et 1908) sont entièrement de sa main.
De retour à Cagnes après un voyage à Paris, où il a encore visité le Louvre, Renoir s’éteint le 3 décembre 1919,
peu après avoir prononcé ces mots :
« Vite, des couleurs [...] Rendez-moi ma palette. »
C. G.
G. Rivière, Renoir et ses amis (Floury, 1921).
/ D. Rouart, Renoir (Skira, Genève, 1954). /
M. Drucker, Renoir (Tisné, 1955). / M. Gauthier, Renoir (Flammarion, 1958). / Renoir (Hachette, 1970). / F. Daulte, Auguste Renoir. Catalogue raisonné de l’oeuvre peint, t. I : Figures 1860-1890 (Durand-Ruel, Lausanne, 1971). /
M.-P. Fouchet, les Nus de Renoir (Clairefon-taine, Lausanne, 1974).
Renoir (Jean)
Metteur en scène de cinéma français (Paris 1894).
Fils du peintre Auguste Renoir, il est d’abord céramiste avant de s’intéresser au cinéma à partir de 1923. Il débute comme producteur et scénariste de Catherine ou Une vie sans joie (d’Albert Dieudonné, 1924), film au cours duquel il rencontre Catherine Hessling, la vedette du film, qui deviendra sa femme. Mais cette oeuvre ne sera projetée publiquement qu’en 1927. Le ci-néaste réalise entre-temps son premier film, la Fille de l’eau (1924), que suit Nana (1926, d’après E. Zola). Produit par le metteur en scène, ce dernier film est un désastre financier qui ruine Renoir. Celui-ci exécute alors un travail de commande (Marquitta, 1927), et est l’interprète de la P’tite Lilie (d’Alberto Cavalcanti, 1927) avant de réaliser la Petite Marchande d’allumettes (1928, d’après H. C. Andersen) : la féerie et les trucages de ce film lui confèrent une place originale parmi les autres cinéastes français. Mais c’est un nouvel échec commercial, qui contraint Renoir à tourner deux vaudevilles militaires, Tire-au-flanc (1929) et le Tournoi (1929).
Le Bled (1929), film d’aventures, est aussi une oeuvre de commande où le réalisateur rend hommage au cinéma d’action américain. Il tourne ensuite deux films comme comédien et aborde le cinéma parlant avec une adaptation de G. Feydeau, On purge bébé (1931), qui est un succès. La Chienne (1931)
est le premier film parlant auquel Renoir imprime réellement sa marque : c’est un hommage au comédien Michel Simon à travers la peinture d’un Fran-
çais moyen dont la seule évasion, le seul rêve, est précisément la peinture.
L’année suivante, la Nuit du carrefour (1932) adapte l’univers étrange et poé-
tique de G. Simenon. Peut-être est-ce le fait que trois bobines en furent éga-rées qui donne à l’oeuvre une tonalité
« mystérieuse ». C’est certainement le premier film policier important du cinéma français.
Toujours en 1932, le réalisateur
signe Chotard et compagnie et surtout Boudu sauvé des eaux, où il dirige de nouveau M. Simon, dans un rôle de clochard anarchiste. Le cinéaste oppose la liberté du vagabond au confort de la petite bourgeoisie parisienne de l’époque, dans une sorte de désordre lyrique qui surprend : le film est un échec commercial cuisant.
Madame Bovary (1934) en est un
aussi. Prenant du recul par rapport au roman et au style de Flaubert, Renoir adapte le livre sous la forme d’une co-médie tragique où les personnages sont volontairement utilisés comme des héros de théâtre. Cet antiacadémisme choque les partisans de la fidélité à une oeuvre écrite, et Renoir ne doit qu’à l’estime de Marcel Pagnol de pouvoir réaliser Toni (1934).
Tourné dans le midi de la France,
« là où la nature détruisant l’esprit de Babel sait si bien opérer la fusion des races », comme il est dit dans le prologue, le film constitue la première oeuvre néo-réaliste de la production française. Tourné en majorité par des acteurs non professionnels, Toni unit le quotidien à la tragédie dans une atmosphère onirique et ensoleillée.
