Alors que les navigations à voile ou à l’aviron ne font appel qu’à l’action du vent ou à l’effort musculaire de l’équipage, le motonautisme a recours à l’action d’un moteur, qui agit sur l’eau par l’intermédiaire d’une hélice. Le moteur peut être placé à poste fixe à l’intérieur de la coque (moteur in-bord), ou bien constituer un ensemble amovible et indépendant qui se fixe à l’arrière de la coque (moteur hors-bord). Les moteurs de grosse cylindrée, d’un poids élevé, sont généralement utilisés dans la pre-
mière formule, et les moteurs de petite cylindrée sont, dans la plupart des cas, des moteurs hors-bord.
Les moteurs
La navigation à moteur n’est pas ré-
cente. En 1707, Denis Papin expérimente sur la Fulda un bateau à vapeur mû par quatre roues à aubes. D’autres inventeurs suivent son exemple, et, cent ans plus tard, l’Américain Robert Fulton remonte l’Hudson de New York à Albany sur un bateau à vapeur de sa conception, le Clermont.
La navigation de plaisance sur des bateaux actionnés par des moyens mé-
caniques naît au cours de la seconde moitié du XIXe s., lorsque les progrès techniques qui suivent l’invention de la machine à vapeur permettent de construire des moteurs à vapeur puissants, de volume et de poids assez limités pour ne plus transformer les embarcations qui les utilisent en usines flottantes et pour offrir aux passagers un confort suffisant. Un des premiers yachts de plaisance est le Vernon-Croissy, appartenant à M. Perrignon et construit en 1870. Il mesure 18,50 m et, mû par la vapeur, il atteint 10 noeuds.
Le baron de Rothschild fait réaliser le Lutin en 1872, le Stella et l’Éros en 1875 et l’Éros II en 1876, de 820 tonneaux de jauge. À la même époque, la famille Menier met en chantier une longue série de bateaux à moteur qui portent les noms de Subirella, Velleda, Almée, etc. Tous ces navires sont propulsés par des machines à vapeur. Des essais de propulsion électrique sont également effectués, et un yacht de 25 m, le Viscountess Bury, fonctionne pendant dix heures sans recharge de batteries, à 6 noeuds de moyenne. Mais l’encombrement des accumulateurs
constitue un obstacle qui ne peut être vaincu, malgré l’agrément du silence et l’absence d’odeurs. On continue à utiliser la vapeur en l’améliorant par la chauffe au pétrole. Les Américains se lancent à la poursuite des records, et les plus audacieux, Stillmann, Astor et James Gordon Bennett (1841-1918), atteignent les vitesses de 17 noeuds, alors qu’en Europe on ne dépasse guère 12 noeuds.
Le XIXe s. a vu éclore et se développer le règne de la vapeur, et la machine à vapeur s’est imposée sur mer jusqu’à une date récente comme mode de propulsion des grands navires. Mais, en matière de plaisance, elle est remplacée dès la fin du siècle par le moteur à pétrole pour des raisons de moindre encombrement et de commodité. Les premiers moteurs à pétrole sont créés en vue de propulser des bateaux : en 1885, Fernand Forest (1851-1914) réalise un moteur, doté de deux pistons équilibrés par cylindre, qu’il utilise pour faire évoluer un bateau. Encore aujourd’hui, il n’est pas rare que des formules nouvelles destinées à l’automobile soient expérimentées dans un premier temps sur des embarcations, downloadModeText.vue.download 558 sur 575
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l’hélice agissant comme un parfait régulateur et le refroidissement étant assuré de façon particulièrement efficace par la circulation de l’eau pompée sous la coque. Peu à peu, la machine à vapeur est abandonnée parce qu’elle est encombrante, lente à mettre en route et qu’elle nécessite une constante recharge de combustible. Le moteur à pétrole, devenu par la suite le moteur à essence, ou moteur à explosion, se perfectionne sans que, parfois, tout le crédit qu’il mérite lui soit accordé en tant que mode de propulsion sur l’eau.
