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À la Convention

Élu député de Paris à la Convention, Marat siège à la Montagne. Mais il se voit violemment pris à partie par la Gironde, qui lui reproche d’avoir fait couler le sang et de vouloir instaurer une dictature tripartite. Ses amis montagnards, qui craignent ses exagérations, le soutiennent avec mollesse. Il a fondé (25 sept.) une nouvelle feuille, le Journal de la République fran-

çaise (qui deviendra le Publiciste de la République française) et réclame avec force la tête du roi ; il obtient le vote par appel nominal qui décide de la condamnation à mort de Louis XVI.

Au début de 1793, voyant s’aggraver les difficultés économiques, il engage les ménagères à piller les boutiques.

Sa popularité est immense dans les milieux sans-culottes. Mais il est de nouveau attaqué par les Girondins, qui font voter contre lui un décret d’accusation (13 avr.). Maladroite manoeuvre : acquitté par le Tribunal révolutionnaire, le tribun est ramené triomphalement à la Convention (24 avr.). Il s’acharne dès lors contre ses adversaires. Le coup de force du 2 juin chasse ceux-ci de l’Assemblée.

À cette époque, Marat, depuis longtemps malade (il souffre d’une sorte d’eczéma généralisé), voit son état s’aggraver. Il doit garder la chambre.

Son influence politique diminue. C’est alors qu’une jeune Normande exaltée,

qui a rencontré à Caen les Girondins proscrits, arrive dans la capitale en vue de débarrasser le pays du « monstre sanguinaire ». Le 13 juillet 1793, Marat est assassiné par Charlotte Corday (1768-1793) d’un coup de couteau au coeur.

Objet d’un véritable culte populaire, les restes de celui que Chateaubriand appellera le « Caligula des carrefours »

seront transférés au Panthéon, d’où on les retirera en février 1795, lors de la réaction thermidorienne.

A. M.-B.

F Convention nationale / Jacobins.

A. Cabanès, Marat inconnu (A. Michel, 1891 ; nouv. éd., 1928). / G. Walter, Marat (A. Michel, 1933 ; nouv. éd., 1960). / P. Caron, les Massacres de Septembre (Maison du livre, fr., 1935). / G. Martin, Marat, l’oeil et l’ami du peuple (Rieder, 1937). / F. Funck-Brentano, Marat ou le Mensonge des mots (Grasset, 1941).

/ C. Reber, Un homme cherche la liberté : Jean-Paul Marat (la Baconnière, Neuchâtel, 1950). /

D. Quercy, Marat, le médecin, le savant (Impr.

Delmas, Bordeaux, 1952). / A. Soboul, les Sans-Culottes parisiens de l’an II (Clavreuil, 1958). /

J. Massin, Marat (Club fr. du livre, 1960 ; nouv.

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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 12

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éd., 1969). / S. Cordier, Jean-Paul Marat (A. de Rache, Bruxelles, 1967).

Marathes (les)

Selon l’acception que l’on donne à ce terme, marathe peut désigner soit les castes dominantes du peuple parlant marāṭhī, soit l’ensemble du peuple.

Socialement parlant, ces rudes montagnards des Ghāts peuvent se classer en deux groupes principaux : une caste de brahmanes très fermée (les brahmanes chitpāvan du Konkan) et une majorité de sūdra (v. Inde, religions).

Si, jusqu’au XVIIe s., les pays qui devaient former le Mahārāshtra avaient connu de brillantes dynasties (Cālukya de Pulakeśin II, Rā rakūṭa, Cālukya de Vikramāditya, Yādava et plus tard les nombreux États musulmans issus de la désagrégation du royaume des Bahma-

nides), ce ne fut pas le fait des Marathes, qui n’étaient jusqu’alors pratiquement pas entrés dans l’histoire. Cette fantastique poussée marathe au XVIIe s. reste d’ailleurs difficile à expliquer. L’historien britannique Percival Spear parle même à ce sujet d’un des « mystères de l’histoire indienne ». Sans doute l’intolérance religieuse des Moghols, à son apogée sous Awrangzīb (1618-1707), l’exceptionnelle envergure de Śivājī

Bhonsle (1627-1680) sont-elles des éléments d’explication. Elles ne sont néanmoins pas suffisantes.

