Le rôle des budgets économiques
consiste à intégrer les prévisions budgétaires dans l’ensemble des activités économiques du pays, en modulant au besoin les recettes et les dépenses du budget de l’État, de façon à maintenir l’économie aussi près que possible du sentier prévu par le plan à moyen terme, sans compromettre pour autant les équilibres fondamentaux de l’emploi*, des prix et des échanges extérieurs.
Convergence des théories
La convergence se manifeste également dans le domaine de la théorie économique, à laquelle se réfèrent implicitement les planificateurs des deux options. À cet égard, Jean Marczewski n’hésite pas à affirmer que « la prise en compte d’une redevance sur le capital dans le prix de revient des entreprises, le recours de plus en plus large au mécanisme du marché, l’importance que l’on commence à reconnaître à la demande, l’emploi d’un taux d’intérêt pour l’actualisation des valeurs futures, et de nombreux autres symptômes encore, montrent que la théorie économique, qui sert effectivement de base à l’action planifiée, est fondamentalement la même à l’Est aussi bien qu’à downloadModeText.vue.download 599 sur 619
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 15
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l’Ouest ». Seul le vocabulaire reste encore partiellement distinct.
Les problèmes de la planification à l’Est
Concrètement, en U. R. S. S., cette référence à une théorie économique
proche de celle de l’Europe occidentale se marque par une libéralisation de l’économie : les planificateurs renoncent aux méthodes administratives de la mise en application du plan et les remplacent par des initiatives économiques fondées sur le mécanisme du marché. Cette libéralisation a été exigée avec une force croissante sous l’empire de facteurs nouveaux. Le premier de ces facteurs est lié à l’élévation du niveau* de vie de la population.
Le consommateur soviétique dispose actuellement d’un revenu qui lui fait souhaiter une variété et un choix plus grand des biens de consommation qu’il désire. Or, la planification administrative centralisée présente une rigidité beaucoup trop grande pour répondre de façon satisfaisante à l’évolution de la demande.
La nécessité de tenir compte des besoins des consommateurs a conduit les pays de l’Est à opérer des réformes plus profondes. L’autonomie des entreprises* a été étendue. À cet effet, le nombre des indicateurs obligatoires a été réduit. Les indicateurs quantitatifs de succès ont été remplacés par des indicateurs qui rendent mieux compte des performances de l’entreprise : la production réalisée, la valeur ajoutée, le profit, la rentabilité. En même temps, la liberté de choix a été élargie en ce qui concerne les produits à fabriquer, les fournisseurs, les clients (cependant, en Union soviétique, le système centralisé d’approvisionnement matériel et technique est maintenu pour les produits les plus importants). Au niveau de l’entreprise et du personnel, la participation aux résultats a été améliorée et calculée sur des bases plus rationnelles.
Une fraction accrue du profit ou de la valeur ajoutée sert à financer les investissements propres de l’entreprise et à encourager individuellement et collectivement son personnel. Les coûts ont subi de substantielles révisions afin d’approcher aussi près que possible de la vérité : ainsi, l’entreprise doit payer une redevance sur les capitaux mis à sa disposition, redevance prise en compte dans le calcul du coût de production, qui sert de base à la détermination des prix de gros. Par contre, à quelques exceptions près, c’est l’administration qui continue à fixer les prix, sans prêter
tellement d’attention aux fluctuations de l’offre* et de la demande.
Malgré les résultats encourageants de ces expériences « libérales » en U. R. S. S. et la restauration partielle du marché en Hongrie et dans certains autres pays socialistes, l’ajustement de la production aux besoins de la population reste encore, dans l’ensemble, défectueux ; c’est une conséquence de la rigidité due à la planification impé-
rative. Mais les échanges extérieurs jouent un rôle beaucoup plus grand que par le passé. Dans certains pays, certaines entreprises peuvent, désormais, négocier avec leurs fournisseurs et clients étrangers. La réglementation du change est très partiellement assouplie. Mais les taux de changes officiels restent maintenus à des niveaux peu réalistes, et la pratique des taux multiples n’est pas abandonnée.
La coopération économique entre les pays de l’Est s’est considérablement développée ; mais, malgré l’institution d’une coordination partielle des plans et la création d’une Banque internationale de coopération économique, les échanges entre ces pays ont lieu sur des bases assez particulières : les roubles transférables qui servent de monnaie*
de compte ne sont convertibles ni en or, ni en devises, ni en marchandises librement choisies ; aucun lien n’existe entre les prix intérieurs et les prix pratiqués dans les opérations mutuelles et extérieures. Le calcul de la rentabilité de ces opérations est, de ce fait, très difficile, voire impossible.
Les problèmes de la planification occidentale
Alors que la planification de type so-viétique tend à accorder un rôle plus grand au marché et à faire plus largement appel aux instruments économiques d’incitation, la planification de type occidental se heurte à de nombreuses difficultés qui en marquent aussi les limites.
y On n’a pas encore trouvé de mé-
thode satisfaisante pour la détermination des prix de la période planifiée.
Certes, il faut convenir que les prix jouent un rôle bien moins important que dans la planification de type so-viétique, puisqu’ils ne sont pas impo-
sés à l’économie par voie autoritaire.
Mais les imperfections relatives à la prévision des prix affectent la précision avec laquelle peuvent être appliqués les instruments d’exécution du plan.
y Les modèles, sur lesquels s’appuient les planificateurs, sont essentiellement des modèles linéaires et statiques qui simplifient abusivement la réalité ; en outre, ils supposent implicitement que tous les changements intervenus entre l’année de base et l’année terminale du plan interviennent d’une façon continue et proportionnelle pour l’ensemble des variables considérées. Cette façon de procéder conduit à faire abstraction des mouvements cumulatifs, qui, pourtant, constituent un des phéno-mènes les plus fréquents de la réalité économique. Des progrès substantiels devront être obtenus (par l’emploi de modèles non linéaires et dynamiques) avant que les modèles puissent être utilisés effectivement dans la planification à l’échelle nationale.
y La planification des pays occidentaux ne se conçoit pas sans une politique des revenus* visant à ce que l’accroissement des revenus suive celui du produit national. Or, une telle politique se heurte à l’opposition déclarée des principaux intéressés, syndicats patronaux et ouvriers. Pour que cette politique puisse être acceptée par les salariés, il faudrait qu’elle soit étendue à tous les revenus, y compris les profits, donc les prix. Du côté des entreprises, on s’oppose à la politique des revenus, car on y voit une limitation des possibilités d’autofinancement* et un moyen de contrôle de l’investissement. Dans ces conditions, en cherchant à réglementer les prix et les profits par voie autoritaire, les principaux avantages attachés à la planification indicative risquent de disparaître. La conciliation entre la liberté des prix et la participation aux résultats de la croissance économique apparaît bien difficile. D’aucuns estiment que cette contradiction pourrait être résolue en organisant une participation des salariés aux bénéfices et au capital de l’entreprise.