La raison en est peut-être que la navigation de plaisance ne profite du progrès qu’avec un décalage assez long dans le temps et que les bénéficiaires ne perçoivent pas les avantages qu’ils tireront des travaux des inventeurs et des chercheurs.
Une des premières unités à moteur à pétrole construites en France est le Fleur-de-France, yacht à pétrole de 16 tonneaux, mesurant 14 m de long et construit en tôle à Argenteuil. Sa machine à double effet de 40 ch,
conçue selon le système Priestman, lui imprime une vitesse de 16 km/h par l’intermédiaire d’une hélice ; le moteur à pétrole provoque la disparition de la roue à aubes, à quelques exceptions près, telle celle de Jolie-Brise, navire
construit en 1900 par M. Gallice. Long de 35 m, propulsé par un moteur à pétrole agissant sur des roues à aube de 1,60 m de diamètre, ce navire ne dépasse guère 4 km/h.
Le moteur hors-bord
Depuis l’invention, en France, de la motogodille, qui remonte à 1904, et après les perfectionnements que l’Américain Ole Evinrude lui apporte à partir de 1910, le moteur hors-bord ne cesse de gagner du terrain sur le moteur fixe et ce pour des raisons d’économie de construction des coques et d’entretien de l’ensemble mécanique, plus facile à mettre à l’abri après utilisation. Un système intermédiaire entre le moteur fixe et le hors-bord réside dans le procédé de transmission Z-Drive.
Celui-ci consiste à relier un moteur intérieur à une embase portant l’hélice et relevable comme un moteur hors-bord. Hors-bord et Z-Drive permettent l’accostage sur une plage et le halage à terre sans inconvénient pour l’hélice.
Les coques
La puissance toujours accrue que
l’on obtient des moteurs à explosion et l’adoption de l’hélice entraînent une évolution de la forme des coques.
D’abord étroitement inspirée de celle des voiliers, héritage d’un lointain passé, la coque du bateau à moteur s’adapte lentement au mode de propulsion qui lui est propre. La quille perd de sa profondeur : indispensable à un bateau à voiles qui doit remonter dans le vent, elle n’est nécessaire à la navigation à moteur que dans la mesure où elle assure la stabilité ; en revanche, elle nuit aux évolutions rapides. L’accroissement de la largeur pallie sa disparition plus ou moins complète.
Longue et effilée à l’origine, la coque ne cesse, à longueur égale, de s’élargir et de s’alléger. Ce qu’elle perd en profondeur, elle le gagne en largeur, en fardage et en superstructures, au béné-
fice du confort intérieur et de la rapidité d’évolution. Cependant, les qualités marines ne suivent pas toujours, et les vrais marins continuent à penser qu’en mer la sécurité est fonction de la profondeur des oeuvres vives.
En motonautisme comme en navigation à voile, les coques sont « en forme » ou « à bouchain ». En France, on préfère les coques en forme, qui passent mieux dans la lame, mais
l’influence américaine, favorable aux coques à bouchain, finit par l’emporter.
Ces coques présentent des avantages de plus grande économie de construction quand elles sont exécutées en bois.
Mais elles ont tendance à « taper » dans la vague, et l’on doit en perfectionner le dessin. Actuellement, on distingue trois principaux types de coques.
Le catamaran s’inspire étroitement du voilier à deux coques. Cette technique est utilisée dans le dessin des racers dits « trois points », parce que leur coque ne porte sur l’eau qu’en trois points : les deux flotteurs laté-
raux et l’extrémité arrière, à hauteur de l’hélice.
La forme trimaran — ou en W in-
versé — reprend les données des catamarans, avec adjonction d’une coque médiane. Elle comporte trois coques ménageant entre elles deux coussins d’air. Le passage dans une eau agitée s’en trouve amélioré.
La technique Ray Hunt offre une
coque présentant en coupe la forme d’un V profond, dont les branches comportent des décrochements en marches d’escalier. Lorsque la vitesse croît, la coque s’appuie sur ces marches, depuis celles qui sont le plus près de la ligne de flottaison jusqu’à celles qui sont le plus proche de la quille. Le bateau déjauge, et la surface mouillée se ré-