Plus près de nous, on le rencontre : dans les flammes, les explosions et les ondes de choc, où l’ionisation se fait par élévation de température ; dans les tubes fluorescents, les arcs électriques et les éclairs atmosphériques, où des champs électriques accélèrent des électrons qui, par choc, ionisent les molé-
cules ; enfin dans les électrolytes et les solides (métaux et semi-conducteurs).
Au laboratoire, les plasmas sont de plus en plus utilisés en électronique et en électrotechnique en raison de leurs propriétés : par exemple pour la conversion de la chaleur en énergie électrique (convertisseurs thermo-ioniques et M. H. D.) et pour la propulsion ionique. L’application la plus importante, bien qu’encore un peu lointaine, est la réalisation de réacteurs à fusion thermonucléaire contrôlée, utilisant des plasmas de deutérium ou de mélange deutérium-tritium ; c’est sous l’impulsion de ces recherches sur la fusion que la physique des plasmas a pris son essor.
La figure précise les domaines de densité ne et de température Te des électrons pour les différents types de plasmas ou de décharges.
Effet d’écran et
oscillations de plasma,
conditions d’existence
d’un plasma
Toutes les propriétés des plasmas sont la conséquence des interactions collectives entre les particules char-downloadModeText.vue.download 606 sur 619
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 15
8673
gées. Néanmoins, ces interactions ne prennent leur caractère collectif qu’audelà d’une certaine distance critique : c’est la longueur de Debye (du nom du physicien américain d’origine néerlandaise P. J. W. Debye [1884-1966]). Autour d’un ion positif, les électrons sont soumis à des forces antagonistes : d’une part l’attraction coulombienne exercée par la charge ionique et d’autre part l’effet de leur agitation thermique, qui se traduit par un gradient de pression ; l’équilibre entre ces deux forces assure la non-recombinaison des charges positives et négatives dans le plasma et permet de préciser la valeur de cette distance critique :
(où Te est la température [en kelvins]
et ne la densité [par mètre cube] des électrons). Un « nuage » d’électrons s’accumule donc au voisinage de l’ion et joue le rôle d’un écran électrostatique pour les charges situées à l’exté-
rieur : en deçà de cette distance AD, les électrons subissent essentiellement la force d’attraction de l’ion, et l’on a affaire à des interactions binaires, tandis qu’au-delà les électrons sont soumis au champ électrique moyen, véritable champ de charge* d’espace, résultant, après effet d’écran, de la superposition des différents champs électriques résiduels créés par chaque ion, entouré de son nuage électronique. Pour un système de dimension donnée L, les interactions binaires seront prédominantes si c’est ce qui arrive
dans les plasmas peu denses ou chauds
et d’autant moins denses qu’ils sont moins chauds ; on a alors un plasma collisionnel, dont les propriétés s’apparentent beaucoup à celles d’un fluide ordinaire, mais avec une conduction électrique. Au contraire, si les interactions seront presque exclusivement collectives, et l’on aura alors un plasma non collisionnel, obtenu pour des plasmas denses et d’autant plus denses qu’ils sont plus chauds. On doit remarquer que, pour les systèmes cosmiques, où L est très grand, le caractère non collisionnel pourra se manifester pour des densités très faibles ou des températures élevées.
Une autre manifestation du caractère collectif des interactions est l’existence des oscillations observées par I. Langmuir (1881-1957) : un certain volume d’électrons déplacé de sa position d’équilibre laisse un défaut de charge qui apparaît comme une charge d’espace positive. Il y a donc une forme de rappel due au champ électrique, qui tend à ramener les électrons à leur position d’équilibre. Mais, par suite de leur inertie, ceux-ci dépassent cette position d’équilibre, et le champ électrique s’inverse. On obtient ainsi une oscillation caractéristique de la densité des électrons ne et de leur masse me. Leur fréquence est (où n
e
est mesurée par mètre cube).
Pour les plasmas peu denses,
lorsqu’ils sont obtenus par ionisation d’un gaz neutre, il existe encore beaucoup de particules neutres, et, par conséquent, les électrons subissent avec ces dernières des chocs très fré-
quents qui détruisent la cohérence de leurs oscillations : le caractère collectif ne pourra donc pas se manifester si le nombre de chocs électrons-neutres par période de l’onde est beaucoup plus petit que l’unité ; si νc est le nombre de chocs par seconde, il faudra donc que
On aura donc un plasma proprement dit (c’est-à-dire où les effets collectifs sont prédominants) si les deux conditions et sont
satisfaites.
Principaux phénomènes rencontrés dans les
plasmas
Parmi les nombreux phénomènes
observés dans les plasmas et qui sont caractéristiques de cet « état » de la matière, on peut citer, outre les effets d’écran et les oscillations de plasma, les suivants.
Pour les états stationnaires
y Dans les cas de diffusion ambipolaire, les ions et les électrons diffusent ensemble, par suite de leur attraction mutuelle, avec un coefficient de diffusion intermédiaire entre le coefficient de diffusion libre des électrons et celui des ions. C’est par un processus analogue que se forment des gaines (zones ne contenant que des charges d’un seul signe) au voisinage des électrodes ou des parois. La sonde de Langmuir, fondée sur les propriétés de ces gaines, est utilisée pour mesurer la température électronique et les densités électronique et ionique.
y En présence d’un champ magné-
tique statique Bo, les électrons tournent sur des orbites circulaires (équivalant à de petits aimants), ce qui conduit au diamagnétisme des plasmas. Plus gé-
néralement, l’analyse des forces agissant à la limite du plasma permet de définir des dispositifs de confinement (v. magnétohydrodynamique).
Pour les états non stationnaires Dans les situations perturbées, et notamment pour les perturbations périodiques dans le temps, deux propriétés, paradoxalement opposées, apparaissent et d’autant plus nettes que le plasma est non collisionnel :
— le caractère bon conducteur en basse fréquence ;
— le caractère bon isolant (c’est-à-dire diélectrique) en haute fréquence.
y En basse fréquence, on retrouve les propriétés M. H. D. du plasma, tout particulièrement les ondes d’Al-
fvén* ainsi que les ondes dépendant de l’agitation thermique, comme par exemple l’onde pseudosonore.
y En haute fréquence, le compor-
tement diélectrique conduit à des ondes électromagnétiques qui ont des caractéristiques analogues à celles qui sont observées dans les cristaux anisotropes uniaxes, mais avec des fréquences critiques (fréquences de coupure séparant les domaines à propagation de ceux où l’onde est éva-nescente ; fréquences de résonance gyromagnétiques, correspondant à la fréquence de rotation des électrons dans le champ Bo). À coté de deux modes circulaires (droit et gauche) en propagation parallèle à Bo, il existe deux modes en propagation perpendiculaire à Bo : le mode extraordinaire et le mode ordinaire. C’est ce dernier mode, avec un champ électrique vibrant le long de Bo, qui est utilisé en interférométrie hyperfréquence.
La prise en compte, pour les ondes lentes, de l’agitation thermique se traduit aussi par des propriétés spéciales, c’est-à-dire de nouvelles ondes.
Pour les états instables
On observe, outre les instabilités macroscopiques, des instabilités microscopiques, où seuls interviennent des groupes de particules de même vitesse et qui fournissent, aux dépens de leur énergie cinétique, de l’énergie à l’onde et la font croître. Il en résulte des émissions radioélectriques.