L’année suivante, Jean Renoir rencontre Jacques Prévert. De la collaboration entre les deux hommes naît le Crime de monsieur Lange (1935), qui amorce un tournant dans l’oeuvre du cinéaste où les préoccupations sociales vont désormais occuper une place essentielle. Féerique, le Crime de monsieur Lange doit autant au brio caustique de son dialogue qu’à l’in-
vention poétique de sa mise en scène, spontanée, presque improvisée. C’est un conte philosophique dirigé contre le capitalisme, qui porte la marque du Front populaire.
La vie est à nous (1936), produit pour la propagande électorale du parti communiste, est l’un des premiers films militants français ; il est rempli de documents d’actualités et de discours politiques auxquels se mêlent des scènes jouées. À sa sortie, les spectateurs qui vont le voir ne payent pas leur place, mais s’abonnent en échange au journal Ciné Liberté, spécialement créé pour la circonstance. Curieusement, la véritable carrière commerciale de La vie est à nous ne commencera qu’à la fin de 1969 et sera la conséquence probable des événements de mai 68.
Après son moyen métrage Une par-
tie de campagne (1936), Renoir adapte Gorki (les Bas-fonds, 1936), puis réalise ce qui demeure aujourd’hui encore son oeuvre la plus connue : la Grande Illusion (1937). Ce film illustre, à travers une histoire d’évasions, les souvenirs d’aviateur et de prisonnier de 1914-1918 de J. Renoir ; c’est l’oeuvre de Renoir où la psychologie occupe la plus grande place. Le film, boycotté downloadModeText.vue.download 13 sur 621
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17
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lors de sa sortie, a connu une réédition triomphale.
En 1937, le metteur en scène donne la Marseillaise, que finance une souscription de la C. G. T., et qui ressemble moins à un film à costumes qu’à une sorte de montage d’actualités sur la Révolution française, à laquelle va la sympathie du cinéaste.
Ce dernier adapte en 1938 Zola pour la seconde fois : la Bête humaine est avant tout le portrait d’une femme, de la femme, qui révèle l’actrice Simone Simon. Après cette oeuvre naturaliste, Renoir tourne alors son « film maudit », la Règle du jeu (1939). Ce
« drame gai » est aujourd’hui reconnu comme le chef-d’oeuvre de Renoir.
Cette minutieuse description des bourgeois de l’époque est accueillie par des huées avant d’être interdite en septembre 1939 par la censure militaire.
Motif : la Règle du jeu est démoralisante. Démoralisante pour la classe visée par le film, parce qu’elle a confusément deviné que, sous les allures de blague entre copains qu’affiche la Règle du jeu, perce une critique acerbe du mode de vie des Français nantis, dans laquelle on peut lire, prémonitoire et fatidique, l’annonce de la défaite de 1940.
Renoir, une fois de plus déçu, part pour l’Italie, où il commence la Tosca (1940), mais l’entrée en guerre de l’Italie l’empêche de filmer plus de cinq plans. Le film sera terminé par Carl Koch. Le cinéaste revient alors à Paris, où il exécute plusieurs travaux pour le Service cinématographique des ar-mées, puis descend dans le Midi. C’est là qu’il reçoit du metteur en scène Robert Florey une lettre l’invitant à se rendre aux États-Unis. Il s’embarque en automne 1940.
À Hollywood, engagé par la Twen-
tieth-Century-Fox, Renoir tourne
l’Étang tragique (Swamp Water,
1941). Le réalisateur définira plus tard sa période américaine comme divisée en deux parties : « Quelques essais dans les grands studios et d’autres avec des indépendants. » À Hollywood, le film provoque une (petite) révolution : c’est en effet la première fois qu’un grand studio admet l’idée qu’on puisse tourner des extérieurs en décors naturels et non pas devant des toiles peintes. Jean Renoir réalise ensuite Vivre libre (This Land is Mine, 1943), dans lequel il veut dévoiler aux Américains un visage peu connu de la France occupée. La mise en scène en est plus didactique qu’inspirée, et le film, qui étonne Hollywood, déchaî-