux à même de résister à un nouveau danger, celui que repré-