Rien, au XVIIe s., ne laissait pré-

sager aux Marathes un tel destin. À

cette époque, la plupart de leurs chefs avaient pris du service, au sens médié-

val du terme, auprès des souverains musulmans dont, en échange, ils recevaient des djāgīr (v. Inde, histoire).

L’un d’eux, Shāhjī Bhonsle, était

ainsi plus ou moins vassal du souverain de Bijāpur. C’est à son fils Śivājī

que devait revenir l’honneur de faire entrer les Marathes dans l’histoire.

Śivājī était un bon meneur d’hommes, un remarquable tacticien de la guérilla, à laquelle le pays montagneux se prê-

tait d’ailleurs admirablement. À partir de 1655, profitant de la décadence de l’État de Bijāpur, il se tailla une véritable principauté à ses dépens. De plus, il prit la précaution de s’emparer d’une série de forts ceinturant les Ghāts, pla-

çant ainsi l’embryon du futur grand État marathe dans une situation quasi inexpugnable.

La chute vers 1565 du dernier bas-

tion de résistance hindoue, l’empire de Vijayanagar, allait faire de Śivājī

le nouveau champion de l’hindouisme.

Il fut vivement encouragé dans cette voie par le grand poète marathe

Tukārām (1609-1649) et le chef religieux Rāmadās (début du XVIIe s.), qui le persuadèrent que là était son dharma.

En 1662, le Bijāpur, trop faible pour résister à l’entreprenant Marathe, reconnaissait l’indépendance du nouveau jeune État : le Svarājya (ou État indé-

pendant). Śivājī, dès lors, devenait un adversaire valable pour les Moghols.

L’oncle d’Awrangzīb, Shayista

khān, et le propre fils de l’empereur, Muazzam, tentèrent, sans succès,

d’étouffer ce nouveau péril. Mieux, en 1664, la mise à sac du grand port moghol de Surat par les Marathes

amena Awrangzīb à envoyer contre

eux son meilleur général : le rājā Jai Singh. Acceptant de négocier, Śivājī

se rendit à la cour impériale d’Āgrā.

Mais cette entrevue entre le dernier des grands Moghols et le premier des chefs marathes tourna court. Arrêté, Śivājī ne dut son salut qu’à une fuite aussi précipitée que romanesque.

Cet épisode ne fit d’ailleurs qu’accroître son prestige. En 1674, il « sacralisait » son pouvoir en se faisant couronner roi dans sa capitale de Rājghar (ou Rāighar). Le rôle du prestigieux leader (il devait mourir en 1680) avait été considérable. Restaurateur d’une nouvelle fierté nationale hindoue bien malmenée depuis la chute de Vijayanagar, il avait eu en outre le mérite de doter son pays d’infrastructures militaires, administratives, sociales et économiques solides. L’appel au sentiment national et à certaines valeurs traditionnelles (défense de l’hindouisme, de la vache, du pays) l’avait permis. Il avait été aussi nécessaire d’alimenter le trésor de guerre marathe. Peut-être inévitables sur le strict plan financier, les taxes qu’il multiplia eurent de lourdes conséquences politiques en rendant l’administration marathe de plus en plus oppressive, donc impopulaire. C’était d’autant plus grave qu’après 1680 se posait le problème de l’après-sivājīsme.

Le fils, assez médiocre d’ailleurs, de Śivājī, Śambūjī (1680-1689), fut vaincu par Awrangzīb et mis à mort ; l’État marathe fut brisé, mais l’empereur moghol ne put ni contrôler efficacement le Deccan ni reprendre aux Marathes cette précieuse ceinture de forts dominant les Ghāts. Cela ne fit d’ailleurs que renforcer les Marathes dans leur croyance en la toute-puissance de la guérilla. Mais, trop souvent, cette forme d’action militaire s’accompagna du pillage des pays voisins. De libé-

rateurs et de restaurateurs de la légitimité hindoue, les Marathes devinrent vite aux yeux des Indiens, hindous ou musulmans, suspects d’impérialisme, suivant en cela un processus analogue aux armées françaises de la Révolution