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Ce théorème d’impossibilité va susciter toute une réflexion qui utilise des modèles axiomatiques pour sortir de l’impasse, enrichissant ainsi la science politique par l’étude des procédures de décision collective.

y Les stratégies des partis politiques.

La théorie des modèles et la théorie des jeux*, qui en est un des aspects, permettent aux partis de résoudre des problèmes tels que la prévision des coalitions politiques les plus stables (théorie du marchandage de W. M. Leiserson) ou l’élaboration du programme permettant d’avoir le plus de chances de remporter une élection (modèle de stratégie, proposé par Anthony Downs en 1957 dans An Economic Theory of Democracy).

y La construction de systèmes politiques. L’utilisation des modèles pour l’élaboration de systèmes politiques (modèle cybernétique de D. Easton, modèle fonctionnel de G. Almond

et J. Coleman) a ouvert une nou-

velle étape de la science politique en donnant naissance à de nouveaux concepts et en suscitant de nouvelles recherches.

Mais, étudiant les systèmes poli-

tiques plus que la société politique, les structures d’équilibre plus que les crises, l’utilisation des modèles révèle les limites de l’approche mathématique : instrument majeur du développement de la science politique par la rigueur des instruments qu’elles fournissent, les méthodes mathématiques ne peuvent résoudre que des problèmes d’ordre praxéologique, les problèmes d’évolution des structures ou du rôle de la violence exigeant toujours le recours

à d’autres méthodes. Ainsi, ni la tendance des Américains à mathématiser à l’extrême la science politique ni, à l’inverse, la réticence des Européens à user de ces méthodes nouvelles n’apparaissent justifiées : loin de réclamer sa propre méthodologie, la science politique se doit d’utiliser les méthodes et techniques les plus efficaces en fonction des problèmes qu’elle a à résoudre.

Les problèmes de

la science politique

Le retard de la science politique D’un débat introduit par Serge Hurtig devant l’Association française de science politique en 1969, il résulte qu’en France le problème n’est plus de créer la science politique, mais bien de la développer pour lui permettre d’éviter la prépondérance des pays anglo-saxons.

L’époque est certes révolue où la science politique française pouvait apparaître comme une science sans adeptes, sans moyens, sans contenu.

Des spécialistes de très grande valeur, comme M. Prélot, G. Burdeau, M. Duverger, R. G. Schwartzenberg, etc., des instituts et des revues, des

« réussites remarquables » (le mot est de R. Aron) comme la sociologie électorale*, attestent de l’existence d’une science politique française. Mais la préférence des politicologues français pour l’enseignement au détriment de la recherche, l’insuffisance de l’équipement, qui reste à un niveau très inférieur à celui de pays comme la Grande-Bretagne et l’Allemagne (surtout pour les crédits d’enquêtes et de recherches), le « francocentrisme » des recherches et le retard méthodologique qui gênent l’exploration de nombreux domaines contribuent sans aucun doute à maintenir la science politique fran-

çaise dans l’« état infantile » qu’a dé-

noncé Georges Lavau.

La « faillite » de la science

politique ?

Constatant la « faillite » de la science politique révélée par son incapacité à prévoir les crises et conflits des années 60, certains politicologues américains remettent radicalement en cause l’uti-

lité de leur discipline et s’interrogent : la science politique, pour quoi faire ?

Par la prise en considération des données psychologiques constitutives du political behavior (comportement politique) et l’élaboration de théories à partir de la quantification rigoureuse de connaissances, le mouvement béhavioriste a certes permis le développement prodigieux de la science politique des années 1950. Mais, traditionnelle ou béhavioriste, la science politique est

« mystificatrice » (pour reprendre le terme de M. Duverger). Privilégiant l’aspect intégrateur de la politique, elle fournit aux élites de la société, et à elles seules, des moyens d’atteindre leurs buts sans s’interroger sur la valeur de ces buts.

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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 16

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Pour les tenants du mouvement

postbéhavioriste, leur discipline doit accomplir sa « révolution ». La science politique ne doit plus en effet se contenter de décrire le passé (approche traditionnelle) ou de perfectionner ses outils d’investigation (approche béhavioriste), elle doit servir les vrais besoins de l’humanité, tenter de résoudre les problèmes actuels, devenir efficace.

Contemplative jusque-là, la science politique se veut maintenant science d’action. Et, rejetant la distinction qu’avait cru pouvoir établir un Max Weber entre le savant et le politique, les politicologues américains revendiquent le droit et la responsabilité d’utiliser leur discipline pour réformer la société.

Le développement harmonieux de

la science politique

Pourtant, les crises de la science politique ne sont pas inévitables, ses problèmes ne sont pas insolubles, comme le prouve la Suède, où le développement harmonieux de la science politique peut s’expliquer par le poids d’une longue tradition : dès 1622, une chaire de « rhétorique et politique »

est créée à Uppsala, où enseigne sans doute le premier professeur de science

politique du monde. Et la statskunskap (science politique) devient une discipline universitaire, indépendante avant tout autre sujet de sciences sociales. La part importante prise à la vie politique par les professeurs de science politique, il y a quelque cinquante ans, et l’aide financière de l’État expliquent l’importance de la science politique appliquée et les nombreux domaines abordés par une recherche politique qu’aucun heurt majeur n’est venu troubler.

Ces controverses, ces crises, ces contestations ne sont-elles pas en dé-

finitive la preuve de la vitalité d’une science qui s’estime assez forte désormais pour refuser le confort des mé-

thodologies définitives et le refuge des théories totales ? Affirmant son existence, sans nier ses besoins (ni sa capacité) de progrès, la science politique est loin d’être « moribonde » (J. Attali).

Et sa plus grande réussite est peut-

être que, visant l’homme dans la polis élargie aux dimensions du monde, elle permette à ceux qui la servent de dire, comme A. Grosser, malgré les échecs et les erreurs, leur « joie de toucher à l’essentiel », grâce à elle...

F. S.

F Économique (science) / État / Juridiques (sciences) / Politique (sociologie).

C. Schmitt, Der Begriff des Politischen (Munich, 1932, nouv. éd., Berlin, 1963 ; trad.

fr. la Notion de politique, Calmann-Lévy, 1972). / G. Burdeau, Traité de science politique (L. G. D. J., 1949-1958 ; nouv. éd., 1966-1972 ; 7 vol.). / M. Duverger, Méthodes de la science politique (P. U. F., 1959) ; Introduction à la politique (Gallimard, 1964) ; Sociologie de la politique (P. U. F., 1973). / M. Prelot, la Science politique (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1961 ; 4e éd., 1969) ; Sociologie politique (Dalloz, 1973). / M. D. Coplin (sous la dir. de), Simula-tions in the Study of Politics (Chicago, 1968). /

H. Maier, Politische Wissenchaft in Deutschland (Munich, 1969). / P. Birnbaum et F. Chazel (sous la dir. de), Sociologie politique (A. Colin, coll.

« U 2 », 1971). / A. Grosser, l’Explication politique (A. Colin, 1972). / J. W. Lapierre, l’Analyse des systèmes politiques (P. U. F., 1973). / P. Birnbaum, le Pouvoir politique (Dalloz, 1975).

politique

(sociologie)