En 1563, le concile de Trente adopte un décret selon lequel un mariage est nul s’il n’a pas eu lieu à l’église en présence du propre curé des époux, et le pape Pie IV
(1559-1565) ouvre des négociations avec les États catholiques pour obtenir la publication officielle des décrets du concile. Le
roi de France, qui cherche à reconquérir le terrain perdu et à reprendre la juridiction sur les causes matrimoniales, refuse la publication officielle des décrets du concile, mais introduit une règle nouvelle par une ordonnance, l’ordonnance de Blois de 1579, portant que le mariage doit être cé-
lébré devant le curé paroissial, après publication des bans et en présence de quatre témoins dignes de foi, le tout subordonné aux peines prévues par les saints conciles.
Les mariages non solennels étaient déclarés nuls par l’Église et les tribunaux laïques, les parlements ne prenaient connaissance des affaires relatives au mariage que par la voie de l’appel comme d’abus. Dès avant cette date cependant, ils avaient réussi à s’emparer des affaires relatives à la séparation de corps sous prétexte qu’ils étaient habilités à connaître des questions d’ordre pécuniaire qui naissent du mariage et que la séparation de personnes entraîne la sé-
paration de biens.
En 1791, la Convention formule le principe moderne selon lequel le mariage est un contrat civil. Le principe est mis en oeuvre en 1792 par la création d’officiers de l’état civil. Le Code civil, tout en conservant l’idée que le mariage est une institution civile, dont il donne les règles en tenant compte de la tradition, n’empêche pas les époux d’ajouter à l’union civile un mariage religieux. Cette pratique est tellement ré-
pandue que l’on appelle parfois mariages civils ceux qui n’ont pas été suivis d’un mariage religieux. Pourtant, tous les mariages en France sont des mariages civils.
M. C.
Marie
Mère de Jésus.
La mère de Jésus de Nazareth n’apparaît guère dans les Évangiles au cours de la mission de son Fils. Cela s’explique par la place fort effacée de la femme dans la vie sociale du judaïsme d’alors. Mais, au fur et à mesure de la rédaction du Nouveau Testament, les divers témoins de la Tradition portent davantage d’attention à Marie.
Par-delà le Nouveau Testament,
Marie prend une place de plus en plus grande dans la vie de l’Église, en Orient comme en Occident : dans la prière des
fidèles et le culte, dans la réflexion théologique, dans l’art. Ces développements ont été diversement appréciés par les théologiens, surtout depuis la Réforme protestante. Ils relèvent d’une lecture de l’Écriture, d’une méthode de théologie et touchent à la conception du salut, de la grâce, du ministère et finalement de l’Église. Aussi l’image que chaque chrétien se fait de Marie caractérise-t-elle sa théologie.
Marie dans
le Nouveau Testament
La formation du Nouveau Testament s’échelonne sur quelque soixante-dix ans, depuis la prédication apostolique initiale, vers l’année 30 jusqu’à l’achèvement des écrits johanniques (v. Jésus). Chacun des évangélistes ne veut que transmettre la tradition commune de l’Église sur Jésus mort et ressuscité, Fils de l’Homme et Fils de Dieu. Mais chacun marque aussi son oeuvre de sa personnalité, de sa réflexion et cherche à répondre à la mentalité et aux besoins de ses lecteurs. Il n’est donc pas étonnant que les diverses couches du Nouveau Testament offrent de Marie des images assez différentes.
La prédication apostolique primitive, dont les discours du livre des Actes présentent assez fidèlement la structure et les thèmes majeurs, ne s’arrête pas sur Marie. Cela tient d’abord au fait que Marie a joué un rôle fort effacé au temps de la mission publique de Jésus, qui est l’objet propre du message évangélique. Cela s’explique surtout par le but de ce message, tout centré sur Jésus, Christ et Sauveur.
Il en va de même dans l’oeuvre de Paul, dont les rapports avec le milieu originel de Jésus n’ont été qu’épisodiques. Il ne nomme nulle part Marie.
