(A. Bride).
D’une manière plus précise, le code de droit canonique (canon 487) définit ainsi l’état religieux : « Une manière stable de vivre en commun, par laquelle les fidèles s’engagent à observer non seulement les préceptes communs, mais encore les conseils évangéliques, par les voeux d’obéissance de chasteté et de pauvreté. »
C’est en Orient que la vie religieuse s’ébauche, au cours des premiers
siècles de l’ère chrétienne. Elle s’y dé-
veloppe sous deux formes différentes, suivant que le religieux, l’ascète, vit en solitaire ou en communauté. Les déserts de l’Égypte, notamment, voient affluer des ermites, ou anachorètes, qui, dans l’isolement complet, mènent une vie d’une incroyable austérité : les plus célèbres d’entre eux sont saint Paul de Thèbes (v. 228 - v. 341), saint Antoine* (v. 251-356) et saint Hilarion (v. 291 - v. 371). Les persécutions qui favorisaient l’érémitisme ayant cessé, la vie commune, ou cénobitique, s’organise, son premier législateur étant saint Pacôme (v. 290-346). Mais le véritable père du cénobitisme en Orient est saint Basile* (v. 329-379), qui, en downloadModeText.vue.download 630 sur 651
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Asie Mineure, conduit l’institution monastique à une rare perfection.
D’Orient, la vie religieuse passe en Occident. En Afrique du Nord
(Tagaste, Hippone), saint Augustin*
constitue des communautés d’hommes et de femmes, auxquelles, en 423, il donne une « règle », en réalité simple ligne de conduite qui, enrichie de textes augustiniens et d’autres dont il est difficile d’établir la genèse, sera utilisée au Moyen Âge par de nombreuses congrégations de chanoines réguliers et d’ermites.
À Lérins, à Arles, à Marseille, à Poitiers (saint Hilaire), à Tours (saint Martin), en Irlande (saint Colomban)..., des formes diverses et plus ou moins complètes de vie religieuse s’organisent.
Mais c’est incontestablement saint Benoît, père du monachisme bénédictin (VIe s.), qui jette les bases d’un état religieux stable s’épanouissant dans le cadre d’une abbaye et sous l’autorité paternelle d’un supérieur (abbé). Durant des siècles, la notion de moine se confond avec celle de Bénédictin.
Innombrables sont les abbayes béné-
dictines couvrant l’Occident. (V. béné-
dictins.) Des réformes interviennent, telles celle de Cluny* (Xe s.), qui unifie l’observance bénédictine dans une bonne partie de l’Occident, et celle de Cîteaux (fin du XIe s.), qui appelle les Cisterciens*, ou moines blancs (par opposition aux Bénédictins de l’ancienne observance, ou moines noirs), à une vie religieuse plus austère. Parallèlement se manifestent des types divers de vie religieuse : ermites comme les Char-treux* (1084) ou chanoines réguliers comme les Prémontrés (1120). Il faut aussi citer les ordres militaires (chevaliers), dont la naissance et la croissance sont liées aux croisades : Hospitaliers de Saint-Jean (v. 1070), Templiers*
(1119), ordre Teutonique (1190).
Au XIIIe s., on assiste à l’efflorescence des ordres dits « mendiants » : Franciscains (v. frères mineurs), Dominicains*, Carmes*, ermites de Saint-Augustin, qui se livrent à la prédication, à l’étude, à l’enseignement et s’installent en des couvents ou en des résidences au sein des villes. Des ordres de
femmes se développent parallèlement aux ordres d’hommes ; on y suit une règle analogue ; les religieuses y sont soumises à la juridiction des prélats réguliers. Les « mendiants » se diversifient au cours des siècles, surtout les Franciscains, tiraillés entre des aspirations contradictoires : vie libre ou érémitique, étude ou action pastorale.
La Réforme catholique, au XVIe s., suscite de nouvelles formes de vie religieuse. De même qu’au XIe s. l’institution des chanoines réguliers a insufflé au clergé paroissial un peu de la ferveur monastique, de même la Contre-Ré-
forme* voit se multiplier les « prêtres réformés », ou « clercs réguliers », sociétés religieuses caractérisées par le maintien de l’esprit monastique adapté à la mobilité de l’apostolat dans un monde en pleine transformation.
Ainsi naissent les Jésuites, les Théatins, les Barnabites, les Camilliens, les Clercs réguliers des Écoles pies...
Une autre forme de rénovation cléricale est appliquée par un prêtre italien, saint Philippe Neri (1515-1595), qui jette les bases de l’Oratoire*, société sans voeux publics dont les membres vivent en communauté pour travailler à la prédication et à l’enseignement. Les Sulpiciens, les Eudistes, les Prêtres des Missions étrangères... sont des sociétés de prêtres séculiers fondées au XVIIe s. dans l’esprit de l’École française de spiritualité ; il en est de même des Visitandines. Et tandis que d’anciens ordres (Carmes déchaux, Capucins...) se réforment, des instituts religieux à voeux simples se fondent, sous Louis XIII et Louis XIV, pour les besoins du petit peuple ; les deux plus populaires sont les Filles de la Charité, fondées par saint Vincent* de Paul, et les Frères des Écoles chrétiennes, fondés par saint Jean-Baptiste de La Salle.
Le XIXe s. assiste, en France surtout,
à la naissance d’innombrables congré-
gations de femmes, enseignantes et hospitalières, tandis que se multiplient les instituts missionnaires et les congrégations de Frères. De nos jours, les besoins nouveaux de l’apostolat ont provoqué la création d’instituts séculiers.
La disparité excessive des costumes, la dispersion du personnel religieux, downloadModeText.vue.download 631 sur 651
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surtout féminin, en de nombreuses petites communautés ont amené les papes contemporains, et notamment Pie XII, à rajeunir le costume de certaines congrégations et à regrouper des congrégations similaires. Depuis le concile de Vatican II*, qui, dans le décret du 28 octobre 1965, a fixé les règles générales pour une révision des conditions de la vie religieuse, beaucoup d’ordres et de congrégations ont opéré leur aggiornamento, rajeunissant leurs règles, leurs coutumes et même leur forme d’apostolat en fonction des besoins nouveaux ; dans de nombreux cas, religieux et même religieuses ont adopté le costume laïque, au moins pour les séjours hors de la communauté. Les vastes maisons religieuses d’autrefois se ferment au profit de petites communautés intégrées à l’habitat moderne. Depuis 1966, les religieuses sont autorisées, dans certains cas, à donner la communion. Le 7 septembre 1970, la Congrégation romaine du culte divin a publié un document qui définit un voeu spécial pour les jeunes filles qui consacrent leur célibat à l’apostolat laïc. Il semble bien, d’ailleurs, que religieux et religieuses soient appelés à prendre de plus en plus en charge des ministères confiés jusqu’ici aux prêtres séculiers.
Le nombre des religieux et des religieuses ne cesse de diminuer, au profit des groupements laïcs. En 1967, le nombre total des religieuses en France avait diminué de 8 p. 100 environ depuis 1959.
Pour l’ensemble de l’Église catho-
lique, le nombre des membres des quatre grands ordres mendiants (Franciscains, Dominicains, Augustins, Carmes) est passé, entre 1962 et 1973, de 71 319 à 62 214.
Les quatre grandes règles
y La règle de saint Basile*, suivie surtout par les moines orientaux.
y La règle de saint Benoît, adoptée par les Bénédictins*, les Cisterciens*, les Olivétains et nombre d’ordres monastiques.
y La règle de saint Augustin*, observée notamment par les Chanoines réguliers, les Dominicains*, les Servites...