S’il dit une fois que « Jésus est né d’une femme, né sous la Loi » (Galates, IV, 4), c’est pour noter la condition humaine de Jésus, sans jeter un regard sur Marie.
La tradition évangélique primitive, qui est à la base des Évangiles synoptiques, ne mentionne Marie que deux fois, sans lui donner de rôle particulier.
Chez Marc (III, 31-35 et par.), la mère,
les frères et les soeurs de Jésus arrivent au cours d’une prédication du Maître ; ils semblent venir pour mettre fin à la tâche où il se surmène (Marc, III. 21). À
sa famille charnelle, Jésus oppose durement sa nouvelle famille, le groupe de ceux qui cherchent à faire la volonté de Dieu : il fait le même choix qu’il imposera à ses disciples (Matthieu, X, 37 et par. ; Marc, X, 29 et par.). Quand, plus loin, il vient à Nazareth, ses compatriotes le connaissent comme le « fils de Marie » (Marc, VI, 3 et par.). Cette désignation, assez rare dans le milieu palestinien, où l’on identifie normalement un homme par le nom de son père, veut sans doute indiquer que Joseph est déjà mort (quelques auteurs ont cru y voir une allusion plutôt malveillante aux récits de la conception virginale).
Les deux récits de l’enfance de
Jésus, qui ouvrent plus tard les Évangiles de Matthieu et de Luc, sont fort différents ; mais ils s’accordent à rapporter la conception virginale de Jésus en Marie sous l’action de l’Esprit-Saint (Matthieu, I, 18 ; Luc, I, 35). Cet accord suggère qu’ils dépendent, sur ce point, d’une tradition commune, apparemment reçue dans les communautés pa-lestiniennes avant 70. Cette croyance donne à Marie un rôle important dans l’oeuvre de Dieu. Mais les deux évangélistes présentent ce rôle de manières fort diverses. Chez Matthieu, Marie est purement passive : elle ne prononce pas une parole, et tous les épisodes de l’enfance de Jésus sont traités entre Joseph et Fange du Seigneur (sauf en II, 11, qui nomme seulement « l’enfant avec Marie sa mère »). Luc, par contre, qui est un Grec et qui donne si large place aux femmes dans son oeuvre, porte à Marie un intérêt caractéristique.
À l’Annonciation, c’est Dieu lui-même qui la salue par son ange comme celle qu’il comble de sa faveur (I, 28) ; il lui annonce la tâche qu’il lui confie, il attend son consentement. C’est pour le peuple de Dieu tout entier qu’elle accepte. Et, dans son Magnificat, elle chante la joie de ce peuple plus encore downloadModeText.vue.download 16 sur 575
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 13
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que la sienne (I, 46-55). Pour accomplir sa tâche de mère, Marie n’est qu’une jeune femme pauvre, toute seule pour langer son Fils et le coucher dans une mangeoire de bestiaux (II, 7), pour l’accueillir dans un monde où rien n’apparaît des splendeurs attendues pour les jours du Messie. C’est là que Luc fait ressortir sa foi. Élisabeth, inspirée, la salue comme « celle qui a cru » (I, 45). Elle reçoit la parole de Dieu dans le message de l’ange (I, 28), dans les oracles prophétiques (I, 42-45 ; II, 29-31 et 34-35), dans le récit des bergers (II, 17-19), plus encore dans l’évé-
nement de son Fils, conçu de l’Esprit, mais pauvre et ignoré. Comme tous les croyants, elle cherche à comprendre (I, 34), elle médite son expérience (II, 19-51), elle avance pas à pas dans la nuit vers le mystère qui la dépasse (II, 50).
Luc marquera plus loin que sa grandeur ne consiste pas dans sa maternité charnelle, mais dans son écoute de la parole de Dieu (XI, 28). Il la montrera une fois encore au début des Actes des Apôtres, unie aux Douze dans la foi de Pâques et la prière pour la mission (Actes, I, 14).